Interview

Mathieu Mariolle et Benjamin Carré pour Smoke City

Sceneario.com : Bonjour. Alors, vous voilà arrivés au bout d’une longue tournée de dédicaces ?

Mathieu Mariolle : Oui et c’était de très bons moments. Smoke City a été bien reçu partout et nous avons rencontré des lecteurs enthousiastes. Mais nous ne sommes pas mécontents d’avoir fini car ces séances s’ajoutent à notre travail quotidien. Cela nous éloigne aussi un peu de nos familles bien qu’une grande partie des rencontres avec le public se soit faites dans la région parisienne, donc chez nous.

Sceneario.com : Comment en êtes-vous venus à travailler ensemble ?

Mathieu Mariolle : J’avais acheté le collectif Vampires (Carabas) et j’ai pris une claque énorme en découvrant le travail de Benjamin. Il dessinait des choses que j’avais en tête. Ca m’a donné envie de collaborer avec lui. Je l’ai donc contacté avec un projet d’histoire de vampires. Il n’avait pas envie de travailler là-dessus mais il était partant pour que nous faisions quelque chose ensemble. Nous nous sommes retrouvés dans un restaurant japonais (celui que l’on croise dans Smoke City) et l’histoire est partie.

Sceneario.com : Pourquoi Smoke City ?

Benjamin Carré : Nous voulions faire un récit à la Sin City ou à la Gotham City. Smoke City, ça sonnait bien. Et puis c’est le nom d’un groupe de musique que j’adore ! Leur style est dur à définir, du jungle brésilien en quelque sorte. C’est génial.

Mathieu Mariolle : Dans ce livre, nous avons mélangé toutes nos envies, nos références. Nous avons créé un véritable milk-shake de ce que nous aimions avant de faire le tri, en espérant que le lecteur s’y retrouve. Tout est sorti comme ça, comme deux copains qui discutent.

Sceneario.com : Mathieu Mariolle, vous n’en êtes pas à votre coup d’essai. A seulement 28 ans, vous enchaînez les séries. Quelle est votre actualité ?

Mathieu Mariolle : Quatre séries sont déjà parues. Il y a bien sûr Smoke City, prévu en deux tomes. J’ai bouclé le scénario du second. Benjamin bosse sur les planches et il reste encore les dialogues à préparer. La parution est prévue fin 2008.

Il y a aussi Pixie (Delcourt) dont le tome 4 paraîtra en septembre. Chez Soleil, je m’occupe de l’adaptation de Foot de Rue, une série pour les 6-8 ans, et de Hazard dont l’histoire s’achèvera sur le tome 2, en septembre également.

Mais je travaille aussi sur de nouveaux projets. Avec Aurore, dessinatrice de Pixie, nous allons nous lancer dans un tome de Kookaburra Universe. Je trouve le principe génial. Nous offrir le temps d’un album les clés de Kookaburra, c’est un peu comme nous prêter ses jouets. En bossant là-dessus, j’ai presque l’impression de partir en vacances. On va apporter notre touche à la série, un style plus « féminin » que d’habitude.

Toujours chez Soleil, je viens juste de signer pour une série qui s’intitulera Shanghai. Il parlera de deux filles qui se retrouvent dans la guerre civile à la fin des années 1940. C’est Yann Tisseron qui sera au dessin et ce sera son premier album.

Chez Delcourt, je me lance dans Capitaine Fracasse avec Kyko Duarte qui est déjà mon complice sur De sang froid. J’adorai ce roman et, quand j’ai eu vent de la série Ex-Libris, j’ai contacté Jean David pour lui proposer et ça a été adopté.

Enfin, chez Dargaud paraîtra Alta Donna qui racontera le quotidien fantaisiste d’une jeune ado.

Sceneario.com : C’est impressionnant ! Vivez-vous aujourd’hui complètement de votre métier de scénariste ?

Mathieu Mariolle : Oui. Je suis traducteur de formation. Et, il y a encore quelques mois, je travaillais pour une boîte de jeux vidéos. Mais c’est terminé. Dorénavant, je me consacre entièrement à la bande dessinée. C’est fantastique, d’autant que j’aime particulièrement cette possibilité de passer d’un registre à un autre en BD. Il n’y a pas de lassitude car chaque série devient les vacances d’une autre. L’essentiel c’est de partir dans des projets où je m’amuse.

Sceneario.com : Et pour vous, Benjamin Carré, c’est un premier album. Le bon accueil du public a dû vous procurer un immense plaisir ?

Benjamin Carré : C’est sûr, c’est formidable ! Faire une bande dessinée, c’était un rêve d’enfant. Depuis que je dessine, je me suis toujours dit que j’arriverai un jour à en faire une. Mes modèles, ce sont Bilal, Tardi…

Depuis plus de trois ans Smoke City était mon boulot du soir et des week-ends. A l’origine, j’étais illustrateur dans les jeux de rôle avant de me diriger dans les jeux vidéos il y a huit ans. J’ai, par exemple, travaillé sur Alone in the dark 4 ou Dark Wars. Je fais aussi beaucoup de couvertures de romans. Aujourd’hui, la réussite de Smoke City m’a boosté et me permet de changer mes priorités. A 34 ans, la bande dessiné passe au premier plan tout en continuant les jeux vidéos et les couvertures de romans en free lance. Je bosse aussi sur un projet de décor de film.

Sceneario.com : Ton style oscille entre la peinture et, par moments, des traits plus nets. Quelle est la méthode Carré ?

Benjamin Carré : Il n’y a pas de peinture car je dessine… sur ordinateur et directement en couleur. J’ai arrêté de travailler en contour pour dessiner plutôt en masse. Je pars donc de quelque chose de grossier puis j’affine encore et encore. C’est l’avantage de l’informatique. Certes, je perd en spontanéité mais cela me permet de revenir en arrière si un détail ne me convient pas. J’ai plus confiance en moi que lorsque je dessine sur papier.

Pour les scènes d’action, j’ai donné des traits plus précis aux personnages, appuyant les contours afin de gagner en dynamisme.

Sceneario.com : L’informatique dans la BD, c’est aujourd’hui incontournable ?

Mathieu Mariolle : Aujourd’hui, 95% de la mise en couleur dans le monde de la BD est fait par ordinateur. Ca ne choque plus car les coloristes actuels sont nés avec l’outil informatique et ils ont su y ajouter leurs réflexes artistiques. Du coup, le rendu est impeccable.

Benjamin Carré : Maintenant que je suis habitué à ma palette graphique, je me dit que c’est bien plus naturel et plus efficace que le crayon. Avant, quand je dessinais sur le papier, j’étais gêné par ma main. Une main, ça cache ce que tu es en train de dessiner. Avec l’informatique, tu ne regardes plus ta main mais ton écran. Plus rien ne te gêne.

Sceneario.com : Nous avons parlé des projets de Mathieu. Et toi, Benjamin, as-tu déjà d’autres idées de bandes dessinées ?

Benjamin Carré : J’ai envie de me lancer dans un « space opera ». Mais je préfère ne pas trop y penser pour l’instant car j’ai déjà un album à terminer !

Sceneario.com : Merci pour tout le temps que vous nous avez accordé. Alors, bon courage pour la suite !

Les auteurs : Merci beaucoup et à bientôt !

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