Interview

Interview de Diego Aranega pour la sortie de Victour LALOUZ

Sceneario.com : Diego, te revoilà sur Sceneario, quel est ton parcours depuis notre première rencontre en septembre 2003 ?
Diego Aranega : Après t’avoir quitté je suis allé boire un café, sur le chemin du retour le ciel s’est fendu en 2, un type avec un moule-bite vert fluo à franges violettes et une grande barbe blanche est descendu d’un escalator géant, il m’a posé la main sur la tête et m’a dit : "Diego maintenant tu te calmes et tu te recentres sur les vraies valeurs". Ça a été comme un électrochoc, je suis allé au dépôt des bus et je me suis payé un aller simple pour le Cambodge. Depuis ce temps là je participe à des programmes d’alphabétisation et de reconstruction de ponts, pis le week-end pour me changer les idées je fais de la BD et de l’illustration de presse.

Sceneario.com : Chez télérama, combien de temps as tu pour réaliser une illustration?
Diego Aranega : En presse les délais sont souvent donnés en fonction de la périodicité, quand je fais un dessin pour Le Monde j’ai quelques heures, quand je le fais pour Télérama ça varie entre 1 et 24 heures en fonction de l’urgence, je peux travailler très vite. Si une rédaction m’appelle en urgence pour illustrer une actu qui déboule et qui en chasse une autre, je peux bosser en moins d’une heure. Quand je travaille pour un mensuel les délais de bouclage sont encore différents, j’ai un poil plus de temps, genre 48 heures, sauf si les dessins concernent les pages actu, vu que pour un mensuel ce sont les pages qui partent en dernier à la gravure.

Sceneario.com : Quelle sont tes contraintes?
Diego Aranega : A part les délais, les contraintes en presse ce sont celles que je me fixe : être efficace, pas redondant, proposer un vrai regard sur le sujet traité, ne jamais faire dans le décoratif. A chaque nouvelle commande je remets tout à plat et je m’adapte au lectorat : les référents ne sont pas les mêmes quand je m’adresse aux lecteurs d’un magazine de musique électronique, à ceux qui lisent de la presse économique, ou encore à ceux (les juniors) qui n’ont encore jamais tenu un vrai journal dans les pattes.

Sceneario.com : Souhaites-tu continuer à faire du dessin de presse ?
Diego Aranega : Bien sûr, dessiner pour la presse c’est excitant, le matin on t’appelle pour un truc, le lendemain ou au pire la semaine d’après c’est  dans les kiosques, y’ une immédiateté qu’on ne retrouve guère dans l’édition, ça m’oblige à rester vif et à traiter des sujets vers lesquels je ne tendrais pas naturellement. Pour la petite histoire je travaille toujours plus pour la presse que pour l’édition, j’ai ma carte de presse depuis plus de 10 ans et je tiens à la conserver pour impressionner les gonzesses.

Sceneario.com : Tes dessins dans les magazines collent à des thèmes donnés mais sans pour autant coller "à froid" à l’actualité. En qualité d’illustrateur, te sentirais-tu à l’aise dans la création de dessins qui devraient répondre à cette contrainte d’être drôle (ou cynique, ou autre) sur un sujet que tu aurais à traiter du jour au lendemain, et cela tous les jours ?
Diego Aranega : En général, je m’arrange toujours pour que les dessins que je fais pour la presse aient une autonomie de manière à ce qu’il puissent fonctionner sans les articles, j’essaye même de faire en sorte (quand c’est possible) qu’ils puissent fonctionner hors d’un contexte social donné. Alors bosser quotidiennement pour un canard, oui dans l’idée c’est chouette, mais ça me monopoliserait trop la tête et là pour le coup je ne pourrais plus rien faire à côté. En presse je n’ai de contrat fixe avec aucune rédaction, je suis une sorte de fils du vent, toujours prêt à faire une mission à gauche ou à droite, mais toujours soucieux de conserver du temps et de la disponibilité d’esprit pour faire mes bandes dessinées.


Sceneario.com : C’est vrai que Playboy t’a contacté ? "
Diego Aranega : Oui, ils ont flashé sur Victor et le mettront en avant dans le numéro de février 2007, un alibi en or pour les amateurs de BD qui pourront acheter le mag la tête haute et le laisser trôner sur la table basse du salon ! le papier sera mis en image avec un dessin inédit  que j’ai fait spécialement pour l’occasion !

