Interview

Gibrat s’en va en guerre

Sceneario : Tout d’abord, pouvez-vous nous faire un (petit) résumé de votre long parcours ?

Jean-Pierre Gibrat : Je suis né en 1954. J’ai vécu en région parisienne jusqu’à l’âge de 23 ans dans le 92, qui était un coin assez modeste à l’époque contrairement à maintenant. Je vis maintenant dans l’Eure. J’ai débuté dans le métier par des dessins de presse puis j’ai arrêté, influencé par Mulatier. J’ai repris des études d’art plastique avant de me lancer dans la BD en 1977. Mais j’ai finalement dû continuer à faire aussi du dessin de presse jusqu’au Sursis car mes droits d’auteur ne me permettaient pas de vivre correctement. Le Sursis a tout changé. Ça m’a surpris car cela faisait vingt ans que je faisais de la BD. J’avais bonne presse mais les tirages étaient toujours modestes.

Sceneario : Le Sursis marque donc un vrai tournant dans votre carrière…

Gibrat : Oui, c’est indéniable. La première partie a été faite dans la naïveté. J’ai imaginé cet album comme tous les autres, sans en attendre rien de plus que d’habitude. Du coup, la deuxième partie a été très dure à faire car j’avais une forte pression. C’est aussi vrai pour l’album suivant. Il s’agissait de confirmer. Et les gens me disaient régulièrement « vous n’arrivez pas à faire mieux ». J’angoissais vraiment.
Heureusement, pour Matteo, j’ai retrouvé la sérénité que j’avais lors du premier tome du Sursis. On ne sait jamais pourquoi un bouquin marche bien. Je crois que si on pense à ça, tout est cuit. J’ai franchi ce cap et j’ai retrouvé les mêmes sensations qu’auparavant.

Sceneario : Après la Seconde Guerre Mondiale, vous nous emmenez cette fois dans la Première. Ces périodes troubles de notre Histoire moderne vous inspirent-elles particulièrement ?

Gibrat : Le début du XXe siècle marque de forts changements dans l’esprit des gens et je trouve cela très intéressant. Les rapports hommes/femmes se transforment. Il y a aussi cet espoir de connaître une vie différente. Cela passe par la guerre de 14. Mais Matteo n’est pas un livre historique. La guerre, c’est un tiers de l’histoire. Je m’appuie sur ces grands événements pour mettre en avant mes personnages, raconter la vie de ces gens qui croyaient qu’ils allaient vraiment changer la société et leur époque.

Sceneario : Comment allez vous développer la suite de la série ?

Gibrat : Le prochain tome nous emmènera en Russie, en 1917. Matteo partira en Crimée avant de revenir en France. En tout, la série est prévue en quatre tomes. Nous suivrons ainsi la destinée des principaux personnages croisés dans le premier album, à travers ces grands événements, dont la guerre d’Espagne de 36.

Sceneario : Matteo est votre premier livre chez Futuropolis. Quelle est la raison de ce changement d’éditeur ?

Gibrat : Pour moi, mon éditeur était avant tout Claude Gendrot avec qui j’ai toujours apprécié de travailler. Lorsqu’il a quitté Dupuis pour Futuropolis, je l’ai suivi.

Sceneario : Vous avez une actualité importante en 2008. Il y a quelques mois, c’était la publication des Gens Honnêtes, l’histoire d’un homme licencié pour cause de mondialisation. Cela prend encore un peu plus de sens avec la crise actuelle…


Gibrat : J’ai le sentiment que tout cela nous dépasse complètement. Si on compare avec les années 1930, on s’aperçoit que l’économie d’aujourd’hui échappe totalement aux chefs d’états. Le système est fait de telle façon que cela fait un peu peur.

Sceneario : Merci beaucoup de nous avoir accordé du temps. A très bientôt !

 

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