Interview

Nicolas FRUCTUS

1 – Le parcours

Sceneario.com :Les lecteurs vous découvrent avec Thorinth, mais pouvez vous nous parler de votre parcours depuis Emile Cohl ?
Nicolas Fructus:
Après l’Ecole, je suis monté tout de suite à Paris. Ma formation me portait plutôt exclusivement vers l’illustration. Donc c’est le début des galères habituelles, des petits boulots de pub, institutionnel, un ou deux livres pour « le livre de poche », beaucoup de projets avortés, bref, rien que du très classique. Et un an après être monté, en 1992, un studio d’animation cherchait des dessinateurs pour faire de la recherche décors pour de la série animée. À partir de ce moment, j’ai alterné entre productions et illustration jusqu’en 1996. Là, j’ai commencé à travailler pour Arxel Tribe, société de jeux vidéos, et l’histoire a duré quatre ans ! Je m’occupais de la direction artistique des jeux ainsi que des chartes graphiques. Après plusieurs jeux (Pilgrim, Ring, Faust…) j’ai préféré tout arrêter pour aller plus avant vers la BD. Et depuis, même si la BD est mon travail affectif le plus important, je continue à collaborer principalement pour le cinéma (encore un autre domaine !). En fait, je préfère naviguer vers ce qui m’intéresse plutôt que de rester figé dans un seul secteur. J’aime tout ce qui peut être dessiné, c’est tout.

Sceneario.com :Je me souviens de ces couvertures pour Bifrost et j’ai l’impression que vous utilisiez déjà cette technique informatique, à quel moment avez vous passé le cap vis à vis des techniques traditionnelles ?
Nicolas Fructus:
Les couvertures pour Bifrost sont faites, toutes ou parties, sur ordinateur. Cela date de la période où j’étais dans le jeu vidéo. En fait, c’est là que je me suis acheté une machine et que je n’ai plus lâché Photoshop. En jeu vidéo, c’était une obligation de travailler sur machine. J’ai vite ressenti ça comme un grand bonheur, bien plus que comme un frein.

Sceneario.com :Quels changements cela a t il apporté dans votre façon d’aborder l’image ?
Nicolas Fructus:
Tout. J’ai toujours eu l’habitude de travailler mes illustrations assez salement, en matière. Ca m’a toujours posé des problèmes de rendus pour l’impression. Avec l’informatique, on peut être sale sans paniquer l’imprimeur.

Sceneario.com :Vous avez abordé des domaines très variés dans le dessin, comme l’illustration et la BD, quel regard portez vous actuellement sur ce parcours ?
Nicolas Fructus:
En fait, il existe deux types d’illustration : l’illustration interne (celle qui concerne le texte) et l’illustration de couverture. Je n’ai pas fait tant que ça de couvertures, et c’est un exercice particulier dans lequel je ne me sens encore pas complètement à l’aise. Pour l’illustration interne, il y a des points communs avec la BD. Ce que doit raconter une illustration, c’est justement pas ce que raconte le texte. C’est porter une vision que ne peut exprimer le texte, mais dont on se dit que cela fait corps avec ce dernier. En BD, on retrouve naturellement ce jeu entre texte et dessin.
Mais pour la BD, comme c’est une histoire qui se raconte case après case, il faut préparer ce qui se passe entre deux cases. Par exemple, sur la première case, on verra un homme monter les marche d’un perron, et sur la deuxième case, il sera dans la maison, dans le hall, la porte encore ouverte derrière lui. Ça paraît simple comme ça, mais ça se complique très, très vite. Ce qui ne sera pas dessiné sera suggéré par ce qui est dessiné dans la case d’avant, et intégré dans la narration par la case qui suit, et ça, l’illustration ne le fait pas. La BD fonctionne comme un story-board, sauf que là encore, la BD demande d’autres gymnastiques. Un découpage vidéo est un enchaînement de cases qui sont toutes au même format, et que l’on dessine au plus lisible, là où la BD, de case en case, joue sur tous les formats et tous les états de finition de l’image. En plus, il vaut mieux être endurant.

Sceneario.com :De plus, La BD permet d’autres aérations…
Nicolas Fructus:
Tout à fait !

