Interview

HELL SCHOOL tome 1 , Benoit ERS, DUGOMIER, Angélique CESANO – Le Lombard

Sceneario.com : Benoit Ers, Vincent Dugomier, bienvenus sur Sceneario.com à l’occasion de la sortie de votre nouvelle BD intitulée « Hell School » et publiée aux éditions Le Lombard.
Première question de but en blanc, comment ça va depuis la fin d’Alexia (Série en 7 tomes publiée chez Dupuis) ? Avez-vous eu tous les deux du mal à faire le deuil de cet univers que vous animiez depuis plus de 7 ans et qui plaisait à de nombreux lecteurs ?

Benoît ERS: Un deuil reste un deuil, mais la vie ne laisse pas beaucoup de place pour celà. Il faut avancer.
Et puis, dès que l’on anime un nouveau personnage, on apprend à l’aimer, il prend vie, il naît au sens propre. Le deuil de Hell School sera également difficile à faire le jour où la série s’arrêtera.

Vincent DUGOMIER: C’est bien un travail de deuil qu’il faut faire. Je ne peux m’exprimer que pour moi, car ces parcours sont très personnels, mais l’empathie que j’ai pour les personnages de la série Alexia est très importante. Ça a été par moment difficile de ne plus pouvoir les animer, les faire vivre, … Et ceci n’est pas une formule d’artiste écorché vif. J’ai toujours ressenti cela à l’arrêt d’une série. S’ajoutait à Alexia la rage d’être passé juste à côté du succès, puisque les ventes n’étaient pas ridicules du tout.

Sceneario.com : En janvier débarque chez tous les bons libraires votre nouvelle production intitulée « Hell School ». Vincent, comment t’es venue l’idée de cette nouvelle histoire qui met en scène des ados issus de bonnes familles mais également des enfants un peu rebelles, qui découvrent l’institut d’excellence, une école privée très stricte où règnent la discipline et le travail ? Des inspirations filmographiques ou littéraires particulières ?

Benoît ERS: Je laisse Vincent répondre 😉

Vincent DUGOMIER: L’idée de départ, elle est de Benoît et moi. Elle sort tout droit de nos séances de brain storming que nous pratiquons de façon régulière. C’est avant tout un plaisir pour nous, et une puissance pour notre travail. L’élaboration d’un projet, la création d’un de nos univers se fait toujours ainsi et jamais sur base d’un travail perso que je propose ensuite à Benoît.
Pour nos influences, il y avait un reportage de l’émission Envoyé Spécial sur une école privée américaine gérée comme une caserne. Prof en uniforme qui hurle comme dans Full Métal Jacket, … Les parents approuvaient tout ça. L’horreur. Mais nous avons voulu être plus français, plus européens. Au niveau de l’éducation extrême couverte par des parents, nous avions été impressionnés par l’affaire très dure de l’Abbé Cottard, aumônier de scouts morts en mer.

Sceneario.com : Toi Benoît, comment as tu accueilli cette idée dans un premier temps ? Est-ce difficile quand tu as dessiné pour la première fois Hina de ne pas la faire ressembler à ton héroïne précédente ?

Benoît ERS: Les castings ont toujours été mon cauchemar !… Surtout que chaque dessinateur a ses propres canons, dont il est difficile de sortir, et sa propre façon de dessiner les filles.
Dans le cas présent, pas de problème, j’ai affaire à une maorie, rien que le teint de peau aurait suffi 😉

Sceneario.com : Dans ce premier tome, Bastien et Hina sont confrontés au « Rituel », un bizutage ancestral et coutumier dans les murs de l’Institut. Tous les codes du bizutage sont présents, on note une cohésion chez les autres élèves et ceux qui ne participent pas sont mis violemment à l’écart… Comment avez-vous fait pour décrire ces faits avec autant de justesse et de gravité ? Avez-vous été confrontés vous-même à ce genre d’épreuves dans votre jeunesse ?

