William Maury, alias WILMAURY

Sceneario.com : Bonjour Wilmaury ! Afin de faire plus ample connaissance, peux-tu te présenter aux lecteurs ?

Wilmaury : Je suis né en 1969 à Millau petite ville dans l’Aveyron (où je vis toujours). Je dessine depuis tout jeune et j’aime varier les styles graphique depuis que Gotlib et Chéret ont investi ma bibliothèque. Je suis un autodidacte (j’ai fait des études en hôtellerie !) et je vis de ma passion (illustrations dans divers magazines, BD, peintures, atelier etc…) depuis 3 ans environ.

Sceneario.com : Tu as à ton actif plusieurs productions. Peux-tu nous en faire l’énumération ?

Wilmaury : Ma première expérience en BD fut un collectif amateur, le fanzine Mystic Compeyre. Deux recueils furent édités en 1999 et 2000 par l’association du festival BD de Compeyre (Aveyron). Et là, ce fut le déclic.

En 2003 je suis édité par le mag Aveyron BD pour ma série médiévale Alban de Montcausson, une chevauchée épique réaliste se déroulant au XIVème dans le nord-Aveyron.

J’ai travaillé en même temps sur le projet Baraka dont le premier tome est sorti en mai 2004. Le tome 2 est ensuite sorti en janvier 2006.
Entre temps, j’ai fait les couleurs sur Agatha Christie tomes 9 et 13 , Bonecreek T1 et actuellement Amerikkka T6.

Et j’ai des projets plein les tiroirs ^ ^ .

Sceneario.com : Quelles sont tes sources d’inspirations, quels auteurs éventuels t’ont permis d’orienter ton dessin ?

Wilmaury : Un bon film peut conditionner mon mental créatif, tout comme une douce musique (AC-DC, Metallica, Iron maiden…)

Comme je disais : Marcel Gotlib pour le dessin d’humour et André Chéret pour le côté réaliste. Puis bien d’autres, une liste qui s’allonge avec les années : Bilal, Caza, Roba, Franquin, Silvestri, Romita (senior). Plus récemment Maëster, Marini, Miller, Guarnido, Barbucci, Watterson etc…

Avant de connaître la BD Belge, j’ai lu des comics ( Strange, Titan, Marvel etc…) Et tout ce fatras-là m’a forcément influencé !

Sceneario.com : As-tu un style de prédilection (historique, fantastique, polar, humour…) ?

Wilmaury : J’aime tout et je dessine tout. Ce que je préfère, c’est le monde onirique : les fées, les trolls, et j’en passe. Mais ça dépend de mon humeur. Pour Baraka c’est plus une commande. Je n’aurais jamais pensé faire du polar un jour ! Mais c’est enrichissant au niveau graphisme et documentation : je regarde les vieilles bagnoles d’un œil différent, maintenant ! Le médiéval demande un travail de documentation énorme aussi. Quant aux comics, mon rêve serait de dessiner un Batman vs Alien. Pourquoi pas ?! (rires) C’est permis de rêver, et l’espoir fait vivre.

Sceneario.com : Pourrais-tu nous dire quelques mots sur la première fois que tu as reçu une réponse positive pour un projet BD "pro" ?! 

Wilmaury : Je suis monté à la Mecque de la BD (Angoulême) mon carton à dessins sous le bras et j’ai proposé plusieurs projets. Atros cité des ados scénarisé par André Triana et Alban de Montcausson scénarisé par Philippe Ajalbert. Déception assurée…

Mais le plus important c’est d’avoir un regard de la part d’un éditeur sur son travail. Emmanuel Proust n’a pas accroché à mes propositions mais plutôt à mon style. C’est lui qui m’a proposé Baraka et m’a mis en contact avec le réalisateur Georges Lautner (Les tontons flingueurs, Mort d’un pourri, Flic ou voyou etc…)

Une complicité s’est installée au fil des semaines et je suis ravi de travailler avec lui. Il est toujours de bon conseil et ne manque pas d’humour, ni de simplicité, ni d’humanité. C’est vrai que le jour où j’ai reçu mon premier contrat, je n’y croyais pas, c’était inespéré !

Sceneario.com : Tu as réalisé en 2003 un ouvrage historique pour Aveyron Magazine. A part cela, tu n’as jamais travaillé que pour les éditions Emmanuel Proust. Y a-t-il des auteurs ou des éditeurs avec lesquels tu aimerais travailler ?