2 – Thorinth et la BD en général

Sceneario.com :Thorinth semble échapper aux genres habituels, comment décririez vous cette série ?
Nicolas Fructus:
Echapper aux genres n’a jamais été ma préoccupation, faire un travail personnel, oui.
Au départ, ma volonté est seulement de développer un univers qui se suffit à lui-même. Un peu comme dans la BD des années 70/80, les Mœbius, Druillet, Bilal, Mezières…Ce que j’aime chez eux, même si on peut dire que tel ou tel album évoque un univers de science fiction, de space-opera, d’heroic-fantasy…, le décalage graphique qu’ils amènent font de leur univers un espace unique d’expression tant ce dernier leur est personnel. Si j’ai une seule envie, c’est bien de faire partager cela aux lecteurs. Faut-il encore que j’y arrive et ce n’est pas moi qui peut en juger.

Sceneario.com :De plus en plus, j’ai l’impression d’entrer dans la conscience d’un personnage, un peu dans le style de « Alice au pays des merveilles », comme si chaque personnage correspondait à un aspect d’une même figure. Y a t il vraiment une logique qui régit cet univers ?
Nicolas Fructus:
Oui, tout à fait.
Au départ, je travaillais chez Arxel Tribe quand j’ai commencé Thorinth. La première idée était de faire une série d’animation hybride entre la synthèse, la maquette, l’animation traditionnelle. Puis, après avoir fait quelques décors, les personnages que l’on retrouve toujours dans la BD, un story-board du pilote d’animation, je l’ai montré à quelques amis qui sont dans l’animation et qui m’ont confirmé ce que je pressentais : porter un projet trop personnel en production télévisuelle est une grande source de frustrations. On doit faire des coupes sèches, des réécritures plus simplistes, etc…alors j’ai enterré le projet… pour le ressortir en adaptation BD quand je suis parti de la production pour faire un projet personnel.
Le plus gros écueil à l’histoire, je le dois à deux esprits avisés que sont les deux directeurs de collection aux humanos : Bruno Lecigne et Philippe Hauri, Ils m’ont mis très vite en garde de ne pas développer une histoire sur plusieurs tomes qui ne soit que l’histoire d’un univers, mais un univers qui justifie ce que je veux raconter sur l’ensemble du cycle. Et ça, ce n’est pas une mince affaire ! J’avais abordé Thorinth comme on aborde un Jeu de rôle, avec des descriptifs, une cohésion d’univers, de société, etc…Les personnages évoluaient dedans, toutes les histoires y étaient, mais la cohésion n’y était pas encore. C’est à force de retravail et de discussions avec les Humanos que j’ai vraiment pu mener ces trois premiers tomes sur cinq. En plus, je ne suis pas parti avec la prétention de détenir une histoire figée, même si beaucoup d’éléments sont immuables. Tout est toujours matière à discussion avec les Humanos. Ça rend d’ailleurs le travail d’autant plus intéressant !
Pour ce qui est de l’histoire, ou plus exactement de ce vers quoi l’histoire tend (je ne raconte pas la suite), c’est un postulat dont nous sommes tous des bouts de réponse. Dans un espace clos, un asile, c’est l’histoire de deux personnes, Madalis et Veï-din, qui sont, chacun à leur manière, dans une logique d’ascension à l’intérieur de la tour. La première tend à dominer, là où le second cherche la conciliation pour passer à l’étape supérieure. Il cherche sa femme, et elle cherche à aboutir un grand œuvre. Ils sont représentatifs de deux comportements majeurs dans une société : pour arriver à ses fins, il faut soit écraser et détruire pour mieux rebâtir, soit épouser ce qui fait cette société, l’intégrer en soi, et la dépasser en intégrant les facteurs de cette société. Où cela mène-t-il ? vous le saurez dans les deux prochains tomes. Cela soulève bien sûr d’autres questions. En face de ces deux personnages, tous les autres sont des synthèses de caractères plus caricaturaux, comme le roi, Elide, les Schnoubouf, le Bouffon, Amodef, Esiath…ils sont l’architecture de la tour. Ils sont la vie. Ça paraît stupide de dire ça, mais il n’empêche, dans l’idée de départ, Veï-din n’existe pas. Le seul héros, c’est Madalis, même si elle n’apparaît qu’au troisième tome. Veï-din est un vecteur, il n’existe finalement qu’au travers de la recherche de sa femme. Et dans sa recherche, dans son mouvement, il rencontre des êtres qui vivent pleinement dans cette tour, par leurs névroses. Donc il n’a pas vraiment de psychoses, il n’a d’existence qu’au travers de son déplacement dans la tour. Voilà ! ce sont les idées qui ont fait le démarrage de Thorinth. Maintenant, avec l’avancement de l’histoire, les choses sont toujours un peu plus compliquées. Veï-Din est moins un simple vecteur, il véhicule aussi des enjeux humains, bien sûr.