Benoît ERS: Personnellement non, mais j’ai un ami qui a reprit des études de vétérinaire après plusieurs années d’enseignement dans le secondaire.
Vu la différence d’âge et du fait que certains bizuteurs étaient de ses anciens élèves, il a décidé de déroger à l’usage… Une belle documentation comportementale, croyez-moi !

Vincent DUGOMIER: Nous ne parlons pas là d’épreuves que nous avons eu à subir nous-même. Aucun de nous deux n’a jamais subi de bizutage. Mais même sans être officiel, il y a toujours du bizutage, des exclus, … dans les cours de récré. Il y a toujours un fort en gueule suivi de quelques brutes. Ce sont ces personnages, que chaque enfant a déjà rencontré, que nous avons décrits ici à une puissance supplémentaire, bien sûr. Nous avons aussi pensé à notre service militaire, où vous rencontrez des gars qui en un rien de temps se sentent investis par un esprit de corps alors qu’ils ne sont que sujets d’un hasard d’affectation. Chez certains, le besoin d’appartenance à un groupe peut-être très fort, quel que soit le groupe. Inutile de dire que c’est effrayant.

Sceneario.com : La série, si je ne me trompe pas devait s’appeler initialement « Prison School ». Pourquoi avoir choisi un autre titre ? La peur d’un rapprochement avec Prison Break peut-être ? (humour)

Benoît ERS: A quelque jours de clôturer la maquette, un manga de cul est sorti avec le même nom.
Il était donc impossible de le conserver. J’étais en pleines vacances, et je dois dire que ça les a plombées. Trouver un nouveau titre à une série dans l’urgence n’a pas été une mince affaire. Encore aujourd’hui, nous devons faire attention à utiliser le bon nom.

Vincent DUGOMIER: Non, non, simplement parce qu’en août, un manga est sorti avec pour titre Prison School. Nous avons dû changer en catastrophe. Ça nous a fait beaucoup râler et suer pour trouver autre chose, mais à présent, l’ancien titre est oublié.

Sceneario.com : Hell School, c’est aussi une ambiance très particulière au niveau des couleurs parfois très flashies, en opposition parfois avec le ton sombre de la trame de fond qui se dessine au fil de cet album. Pourquoi ce choix étonnant?

Benoît ERS: Je mène en parallèle une autre série: Tueurs de mamans chez Dupuis. Scarlett reste la coloriste de "Tueurs". Nous avons donc, en collaboration avec le Lombard décidé de prendre Angélique (avec laquelle j’avais déjà travaillé) pour bien séparer les univers de ces deux séries d’ados.
De plus, Hell school nécessitait une gamme plus "solaire". le but était de bien appuyer le côté paradisiaque de l’île en totale adéquation avec la réalité de ce qui s’y passe. Les couleurs de scarlett étant plus sombres et inquiétantes, j’ai préféré les garder pour Tueurs de mamans au ton plus dur.

Vincent DUGOMIER: Parce que nous sommes en Méditerranée. La lumière y est logiquement forte. Mais l’idée du contraste que vous ressentez est bien voulue. En effet, cette île est parfois paradisiaque, et les héros profitent d’une belle plage vers la fin du tome par exemple, mais elle est infernale à cause des événements qui s’y déroulent.

Sceneario.com : Cette nouvelle série sera un triptyque dont on connait déjà les deux autres titres. A quoi peut-on s’attendre dans le tome 2 à venir ?

Benoît ERS: Dugo? Au secours !!! ;-D

Vincent DUGOMIER: Thriller oblige, je me vois mal vous faire des confidences. Il suffit de voir dans quel guêpier sont tombés nos amis, et surtout Bastien, qui semble le plus visé. L’inconnue viendra aussi du rôle de Valérie, l’indécise. Des caractères et des rôles vont se révéler. Patience…

Sceneario.com : Cela fait plus de 20 ans que vous travaillez ensemble sur des projets divers. Quelle est la recette pour assurer la longévité d’une collaboration comme la vôtre ?