Sceneario.com : Le tome 2 de Victor Lalouz sort ces jours-ci… un peu ému?
Diego Aranega : Et comment ! Il est génial, c’est tout à fait mon type d’humour et de graphisme, je crois que je vais en acheter un à chaque fois que je le croiserai en librairie !

Sceneario.com : Pourquoi Victor est-il prénommé ainsi? Est-il pour toi le prénom-type (du moment) du looser ? (Tu peux répondre sans crainte, je ne m’appelle pas Victor)
Diego Aranega : Quand je construis un univers déconne, je suis super sérieux, j’essaye de rien laisser au hasard, tout doit être cohérent et bien ficelé, à commencer par le choix du nom du héros : dans le cas de Victor Lalouz ce choix repose sur un contraste qu’on retrouve dans la psychologie du personnage : avec son background aussi chargé que le toit d’une 504 en partance pour le Maroc, je voulais que mon héros reste positif, quoi qu’il lui arrive il a la niaque, sa grande force c’est de ne pas avoir conscience des misères qui lui arrivent. Victor est un optimiste super ambitieux qui se fourre toujours dans des situations top loose, donc je l’ai appelé Victor pour la racine latine du nom : "victoire" et  Lalouz pour l’anglicisme "défaite". "Victor" (6 lettres) et "Lalouz" (6 lettres aussi) c’est le parfait équilibre entre sa perception de la réalité et la réalité.


Sceneario.com : Victor est-il Diego sous un autre prénom?
Diego Aranega : Tu sais que j’ai fait de la boxe en semi-pro ?

Sceneario.com : Pourquoi avoir eu envie de raconter les aventures malheureuses de Victor?
Diego Aranega : Parce que je suis un humoriste et que faire rire avec un héros qui serait un beau gosse sans faille, super intelligent, fin et subtil c’est plus dur.

Sceneario.com : Victor va-t-il conclure un jour?
Diego Aranega : L’ambition de Victor n’a pas de limite, sur un malentendu il est capable de se retrouver dans le lit de Miss Monde, ensuite te dire s’il y aura pénétration, là c’est une autre histoire !

Sceneario.com : Et quid d’une BD où ton héros serait une héroïne?
Diego Aranega : Hors de question : Hergé a réussi avec Tintin, Gotlib avec Gai luron, Franquin avec Gaston, Zep avec Titeuf, tu veux que je me plante ou quoi ?! (rires)

Sceneario.com : C’est combien, ton meilleur score à "Fire" ?
Diego Aranega : 999 ! à partir de là le compteur revient à 0, j’ai réussi cette prouesse 2 fois, la première en juillet 1982, la seconde en novembre 2006 !

Sceneario.com : Tu as des projets?
Diego Aranega : Oui, plein ! Un album de Victor Lalouz par an, ça c’est la base, Victor c’est mon chouchou. A côté de ça j’ai signé le scénario d’une nouvelle série pour la collection shampooing chez Delcourt, Jochen Gerner est au dessin, ça s’appelle 100.000 milliwatts, ça raconte l’histoire de 2 insectes ados qui rêvent de percer dans le rock néo-gothic. 4 tomes sont prévus, le premier volume -qui est en cours de mise en couleur par Denis Bernatets- sortira au printemps, déjà je peux annoncer que c’est mortel. J’ai une troisième série en cours de préparation pour Dargaud, là je suis au dessin, pis au scénario j’ai la chance d’avoir une vraie pointure de l’humour : Lefred Thouron en personne ! Oui oui oui le Lefred Thouron du Canard Enchaîné, bref tout ça pour dire qu’avec un gars comme ça sur mon tandem et le caviar qu’il m’a pondu je suis le plus heureux des dessinateurs ! J’ai un autre projet d’histoire plus longue, une sorte de suite à ce que j’ai commencé dans l’album collectif vive la politique sorti il y a peu chez Dargaud, je m’y attellerai quand je serai à jour des engagements déjà pris !

Sceneario.com : Penelope Cruz a-t-elle répondu à ton SMS?
Diego Aranega : Bien sûr, on nique ce soir justement ! t’aurais pas une vingtaine de capotes à m’avancer là ?

Sceneario.com : A bientôt et un grand merci d’avance
Diego Aranega : Salut Aubert !

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