Wilmaury : Peu importe l’éditeur, pourvu qu’il assure et présente bien mon travail ! Mon but est de réaliser une BD tout seul, mais le fait de partager un projet avec un scénariste est aussi motivant. Si le courant ne passe pas, il vaut mieux ne pas s’entêter à continuer.

Sceneario.com : Comment se passe ton partenariat avec Georges Lautner. Comment s’est passée ta première rencontre avec celui-ci ? 

Wilmaury : Nous sommes en très bon rapport. J’ai la chance de le connaître et mes filles l’adorent. Nous travaillons toujours ensemble sur le tome 3 de Baraka. Souvent par mail et par téléphone. Nous habitons le sud mais lui est dans l’Est et moi dans l’Ouest, nous nous voyons en festival ou en vacances ("vacances" = un mot bien étrange dans ce métier !)

Je l’ai rencontré lors de la première séance de dédicace pour la sortie du tome 1. C’était à la Fnac de Montpellier et il faisait très chaud. Nous avons de suite sympathisé. Je connais la plupart de ses films et je reconnais que c’est une chance de partager des moments avec ce grand Monsieur.

Sceneario.com : En combien de temps as-tu réalisé les albums que tu as dessinés ?

Wilmaury : Pour Alban de Montcausson, j’ai mis 9 mois (Premier enfant ^^) couleurs directes et beaucoup de recherches.

Le dessin et la couleur du premier tome de Baraka m’ont pris 5 mois. C’est très court comme délai. Je regrette un peu ce manque de temps : j’aime peaufiner et aggrémenter mes planches de petits détails.

Pour le tome 2, j’ai mis un peu plus de temps car l’histoire n’était pas écrite. Georges Lautner et moi avancions petit à petit au rythme des rebondissements et des tensions de l’histoire. J’ai donc eu la chance de pouvoir passer plus de temps sur les planches et ça se voit. Quand je regarde les 2 albums, avec le recul, j’ai l’impression qu’il y a une décennie entre les 2 !

Pour le tome 3, je me fais plaisir, je change encore de technique, tout en respectant la charte graphique des personnages…

Sceneario.com : En combien de temps colorises-tu un album ?

Wilmaury : Je fais une planche par jour en moyenne. Tout dépend du nombre de festivals et des projets que j’ai entre temps. Je dirais donc que pour un standard de 46 planches, je mets 3 mois environ.

Sceneario.com : Quelles techniques de dessins et de couleurs préfères-tu ?

Wilmaury : J’adore la technique dite classique. Le traditionnel n’a pas son pareil. Vivent les pinceaux, la peinture et les feuilles qui sentent bon ^ ^ !!!

J’ai appris la colo numérique sur Photoshop voilà 5 ans et c’est vrai qu’il y a d’infinies possibilités. Mais ça reste une technique froide et sans saveur pour moi. Je désire m’en éloigner petit à petit mais je peux comprendre l’engouement de la part des jeunes qui débutent. Je leur conseille quand même d’essayer les 2 techniques lors des séances d’atelier que j’anime. Ou de trouver un compromis genre un mix des 2 techniques. Il faut juste que ce mélange soit discret et que la technologie ne prenne pas trop le dessus. 😉

Sceneario.com : Observes-tu la progression de ton talent d’un album à l’autre ?

Wilmaury : J’espère, et mon désir est de toujours faire mieux. Allons de l’avant !!! Par exemple. Je dessine les filles avec beaucoup moins de poitrine. Elles sont plus proportionnées. L’anatomie est meilleure et aussi mes décors sont plus fouillés et détaillés. Pour la couleur, au début j’usais de tous ces beaux filtres et autres effets "Photoshop" et je me suis rendu compte que deux tonalités de couleur bien placées suffisent bien et peuvent donner plus de punch à une illustration. La couleur doit servir le dessin et non l’inverse.

Sceneario.com : Combien de projets peux-tu gérer en simultané ? (Colorises-tu parfois l’album d’un autre pendant que tu dessines "pour toi" ?)

Wilmaury : J’ai essayé mais c’est pas facile. A moins d’avoir des délais confortables. L’idéal c’est d’avoir un seul projet à la fois. Il faut rester crédible et se faire plaisir aussi. J’ai mis en couleur 3 albums alors que je travaillais en simultané sur le tome 3 de Baraka.

Sceneario.com : T’est-il arrivé de refuser des projets ?

