Interview

Jean-Michel ARROYO, dessinateur de la série Pierre Baumont

Sceneario.com : Bonjour Jean-Michel. Pourrais-tu te présenter aux lecteurs ?

Jean-Michel Arroyo : Bonjour. Je vis et je travaille dans le sud de la France. J’ai commencé la BD en 2003 avec mon premier album La foire aux frisés, puis j’ai enchaîné avec une série chez Joker Editions intitulée Le paquebot des sables dont 3 tomes sont parus. Parallèlement, j’ai fait des travaux d’illustration pour les éditions De La Martinière. Aujourd’hui, suite à la rencontre avec Philippe Chanoinat, je travaille sur une nouvelle série policière, Pierre Baumont, dont le tome 1 vient de paraître. 

Sceneario.com : Avec aujourd’hui 4 albums BD publiés, tu es pourtant encore relativement peu connu du public. Expliquerais-tu cela par le fait que tu as toujours travaillé pour le même éditeur (Joker), ou peut-être à cause du sujet de tes BD ?

Jean-Michel Arroyo : On peut qualifier Le paquebot des sables de série plutôt régionaliste car elle raconte la véritable histoire d’un bateau aujourd’hui ensablé à Port Barcarès. Il est vrai aussi que c’est ma première série et que le scénariste jacques Hiron signait ici son premier scénario dans la BD. De plus, Joker est un éditeur dont le catalogue était principalement humoristique et coquin (Dany, Gürsel…) et que ce n’est que récemment qu’il a créé la collection Horizon qui rassemble des séries réalistes dont les miennes font partie.

Sceneario.com : Comment es-tu arrivé à la BD ?

Jean-Michel Arroyo : J’étais d’abord lecteur. J’ai commencé à lire vers 6/7 ans et curieusement j’ai débuté par le comics. J’étais impressionné par la dynamique des pages, les cadrages et la mise en scène. Ce n’est qu’à l’âge de 10/11 ans que j’ai découvert la BD franco-belge (Tintin, Spirou…). Chez Hergé, j’ai été frappé par la rigueur du dessin et le côté rhétorique de la narration. A ce moment-là, j’ai vraiment plongé dans la ligne claire avec Hergé, Martin, Jacobs… jusqu’à ce que je découvre Franquin. Ca a été pour moi un grand choc car je le trouvais supérieur à tous les autres dessinateurs sur de nombreux points : l’expressivité, le dynamisme, l’encrage, le côté « nerveux ».

J’étais donc lecteur et je dessinais aussi. Je m’amusais à illustrer des petits scénarios que j’écrivais. A l’âge de 14 ans, j’ai complètement arrêté le dessin pour me consacrer à la compétition de cyclisme sur route que j’ai pratiquée pendant 8 ans. A 22 ans, quand j’ai arrêté la compétition cycliste, je me suis naturellement remis à dessiner. Je suis allé rencontrer des dessinateurs professionnels dans des festivals jusqu’à ce qu’en 1997, je rencontre Jacques Hiron avec qui j’ai sympathisé et avec qui j’ai rapidement eu envie de collaborer. On a donc décidé de travailler ensemble et ça a donné La foire aux frisés.


Sceneario.com : Dans quelles conditions vous êtes-vous rencontrés, puisque cet album sera son premier scénario BD ?

Jean-Michel Arroyo : Avec Jacques, on s’est rencontrés au festival de Sérignan en 1997, dont Moebius était le président. J’étais chargé de l’aider à installer son exposition sur Tintin (Jacques est un grand Tintinophile). Nous avons passé la journée ensemble et nous avons beaucoup discuté BD. Je lui ai dit que je dessinais un peu et je lui ai proposé de m’écrire un scénario. Il a accepté de relever le défi et m’a écrit un premier scénario qui s’intitulait Halloween Cathare que j’avais traité « à la Spirou ». Malheureusement, l’éditeur a fait faillite avant que l’album n’ait été édité ! Ensuite, avec Jacques, plutôt que d’essayer de replacer ce projet chez un autre éditeur, nous avons décidé de faire La foire aux frisés dans un style un peu plus réaliste.

Sceneario.com : C’est avec lui que tu signes aussi la série (en cours) Le paquebot des sables. Pourquoi avoir choisi de retravailler tout de suite avec Jacques Hiron ? Avais-tu d’autres projets mais qui n’ont pas trouvé preneur ?

Jean-Michel Arroyo : La série Le paquebot des sables est née d’un roman de Jacques qui porte le même nom. Après notre premier album, Jacques est devenu un ami avec qui j’ai plaisir à travailler. Et comme à ce moment-là, je n’avais pas d’autres projets…

Sceneario.com : Souhaites-tu te focaliser sur un seul style d’aventures (post-guerre) ou désires-tu te diversifier en travaillant dans d’autres domaines (science fiction, western …) ?