Sceneario.com :Malgré tout, il donne l’impression d’être le seul repère "raisonnable" de cette histoire, la seul borne qui permet de se retrouver, de presque s’identifier finalement. Ce qui lui donne une cohérence très palpable. C’est vrai qu’avec le troisième tome il passe plus en second plan, mais…
Nicolas Fructus:
Il est raisonnable parce qu’il ne fait rien d’autre que chercher sa femme. Je suis d’accord avec ces remarques.

Sceneario.com :Madalis apparait plus comme un personnage irréel, voir théatral, complètement en décalage ! plus en harmonie par rapport au monde de Thorinth en fait !
Nicolas Fructus:
Oui. elle fait irréelle. Pourtant, et plus ça avancera plus ce sera comme ça, elle est puissante. son pouvoir est réel, insistant, dépassant de loin ce que peuvent pour l’instant générer les habitants de la tour.

Sceneario.com :D’ailleurs existe t il un extérieur à Thorinth ?
Nicolas Fructus:
Oui oui oui ! mais il n’a pas de réelle utilité de narration. Thorinth est une tour-prison-asile, sur une planète exclusivement réservée à cela. Le reste de l’univers se passe sur d’autres planètes, technologiquement très avancées. Thorinth est technologiquement une régression, un endroit où le progrès technique ne doit pas avoir d’emprise pour que son rôle d’asile dure le plus longtemps possible. Malgré tout, on a des démarrages d’information sur l’activité de Madalis avant d’arriver dans Thorinth. Mais au final, ne seront décrites que des choses qui aideront à la compréhension de ce monde en vase clos.

Sceneario.com :J’ai senti comme une rupture entre le deuxième et le troisième album, comme si vous aviez décidé d’accélérer l’intrigue… Introduction de nouveaux personnages, changement de ton (plus surréaliste parfois), plus « d’action » aussi. Est ce seulement une impression ?
Nicolas Fructus:
Je ne vois pas ça comme une rupture. Il y a changement de ton, mais pas rupture à mes yeux (je peux me tromper). A partir du troisième tome, la série vit sur l’acquis de l’univers présenté dans les deux premiers tomes. On avançait plus dans une succession d’évènements et de lieux, et maintenant, le but est de rappeler tous les éléments pour contribuer à la compréhension globale de l’histoire. Par exemple, l’arrivée de Madalis, au troisième tome, a été le résultat d’âpres discussions avec les Humanos. Je voulais la faire apparaître au deuxième, mais finalement, pour montrer la puissance qu’elle dégage dès le moment où on la découvre, il fallait le tome deux pour la suivre sans la voir. Et même si on la découvre sûrement plus puissante que ce que l’on pouvait s’imaginer, les éléments étaient là en amont pour expliquer encore plein de petites choses. Le troisième tome est un virage qui ne pouvait être pris qu’en étant imprégné de plein de petits évènements.

Sceneario.com :Cette série semble devoir bientôt se terminer ! Comment allez vous l’organiser ? Y aura t il une sorte de suite ?
Nicolas Fructus:
Je garde les informations secrètes ! Maintenant, je peux d’ores et déjà dire sans trahir quelque secret que Thorinth se finit en cinq tomes non-reconductibles. C’est un voyage sans retour. Cela n’empêche pas de continuer à faire vivre d’autres facettes de l’univers, comme les schnoubouf, mais rien de spécifique ne se prépare, sinon le tome 4.

Sceneario.com :Quelles sont les réactions des lecteurs vis à vis de cet univers décalé ? Après tout, l’ambiance de Thorinth est très particulière.
Nicolas Fructus:
Le public que je rencontre en festival ou en librairie est plutôt varié. J’aurais bien du mal à dire s’il y a une dominante. Sinon peut-être un public féminin, dans une proportion un peu supérieure à la « moyenne » du monde de la BD. La BD est d’abord un public masculin et c’est bien dommage. Ça a tendance à bouger un peu sans que la tendance ne s’inverse. D’un point de vue complètement subjectif, j’ai l’impression que les lectrices ne se portent pas sur les albums à grosse vente, mais plutôt sur les albums décalés, indépendants, différents ; ça ferait de Thorinth une série décalée, finalement (!?!)