Benoît ERS: Quelle recette ? Je bosse avec mon meilleur ami, c’est tout.
Ceci dit, là où il y a quelques années, un album par an suffisait à faire vivre son auteur, il en faut aujourd’hui deux… Et même un peu de pub en plus! Du coup, nous avons moins de temps à passer ensemble à discuter d’autre chose que du travail. C’est un énorme regret.

Vincent DUGOMIER: Quelle question ! Dire qu’en matière de couple, je me suis juré de ne jamais donner de conseils. Ce qui est sûr, c’est que nous sommes avant tout de véritables amis. Nous avons beaucoup d’estime réciproque et j’admire beaucoup son talent et ses qualités humaines. Nous avons des centres d’intérêts en dehors de la BD et nous pouvons passer des heures à parler d’autre chose. Je dirais que notre relation de travail est naturelle. Tout bêtement, naturelle. C’est tout à fait logique qu’on bosse ensemble parce qu’on aime ça. Il y a un autre truc, c’est qu’en 20 ans, nous avons aussi partagé les joies et les peines de nos vies respectives. Ça crée bien entendu beaucoup de liens.

Sceneario.com : Quelle est la meilleure qualité et le pire défaut que vous trouvez chez votre partenaire lorsque vous travaillez ensemble ?

Benoît ERS: Mais rien, voyons, il est parfait ce gars là ! ;-D

Vincent DUGOMIER: C’est super dur ce que vous demandez. Vous me demandez de parler d’extrêmes alors que Benoît est un être subtil, complexe. Pour les qualités, en outre d’être talentueux, c’est un gars hyper honnête et droit. C’est très agréable dans une relation. Pour les défauts, perso, je le trouve un peu trop velu, mais comme je ne couche pas avec lui…(rires).

Sceneario.com : Benoît, tu as cité un peu plus haut "Tuteurs de maman", une autre série sur laquelle tu travailles avec Zidrou. Peux-tu nous en dire plus ?

Benoît ERS: Sortie en mars !!!
Point de vue graphisme, c’est proche, même si Hell school est réalisé sur ordi, et Tueurs de façon classique et en collaboration avec Ludo Borecki. Par contre, le ton est fondamentalement différent, même si l’on reste dans des histoires d’ado et d’école.
Hell school montre des héros coupés de leurs proches, en huis clos face à un ennemi institutionnel, à savoir leur école.
Dans Tueurs, tout est basé sur les relations mères-filles, avec un ennemi franchement déclaré et plus qu’identifiable. Un père fouetard 😀
Il s’agit d’un thriller pur et parfois très dur, avec un rythme narratif beaucoup plus rapide que Hell school.
Hell school est une lutte de fond doublée d’une enquète, Tueurs, une lutte pour la vie au sens propre.

Sceneario.com : Pour terminer, avez-vous d’autres projets dont vous aimeriez nous faire part, la résurrection prochaine d’Alexia peut-être (après tout, on resterait dans l’ésotérisme comme ça) ?

Benoît ERS: Je vais consulter Paolo Capaldi et je vous reviens 😉

Vincent DUGOMIER: Il n’est malheureusement pas question de ressusciter Alexia, mais nous avons déjà plusieurs projets en tête. Mais notre énergie passe d’abord par Hell School qui durera minimum 1 triptyque, avec la possibilité de donner une suite à cette première tranche par un second triptyque. Comme pour Alexia, nous avons des vues à long terme. L’avenir, le succès décideront. Sinon, de mon côté, je fais une infidélité à Benoît en retrouvant Bruno Bazile avec qui je n’ai plus bossé depuis 20 ans. Nous signons chez Glénat dans la collection Plein Gaz. Passionné de voitures anciennes, je vais enfin pouvoir assouvir une vieille envie de parler de tout ça.

Sceneario.com : Merci d’avance pour tout

Benoît ERS: Tout le plaisir fut pour moi.

Vincent DUGOMIER: Un grand merci de l’intérêt que vous portez à notre série.

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