Interview

Questions à Clément BALOUP pour Mong Khéo

Sceneario.com : Bonjour Clément, pouvez-vous, en préambule, nous parler de votre parcours dans le monde de la bande dessinée ? Qu’est-ce qui vous a décidé à pénétrer dans cet univers-là ?

Clément Baloup : Comme beaucoup d’autres auteurs, l’intérêt pour la bd, c’est quelque chose qui m’a pris enfant.

J’ai fait des études d’arts appliqués et les beaux arts où je me suis essayé à d’autres médiums mais l’envie de raconter et de dessiner a toujours été la plus forte. Bon, et puis c’était les beaux arts d’Angoulême, donc j’ai rencontré d’autres gens qui avaient ce désir vissé au corps, ce qui est très motivant !

Sur le plan éditorial j’ai fait 2 rencontres qui m’ont permis de publier, Vincent Bernière pour le Seuil (mais le Seuil a arrêté la bd depuis) et Vincent Henry pour la Boite à bulles avec qui la relation de confiance continue puisque je sortirai prochainement un roman graphique chez cet éditeur.

Sceneario.com : Considérant votre bibliographie "Un automne à Hanoi", "Le chemin de Tùan", "Quitter Saïgon", il semble que le Viet-nam prenne dans vos récits une place prépondérante. Pour quelle raison ?

Clément Baloup : Il y a une relation intime avec le Vietnam dans la mesure où je suis un métis franco-vietnamien. Mais il y a aussi quelque chose de l’ordre du choc esthétique que j’ai eu en séjournant dans ce pays. Je ne suis pas le seul, beaucoup de voyageurs rencontrés m’ont confié avoir eu un coup de cœur pour le Vietnam !

En outre, c’est aussi la relation France – Vietnam que je traite dans ces albums, l’action du Chemin de Tùan se déroule à Marseille et Paris, quant à "Quitter Saigon", les narrateurs vivent en France.

Sceneario.com : Récemment (en janvier dernier), est sorti chez Carabas votre dernier ouvrage "Mong Khéo", l’histoire d’un drôle de vaurien. Quelle en a été la motivation ?

Clément Baloup : L’envie d’aller vers de la bd d’aventure mais à ma façon. Entre 2 projets plus lourds, je voulais avoir un ton plus léger et aussi rendre hommage à des récits ou à des univers que j’affectionne, en privilégiant une narration très fluide pour emporter le lecteur, lui faire dévorer l’album (comme dans un bon Tezuka !).

Sceneario.com : Ce "Mong Khéo" semble être un individu à la fois peu fréquentable et également bien utile. Pourquoi lui avoir attribuer cet ambivalence ?

Clément Baloup : Malgré le côté premier degré de la trame je voulais avoir des personnages avec des caractères riches. Ils sont donc tous un peu ambigus, comme par exemple la grand-mère qui est tantôt affable, tantôt bourrique. Il fallait que le personnage principal, Mong Khéo, soit particulièrement dur à cerner : va-t-il déguerpir comme un voleur ou se révéler être un redresseur de tort ?

Sceneario.com : Si l’aventure de ce mercenaire à moustaches volumineuses semble se baser sur des faits réalistes, elle change de cap dès le franchissement d’une forêt et la rencontre avec un tigre borgne. Pourquoi auréolez-vous ce récit d’une ambiance fantastique ?

Clément Baloup : Une des inspirations de base de ce récit sont les légendes d’Asie du sud-est. Dans ces contes, le fantastique n’est pas un aboutissement de la situation mais un élément du récit. Encore de nos jours au Cambodge ou au Vietnam, beaucoup considèrent que les fantômes existent, ils font partie de la vie quotidienne.

Donc, je voulais que les choses « magiques » fassent partie de l’univers de Mong Khéo sans forcément se focaliser dessus, c’est l’atmosphère qui est comme ça.

