Interview

Le Grand Gentil Loup de Ben Lebègue

Le 19 avril 2008, la librairie 9e Quai (Annecy, Hte Savoie) recevait les auteurs de l’atelier KCS, une équipe d’auteurs de BD, de romans et de livres illustrés de la région lyonnaise. Leurs noms ne vous sont pas inconnus, forcément : Anne Claire Jouvray, Olivier et Jérôme Jouvray, EFIX, B-Gnet, Ben Lebègue et les anneciens Frederik et Grégory Salsedo. Impossible de tous les interviewer. Alors, on a choisi de crier « au loup » et d’aller débusquer une espère en voie d’apparition, connue sous le nom scientifique de Ben Lebègue.

Sceneario.com : Ben Lebègue, pouvez-vous nous parler de votre parcours ?

Ben LEBEGUE : Je suis originaire de Reims et j’ai 28 ans. J’ai toujours voulu faire de la BD. Après un parcours scolaire assez bizarre et un bac pro comptabilité, je suis passé par l’école Emile Colh, à Lyon.

Sceneario.com : C’est donc là-bas qu’est né votre loup, en plein Lyon ?

Ben LEBEGUE : Mais oui. Le Grand Gentil Loup, c’est mon diplôme de fin d’année. Quatre des sept histoires du livre ont ainsi été écrites dans le cadre de mon travail de fin d’études en 2005. En fait, tout est parti d’une pizzéria à Angoulême, la même année. Nous étions avec plusieurs copains et je me suis amusé à dessiner ce loup. Un ami m’a dit : « ils ont l’air drôlement sympas tes loups ; tu devrais écrire une histoire de loup gentil. » Du coup, je me suis lancé dans l’écriture du « Méchant Chaperon Rouge ». Au début, les profs n’étaient pas très chauds mais, une fois qu’ils ont lu l’histoire, ils ont été très emballés.

Sceneario.com :  Vous avez rapidement trouvé un éditeur ?

Ben LEBEGUE :  Cela n’a pas été facile car le style était à mi-parcours entre la BD et l’illustratif. Du coup, certains me disaient : « désolé, c’est de l’illustration et on en fait pas » ou l’inverse. Finalement, c’est une petite maison d’édition (L’Atelier du Poisson Soluble) qui a eu le coup de foudre. Ils n’avaient jamais fait de BD, mais ils ont pris le risque. J’ai alors écrit trois histoires supplémentaires. Le tout a été édité deux ans plus tard, en 2007.

Sceneario.com : Quel est le retour du public ?

Ben LEBEGUE : Cela a été très dur de vendre au début, malgré les bonnes critiques car, quand on débute, il faut se faire un nom. Aujourd’hui, je suis content. Les retours sont bons. Et puis j’ai eu le plaisir d’aller dans une dizaine de classes d’école où les enfants avaient étudié le livre. J’ai été touché de voir combien ils avaient aimé et, surtout, combien ils avaient compris les messages de mes histoires. Il y a plusieurs degrés de compréhension, plusieurs messages. Et ils ont tout pigé, de A à Z. C’était génial !

Sceneario.com :  Effectivement, vous ne vous êtes pas contenté de détourner des contes.

Ben LEBEGUE : Non. Bien sûr, au fil des histoires, le but a bien été de détourner les contes de façon humoristique. Mais je l’ai fait tout en restant moi-même, en faisant passer les messages qui me touchent. J’ai choisi le loup car, dans l’imagerie collective, il est forcément méchant. Les pauvres… Pourtant, c’est comme les gens. Dans la vie, il y a les imbéciles et les gens intelligents. Il faut arrêter avec les préjugés. Tout cela pour dire que, derrière l’image du loup, c’est bien des gens que je parle. J’ai essayé de faire rire le lecteur tout en traitant de sujets qui me touchent comme les enfants qui ont des problèmes mentaux, à l’image du "toc" de la deuxième histoire, ou encore  ceux qui sont exploités par les adultes. C’est d’ailleurs le rôle des contes et des fables à l’origine : critiquer les problèmes de société de leur époque.

Sceneario.com : Quels sont vos projets maintenant ?

Ben LEBEGUE : Je travaille sur un album avec Virginie Jouvray. Il traite de la dyslexie. Pour moi, c’est un peu une thérapie car je suis dyslexique et que cela m’a beaucoup gêné enfant. Virginie aussi est dyslexique. Nous avons regroupé nos deux expériences toujours dans la volonté de transmettre un message. Quand j’étais gosse, l’instituteur ne se posait pas de question sur l’existence de ce problème. On était un peu débiles et c’était tout. Je veux donc dire à tous ceux qui sont touchés par cela : « non, vous n’êtes pas débiles ». Heureusement, maintenant, le monde enseignant est formé à ce problème et il n’y a plus que les profs les plus âgés qui ont encore du mal à prendre cela en compte.
Je bosse aussi sur un autre projet, plus classique, avec Jean-Christophe Deveney. C’est l’histoire d’un petit renard. Le message est écologique. Nous sommes en discussion avec Dupuis, pour leur collection « Puceron ». C’est destiné à un public très jeune et il n’y aura donc aucun texte. Et ça, c’est un sacré défi que de raconter une histoire sans paroles.

Sceneario.com : Un petit mot sur l’atelier KCS ? Ca veut dire quoi ?

Ben LEBEGUE : Le nom ne veut rien dire. C’est tout simplement une bande d’auteurs passionnés, des gens qui s’apprécient et se voient régulièrement pour échanger, discuter de leur boulot, recevoir des avis, des critiques, des conseils. Il faut se bouger pour progresser. Ici, c’est d’autant plus intéressant que tout le monde ne fait pas la même chose. Il y a différents métiers (dessin, scénario, couleurs…) et différents styles. Se livrer au regard des autres n’est pas toujours facile, mais cela fait vraiment avancer !

Sceneario.com : Merci Ben. Alors, bon courage. On suivra avec intérêt vos nouveaux projets !

 Ben LEBEGUE : merci beaucoup !

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