Interview

Pierre Boisserie répond à nos questions sur Flor de Luna

Sceneario.com : Bonjour ! Et merci d’avoir accepté de répondre à nos questions ! Pourquoi avoir choisi une nouvelle collaboration avec Eric Stalner, qui, s’il est un artiste prolifique, n’en est pas moins très occupé ? 

Pierre Boisserie :  En fait, les choses se sont faites un peu progressivement. Au départ de ce projet, il y avait le désir de Jacques Glénat de faire une saga autour des cigares, dont il est amateur, et Cuba, dans l’esprit des "Maîtres de l’Orge". Il m’a sollicité, mais étant à l’époque déjà engagé sur d’autres projets, et ne connaissant pas grand chose à l’univers de cigares, j’ai proposé à Eric d’écrire ensemble le scénario, lui-même étant aussi un amateur de cigares. A partir de là, Jacques a fait le forcing pour qu’Eric s’investisse aussi dans le dessin. Mais comme vous le faites très judicieusement observer, Eric est un garçon très occupé, d’où l’idée de partager le dessin avec un autre dessinateur. Et c’est là qu’Eric Lambert a fait son entrée…

Sceneario.com : Comment se passe le travail avec Eric Stalner et Eric Lambert ? Vous êtes tous les trois scénaristes et dessinateurs, alors qui fait quoi, et comment !? Qui est à l’origine du projet ? 

Pierre Boisserie : Jacques est à l’origine du projet. Nous faisons le scénario avec Eric. Dans un premier temps, nous faisons ensemble le synopsis de l’album, à partir duquel je développe un séquencier découpant l’histoire scène par scène. Eric fait le découpage graphique et un premier crayonné à partir de ce séquencier. Puis les planches sont scannées et envoyées à Eric Lambert qui termine le crayonné et encre les planches. Lesquelles planches reviennent vers moi pour que je fasse les dialogues, les bulles et le lettrage. Et voilà…

Sceneario.com : Etes-vous allé à Cuba ? Les uns les autres ? Ensemble ? Ou bien votre documentation provient-elle de lectures, de reportages ?

Pierre Boisserie :  Non, pas encore, mais je ne désespère pas. On se ferait même bien un carnet de voyage à Cuba autour de la culture du tabac et des fabriques de cigares avec Eric. Alors la documentation provient des livres et d’internet, source intarissable de documentation. D’autre part, nous avons rencontré Vahé Gérard, négociant en cigare Genevois et fournisseur de Jacques qui nous a guidés dans cet univers qui est le sien. 

Sceneario.com : Flor de Luna raconte une histoire qui prend source dans le passé mais qui remonte le temps jusqu’à nos jours. Quand on pense à Cuba et à l’actualité, on pense aussi à la politique de cette île. Comment intégrer la notion de réalité politique actuelle à une saga fictive quand se baser sur une réalité ancienne (la traite des nègres, l’arrivée des Espagnols à Cuba) semble plus facile ?

Pierre Boisserie : Le défi était justement de concilier les deux. L’évolution du marché du cigare est intimement liée à l’évolution de la politique et de l’histoire de Cuba. Nous allons donc raconter notre histoire sur les trois époques qui ont le plus marqué l’évolution de l’industrie du cigare à Cuba et dans le monde, chacune faisant l’objet d’un dyptique :

En 1825, le monopole royal espagnol sur le tabac est levé, et les immigrants espagnols se ruent sur Cuba,

En 1900, après deux guerres d’indépendance, l’île exsangue, est prise d’assaut par les capitaux américains et anglais qui font main basse sur l’économie du pays, et

En 1960, c’est la révolution castriste qui, dans un premier temps nationalise toute l’industrie du tabac, avant de faire machine arrière sous l’impulsion du Che. 

Sceneario.com : Pourquoi la série Flor de Luna ne s’est-elle pas appelée Habanos ?

Pierre Boisserie : Pour des questions légales. Habanos est une appellation contrôlée comme Champagne en France et ne peut être utilisée sans l’accord de Habanos SA et sous conditions. Nous avons donc utilisé le nom de la marque que nous avons créée comme titre de la série. A regret…

Sceneario.com : Un album est annoncé tous les 6 mois pour cette série… Quel est le secret d’Eric Stalner pour être aussi prolifique que régulier dans la qualité ? Ou bien Eric Lambert prend-il en charge le dessin du second tome ?

Pierre Boisserie : Je ne sais pas qui a annoncé un album tous les six mois, mais ce ne sera pas le cas. C’est ce qui est prévu pour Voyageur et non pour Flor de Luna. Si nous sortons un album tous les dix, douze mois, ce sera très bien !

Eric passe un mois et demi pour faire les découpages et les crayonnés et Eric Lambert met quatre mois pour faire l’encrage. Mais tout le monde a d’autres projets à assurer à côté, dont Voyageur.

Nous avons aussi adopté cette formule de travail pour les deux derniers tomes de "La Croix de Cazenac", Siro assurant l’encrage sur les crayonnés d’Eric. Nous sommes très contents de ce travail en équipe, qui lui permet de travailler sur plus de projets.

Sceneario.com : En combien de tomes la série est-elle prévue ?

Pierre Boisserie : Sept. 3 dyptiques sur les périodes historiques plus un tome de conclusion dans le présent. 

Sceneario.com : Quelles ont été les difficultés graphiques majeures pour ce tome 1 de Flor de Luna ?

Pierre Boisserie : Ce n’est pas vraiment à moi de répondre, mais le fait de ne pas être allés à Cuba, pas plus que nous n’étions allés à Saint-Pétersbourg pour Cazenac, implique une recherche documentaire rigoureuse. Donc beaucoup de livres et d’heures passées sur internet.

Sceneario.com : Muchas gracias, Pierre, et bonne chance à Flor de Luna, caramba !

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