Sceneario.com :Avec Thorinth vous entrez donc dans le monde de la BD, on vous retrouve aussi sur les couleurs de Bouncer, quelles sont vos attentes vis à vis de ce média ? Vos envies pour de futurs projets ?
Nicolas Fructus:
Je fais Thorinth pour mon plaisir, Bouncer est un collaboration motivée également par le plaisir de travailler avec Boucq. Maintenant, le futur, je ne le vois pas trop encore. Je continue à travailler sur d’autres médias, mais la BD sera toujours profondément lié à la volonté de partager des rêves graphiques. Beaucoup de projets maraudent dans ma tête, mais j’attends que l’un d’eux prenne le dessus sur les autres. Le temps élague souvent les mauvaises pistes. Ce qui est dur en BD, c’est qu’un projet choisi sur un coup de tête, vous le traînez au moins un an ! Alors prudence…

Sceneario.com :D’ailleurs quels sont les auteurs ou albums qui vous inspirent en ce moment ?
Nicolas Fructus:
De très, très loin tout ce que fait Tanigushi. C’est étrange, cette impression de lire quelqu’un en se disant qu’il a tout compris. C’est cohérent, poétique, et tout est mis en œuvre pour que toute sa technique se plie à l’expression simple des sentiments. Un grand bonheur.

Sceneario.com :J’aime beaucoup aussi son sens du rythme et cet aspect contemplatif. Avez vous un oeil sur cette "nouvelle Manga" ? Ce genre d’auteur comme Frederic Boilet aussi qui parlent de choses plus quotidiennes…
Nicolas Fructus:
J’avais été très touché, dans cette vague, par "pilule bleue" de Frédérik Peeters.Je ne cherche pas systématiquement ce type de BD, mais le nombre de page apporte un développement à l’histoire qui se rapproche d’une dimension palpable, en temps réel, donc plus proche, plus humaine.

Sceneario.com :Quel regard portez vous sur la BD d’aujourd’hui ? Sur cette surproduction, par exemple ? Sur les petits labels ?
Nicolas Fructus:
Que beaucoup d’auteurs existent, ce sera toujours une bonne chose. Que les public s’élargisse et que de petits éditeurs prolifèrent, quoi de mieux ? Le problème se situe ailleurs. C’est l’engorgement des libraires qui ne peuvent plus installer toutes les nouveautés, ou les grandes enseignes qui se placent en position de « prescripteur culturel ».
C’est le même souci pour la littérature, et la BD est en plein dedans. Que faire ? Rien, c’est l’organisation de la structure économique qui provoque ça. Par contre, dans l’idée de la prescription, quelque chose me dérange, le seul moyen d’avoir un écho même quand sa BD n’est pas présente partout, ce sont les médias. Le problème de la critique BD, c’est justement de l’être très peu, voire complètement consensuelle. d’où l’utilité du web, c’est toujours là que j’ai lu les choses les plus pertinentes. On en revient donc au libraire, qui se fait beaucoup de cheveux blancs, mais qui reste à mes yeux le meilleur porte parole des albums.

Sceneario.com :Quels conseils donneriez vous à ces jeunes qui veulent se lancer dans ce métier ?
Nicolas Fructus:
Attention, je ne suis pas si vieux que ça ! soyons sérieux 😉
Rien de très motivant sinon de diversifier suffisamment ses activités pour ne pas être exclusivement dépendant de la BD. C’est un milieu dur, et parfois, aller voir ailleurs, ça laisse la possibilité d’éprouver un discours graphique différemment sans avoir à refaire cinq fois une planche.

3 – La technique, informatique et avenir

Sceneario.com :Reparlons maintenant de votre technique bien à part. Alors, j’ai cru comprendre que vous scanniez vos crayonnés en les estompant légèrement, puis ensuite vous passiez directement à une sorte de couleur directe informatique. C’est ça ?
Nicolas Fructus:
En fait, Thorinth 1 & 2 ont été travaillés comme ça, comme la majorité de mon travail jusqu’à la publication du livre sur Photoshop chez Eyrolles. Depuis, je travaille encore plus directement, surtout depuis le cinéma. J’attaque de plus en plus souvent le dessin sur machine, et la couleur vient se superposer comme en peinture. C’est toujours difficile à décrire, parce que chaque illustration ou application graphique appelle une gymnastique différente. Pour le Tome 3, l’esquisse n’est plus qu’un dessin de mise en place, de cadrage, même plus mis au propre. Je scanne, et j’écrase le trait en peignant dessus. Il n’y a plus de technique propre. Par contre, pour des Ex-Libris, par exemple, je fais un dessin au trait scanné, puis je passe seulement des jus de couleur en dessous. Et pour le cinéma, c’est du composite complet entre du dessin direct sur ordinateur, de la photo, du montage, des effets spéciaux. Je suis bien incapable aujourd’hui de livrer un « étape par étape » pour cette raison. J’utilise aussi pour Thorinth un bon nombre de matières, c’est de la bidouille, comme on pourrait le faire en traditionnel en utilisant de l’encre pour les premiers jus, de l’aéro, des retouches à l’huile, etc…c’est de plus en plus de la bidouille !