Wilmaury : Bien sûr. Au départ on dit oui à tout. Puis il devient judicieux de canaliser cette fougue. Les scénaristes le comprennent bien. Ils s’investissent aussi et c’est toujours délicat d’abandonner un projet en cours. Un choix est toujours difficile. "Est-ce que je me trompe, vais-je dans la bonne direction, aurais-je du accepter ?" Ces questions reviennent souvent. C’est pour ça que je désire tracer mon chemin seul un jour. Si on se plante on ne s’en prend qu’à soi-même.

Sceneario.com : As-tu besoin d’une ambiance particulière pour travailler ? (Vivre à la campagne t’influence-t-il ?)

Wilmaury : Je suis privilégié. J’habite une belle région. J’ai le causse du Larzac et le causse noir qui laissent passer un rayon de soleil dans mon atelier. Si j’ai pas d’inspiration je vais faire un tour (il y a une très belle cascade à 2 pas). J’ai eu du mal à me mettre dans l’ambiance polar au commencement. Surtout que Baraka se passe à Paris, au début. Pour le tome 3 on envoie Olivier "Baraka" en Chine, à Pékin.

Sinon je mets de la grande musique *__* du Métal ou du trash gore et quand ça me saoûle, je passe quelque chose de plus calme. (The Cranberries ou Dido) C’est varié et ça me motive. Le dessin et la musique vont de pair pour moi, je ne conçois pas l’un sans l’autre. Et puis, j’ai deux filles, alors ce n’est pas tous les jours facile de rester concentré !

Sceneario.com : Tu fais vivre un blog sur lequel tu mets justement en scène tes filles. La BD humoristique te tente-t-elle ? Le dessin de strips ?

Wilmaury : Voilà, on y est ! C’est justement ce à quoi je veux consacrer le reste de mon temps. Mais ça n’empêche pas que je m’investisse dans d’autres projets. J’ai remarqué que quand je dessine "humoristique" pendant une longue période, j’ai envie de me remettre au style réaliste ou semi-réaliste et vice-versa.

Mais de créer des gags est une vraie passion même si c’est dur aussi car il faut se renouveler à chaque planche. Je pense à Gotlib, Franquin, Bill Watterson ou Maëster et je me dis qu’ils ont dû en baver certains jours devant le regard ironique de la page blanche ! Bon, j’ai un avantage : mes personnages gambadent dans la maison et les gags se font tout naturellement sous mes yeux… LoOL !!!

Sceneario.com : En consultant ton blog, j’ai appris que tu étais vice-président de l’association "Les Enfants de l’Arche". Peux-tu nous en dire d’avantage sur celle-ci et ta participation ?

Wilmaury : C’est un forum de passionnés qui met en avant, entre autres, de jeunes auteurs (amateurs ou professionnels). Le modérateur Baywin a créé avec certains membres cette association, "Les enfants de l’Arche". Le but est de réunir plusiseurs talents (photographes, dessinateurs, poètes) et d’éditer un collectif. Le premier, qui s’intitule Voyageurs, sortira cet été. Je suis fier d’y avoir participé. J’ai fait 2 planches inédites de Un Air De Famille. C’est sûrement un pied à l’étrier pour plusieurs d’entre eux. Les joies du fanzinat sont impénétrables (sic). C’est un forum agréable comme le vôtre (je n’en doute pas 😉 et qui plus est, Baywin est un ami.

Sceneario.com : Mis à part les albums de BD, te sers-tu de ton talent pour d’autres activités ?

Wilmaury : Je suis portraitiste à mes heures et j’aime aussi manier le pastel sec et l’aquarelle. C’est plus une récréation qu’un boulot à plein temps. La BD me prend beaucoup de temps. J’anime un atelier BD aussi une heure et demie par semaine. Ça me change, j’ai moins de toiles d’araignées sous les bras, je sors et je vois du monde !

Sceneario.com : As-tu dans ta besace des scénarii perso que tu gardes bien au chaud pour un jour les mettre en images ?

Wilmaury : Oui tout à fait. Mais… Ça reste top secret !!!

Sceneario.com : As-tu déjà eu l’occasion de consulter Sceneario.com ?

Wilmaury : Je connais un membre, Berthold. C’est lui qui m’en a parlé. Je sais que vous êtes aussi des passionnés donc, des gens bien !!!

Sceneario.com: Héhé ! Merci, Wilmaury, pour avoir répondu à nos questions et bonne chance pour la suite !