Sceneario.com : On aurait pu penser qu’au départ, "Mong Khéo" était un conte pour enfants, mais considérant sa teneur et la violence qui s’y dégage, il semble plus orienté adulte. Qu’est-ce qui vous a fait opté pour le destiner à tel ou tel lectorat ?

Clément Baloup : À l’origine le personnage a été créé pour la revue jeunesse "Choco-creed" puis a aussi fait un passage par Spirou magazine mais, quand j’ai voulu lui faire vivre une aventure plus longue en album, j’ai été rattrapé par des idées de scénario plus adultes. Les 2 albums resteront néanmoins accessibles à un public assez jeune car tout ce qui est « choquant » sera traité en hors champ de la même manière que certains contes pour enfant de Perrault ou Grimm.

Sceneario.com : S’agissant d’un premier tome, combien d’épisodes suivront ?

Clément Baloup : L’aventure entamée dans « Le vaurien » se conclut dans le 2e tome. Si l’accueil est bon je m’attellerai à une 2e aventure en 1 ou 2 tomes…

Sceneario.com :/ Vous intervenez également au titre du dessin. Comment vous organisez-vous dans le découpage de votre récit et de sa représentation graphique ?

Clément Baloup : Je bosse beaucoup le story-board et fait tout l’album ainsi, ensuite je relis, retouche et puis j’attaque les planches finales !

Sceneario.com : La couleur directe sur un léger crayonné semble être votre terrain graphique de prédilection ?

Clément Baloup : J’ai adopté cette technique pour insuffler un côté doux que je vois souvent dans les livres d’illustrations jeunesse mais peu dans la bd et qui correspondait à l’ambiance particulière de cette histoire. Cet aspect me sert aussi à prendre le lecteur à contre-pied quand le propos se fait plus dur.

Sceneario.com : A voir vos différentes publications, vous intervenez soit en duo, soit, comme pour "Mong Khéo" en solo. Qu’est qui vous décide à partir seul ou en partenariat dans une aventure ?

Clément Baloup : En solo, ce sont souvent des projets plus intimes; en collaboration, on essaye de se pousser mutuellement pour expérimenter, créer des histoires que l’on n’aurait pas fait seul…

Sceneario.com : Vous avez créé un collectif "La maison qui pue". Quelle en est la finalité ?

Clément Baloup : C’était pendant mes études, avec mes copains de classe, nous voulions avoir notre fanzine pour raconter absolument ce qu’on voulait et comme on le voulait, un terrain de jeu pour essayer différentes choses sans un prof ou un éditeur qui nous dise comment on doit faire. Pour l’instant, le collectif est en stand by…

Sceneario.com : Travaillez-vous sur d’autres projets autres que la suite de "Mong Khéo" ou préférez-vous d’abord en finir avec ce dernier avant de vous lancer dans autre chose ?

Clément Baloup : En parallèle du 2e Mong Khéo, je travaille avec Mathieu Jiro, co-auteur des "Chinh tri" au Seuil, sur "Diables sucrés" à paraître à la fin de l’année chez Bayou.

Sceneario.com : Quels sont les auteurs ou les travaux de ces derniers qui vous inspirent ? Bénéficiez-vous éventuellement de conseils de certains ?

Clément Baloup : Beaucoup d’auteurs m’inspirent mais j’aime particulièrement le travail d’Emmanuel Guibert. Question conseil, ce sont mes camarades du Zarmatelier (fondé entre autres par Richard Di Martino, Bruno Bessadi et Thomas Allart) qui sont d’une aide précieuse.

Sceneario.com : Souhaiteriez-vous partir dans des genres autres que ceux sur lesquels vous avez œuvré jusqu’à ce jour ?

Clément Baloup : Absolument ! Je m’y attelle déjà avec l’album "Diables sucrés" qui a une touche horrifique et j’ai quelques idées pour d’autres scénarios…

Sceneario.com : Merci de vos réponses et bonne chance pour la suite !

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