Sceneario.com :Qu’est ce que cette technique vous apporte de plus ? mis à part le fabuleux pouvoirs du « pomme Z » 😉 Le contact avec les matières ne vous manque t il pas ?
Nicolas Fructus:
Si, toujours, mais les avantages sont énormes. Le fait de livrer du « prêt à imprimer » est une grande victoire technique. Ca permet une unité qui, même si mon propre travail évolue, peut recoller aux techniques que j’utilisais avant.

Sceneario.com :Sur quelle plate-forme travaillez vous ?
Nicolas Fructus:
Photoshop 7 sur Macintosh Bi-pro 1,25 Go G4, et pas mal de Ram et de disque dur.

Sceneario.com :Est ce vraiment utile de travailler avec les dernières versions ? les tablettes graphiques grand format etc.
Nicolas Fructus:
Pour les tablettes, je n’ai toujours pas trouvé le bien fondé d’avoir une palette A3, A5 est bien suffisant. Ensuite j’utilise un Mac, surtout pour ne dédier ma plate-forme qu’à un seul type d’application. Je peux réparer un Mac, pas un PC. Trop de composantes à connaître. Pour Photoshop, j’ai longtemps travaillé sous le 4, même si le 6 existait. Bouncer 1 & 2 et Thorinth 1 sont faits sous le Photoshop 4. La version 7 et ultérieurs sont une petite révolution. C’est enfin des possibilités de travail au trait, d’effets de pinceaux nouveaux et qui envoient Painter sur le banc des usines à gaz. Mais bon, avec Photoshop 4, on peut déjà tenir quelques années.

Sceneario.com :Il y a quelques années, Painter apparaissait comme ce qui se faisait de plus intuitif dans le domaine, progressivement les gens ne se contentent plus que de Photoshop qui s’affine de plus en plus et qui est très largement suffisant ! Malgré tout Painter offre encore des outils très souples, non ?
Nicolas Fructus:
Oui, je suis méchant avec Painter. Pendant longtemps, il y avait une "patine" Painter, mais avec Photoshop, je trouve qu’on l’utilise comme un outil géant que l’on combine et plie à ses fins, à moins de n’utiliser que les filtres, il est difficile de savoir qui travaille sous Photoshop, chaque dessinateur peut lui donner un axe de travail très différent.

Sceneario.com :L’informatique s’installe de plus en plus dans ce média, par le biais des couleurs tout d’abord, ensuite pour le lettrage, pensez vous qu’elle arrivera à se substituer aux techniques traditionnelles ?
Nicolas Fructus:
C’est déjà fait. Les éditeurs poussent pour avoir du prêt à imprimer. C’est légitime, ça fait de sérieuses économies, mine de rien. Quand une personne fait : le dessin, la couleur, le scénario, le lettrage, les images formatées pour l’impression, ça fait des métiers qui sautent. Sur un album traditionnel, même si l’auteur fait tout, avec encrage ou en couleur directe, il faut scanner les encrages, scanner les couleurs, travailler à la chromie pour être sûr de ne pas avoir de décalage entre l’original et la numérisation, intégrer tout ça, mettre le texte (re-numérisation si le texte est à la main)… en bref, ça ressemble fortement à une usine à gaz. L’intérêt de continuer en traditionnel, je ne le vois qu’en gérant tout de chez soi. Scanner, bidouiller de son côté.

Sceneario.com :Que pensez vous de la surenchères d’effets dans les couleurs « à l’américaine » ?
Nicolas Fructus:
Insupportable, vulgaire. Ou alors j’ai raté des trucs.

Sceneario.com :J’ai remarqué que progressivement la technique s’affinait de plus en plus, vous incluez davantage de matière dans les décors, vous jouez sur des flous, le pinceau s’affine incroyablement, qu’en pensez vous ?
Nicolas Fructus:
Enfin oui, certaines images tombent plus vite, à force de travailler dans le même univers.
De manière générale, la technique bouge avec les applications extérieures qui permettent d’éprouver de nouvelles voies.

Sceneario.com :Merci de nous avoir consacré du temps pour ces réponses.
Nicolas Fructus:
Mais le plaisir fut pour moi !

 

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