Jean-Michel Arroyo : J’ai bien aimé traiter la seconde guerre mondiale car c’est une période de troubles pendant laquelle il s’est passé des événements tragiques. Cela dit, je ne compte pas me focaliser sur cette période. Ma nouvelle série est un polar qui se situe dans les années 60 et plus tard, j’aimerais bien explorer des thèmes dans lesquels je serai plus libre graphiquement et où je pourrai créer un univers (Sf ou fantasy, par exemple). 


 Sceneario.com : La foire aux frisés est un album en noir et blanc. Etait-ce ton choix ou celui de Jacques Hiron ?

Jean-Michel Arroyo : C’était mon choix car j’ai toujours aimé les BD avec des palettes de couleurs réduites et le lavis d’encre de Chine m’est venu spontanément pour raconter cette histoire qui se passe pendant la seconde guerre mondiale, période de laquelle on a l’habitude de voir des clichés en noir et blanc.

Sceneario.com : Depuis, tu travailles en couleurs. Un retour au noir et blanc pourra-t-il être envisagé un jour ?

Jean-Michel Arroyo : Après La foire aux frisés, j’ai voulu essayer d’autres techniques (couleurs directes, par ordinateur) et finalement, la couleur directe est la technique qui m’attire le plus. Cela dit, j’aimerais beaucoup faire un album au lavis. Je trouve qu’utiliser une seule couleur augmente la lisibilité d’une histoire et donne un cachet particulier à l’ensemble.

Sceneario.com : Quelles sont tes méthodes de travail ? Sur quel format dessines-tu ? En combien de temps réalises-tu un album ?

Jean-Michel Arroyo : Quand je reçois le scénario, je commence toujours par storyboarder les pages. Ensuite, je fais des crayonnés sur feuille libre que je reporte sur la planche à la table lumineuse. Puis j’encre le dessin qui sera colorié soit à l’ordinateur soit directement sur la planche. Je travaille sur format A3. Pour les couleurs, j’utilise soit des encres, soit l’ordinateur. Il me faut environ 7 mois pour réaliser un album.

Sceneario.com : As-tu choisi de ne pas être le coloriste de Pierre Baumont ?

Jean-Michel Arroyo : Oui, car j’avais envie de me concentrer sur le dessin et sur le travail en noir et blanc. J’ai cependant réalisé la couverture en couleurs directes. 


Sceneario.com : Savoir que tu ne coloriseras pas te fait-il dessiner autrement ?

Jean-Michel Arroyo : Oui, car j’essaye de poser des indications de volumes et de lumière à la mise à l’encre, en noir et blanc.

Sceneario.com : Comment as-tu rencontré Chanoinat ? Que penses-tu de lui (Ca fait quoi de travailler avec un « nom » comme ça) !?

Jean-Michel Arroyo : J’ai rencontré Phil au salon du livre de Limoges il y a 2 ans. On a sympathisé et il m’a proposé de m’écrire un scénario. Quelque temps après, il m’a invité à venir chez lui. On a beaucoup discuté et on s’est trouvé des goûts communs, notamment du point de vue cinématographique. On a eu l’idée d’un polar fantastique situé dans les années 60, ce qui a donné Pierre Baumont. J’aime beaucoup son travail et je m’entends très bien avec lui. C’est quelqu’un que j’apprécie autant humainement que professionnellement.

Sceneario.com : La série Le paquebot des sables est actuellement en stand-by. Comment vas-tu gérer la réalisation des albums 4 à 6 en même temps que la suite de Pierre Baumont et que d’autres projets que tu as peut-être « sur le feu » ?

Jean-Michel Arroyo : Actuellement, je travaille sur le tome 2 de Pierre Baumont. Mon éditeur m’a accordé un délai pour la suite du Paquebot des sables que je reprendrai après avoir terminé le nouveau projet que je commence parallèlement chez un autre éditeur : l’adaptation de Germinal en 96 pages, toujours avec Chanoinat.

Sceneario.com : Est-il vrai que tu es un adepte de Tardi ? Quelles sont tes (autres) influences ? Tes styles de lectures ? Tes coups de cœur BD ?

Jean-Michel Arroyo : Il est vrai que j’aime beaucoup Tardi avec son dessin stylisé et très efficace. J’ai des goûts très éclectiques et plutôt classiques. J’aime aussi Giraud, Dany, Gibrat… Je lis de moins en moins de BD mais je lis beaucoup de romans policiers et je suis très curieux en matière de cinéma, documentaires, etc…

Sceneario.com : Es-tu un grand utilisateur d’Internet, et connaissais-tu le site Sceneario.com ?

Jean-Michel Arroyo : Non, je ne suis pas un très grand utilisateur d’Internet. Je m’en sers surtout pour me documenter et c’est un outil très pratique pour travailler à distance. Je connaissais le site Sceneario.com. J’y ai déjà lu des interviews et des critiques BD.

Sceneario.com : Merci beaucoup, Jean-Michel, et à bientôt !

 

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