Interview

Gaëtan Petit et Julien Monier à l’occasion de la sortie du tome 2 de RIP

Sceneario.com : Bonjour Gaëtan et Julien, en premier lieu, serait-il possible que vous vous présentiez ?

Julien Monier : Je m’appelle Julien Monier, j’ai fait des études de sociologie, puis de la musique et je suis venu au dessin un peu sur le tard. En commençant d’abord à illustrer quelques livres jeunesse et de fil en aiguille, je suis venu à la bd. Avant RIP, j’avais fait une petite dizaine d’albums.

Gaëtan Petit : Je suis Gaëtan Petit, alias Gaet’s, je suis scénariste de BD et soigneur animalier à la réserve africaine de Sigean où je m’occupe de rhinocéros, girafes, lions, dromadaires etc…

J’ai commencé la BD, il y a une dizaine d’année avec des collectifs sur les groupes musicaux ( The Beatles, Bob Marley, Nirvana, The Doors… etc) et des contes pour enfant ( Arabes, Africains, Tibétains, Celtes…). En 2013, je réalise « Un léger bruit dans le moteur » avec Jonathan Munoz au dessin. Suite à cette entrée dans l’univers du polar, les premiers mots de RIP sont apparus et ce n’est que 5 ans plus tard suite à la rencontre avec Julien que le tome 1 est né.

Sceneario.com : Comment est née cette saga mortifère ? Pourquoi avoir choisi une thématique 100% glauque ? Répondait-elle à une aspiration des lecteurs ? Quelle sont vos sources d’inspiration pour mener à bien ce projet ?

Gaëtan Petit : Elle est née d’une rencontre avec une personne qui effectuait un labeur très similaire. Suite à de nombreux échanges, il m’a ainsi raconté en détails, les lieux, les ambiances, les personnes avec qui et où il travaillait jadis.

Une fois le décor dans mon imaginaire, j’ai créé ensuite un dénouement au sein de celui-ci.

La thématique n’est pas à 100% glauque comme l’ambiance austère et poisseuse qui y règne. Il y a aussi une part d’humour noir et de suspense qui permettent de ne pas sombrer dans une lourdeur glauque.

Le glauque est justifié. On ne souhaite pas faire du glauque pour dire on fait du glauque.

Mes inspirations sont multiples et proviennent de partout. A la fois dans le cinéma, la BD ou les romans polars que je lis. Mais je m’inspire aussi de personnes que je croise, de façon de parler que je peux entendre, de la bêtise humaine qui est, je vous assure, partout.

Sceneario.com : A priori, cette aventure anime des personnages sombres qui se croisent et se décroisent. Pourquoi la traiter via l’évocation d’un personnage par épisode ?

Gaëtan Petit : C’est le concept que je voulais créer. Tout comme les différents décors très variés, les attitudes et personnalités des personnages devaient être fortes et bien identifiées. Le lecteur va petit à petit s’attacher à eux malgré que ce soit de véritables ordures… C’est tout l’effet malsain qu’il y a. Cela me rappelle la série OZ où l’on côtoie que des salopards dans le pénitencier d’Oswald et pourtant on arrive tous à avoir notre petit préféré. Ou encore The Wire, où l’on ne sait jamais de quel côté, l’on souhaiterait être… flic ou voyou ? J’adore ça !

De plus, ce style narratif me permet de vraiment approfondir les passés, les pensées de chaque personnage et il m’offre un champ bien plus large que l’univers des nettoyeurs de la mort de cette équipe en tenues blanches.

Sceneario.com : Comment s’est opéré le choix de Julien pour le dessin ? Est-ce le fait qu’il ait fait des études entomologiques 😉 ?

Gaëtan Petit : Nous avons été présentés via l’éditeur. On a d’abord travaillé plusieurs mois à distance grâce à la magie du téléphone et d’internet. Puis on s’est retrouvé à Paris pour boire quelques bières ensemble. Et là, ça a matché ! Depuis, on avance vraiment à 4 mains. On échange sur nos idées, sur l’avancé de l’histoire, les rebondissements, les intrigues…

Julien n’a pas fait d’études entomologiques, hélas, c’est bien dommage, cela m’aurait allégé de mes lectures sur la faune forensique !

Sceneario.com : Entre toutes ces mouches, comment vous répartissez-vous le travail ?

Julien Monier : De manière assez classique, Gaëtan m’envoie le scénario par séquences (les scènes découpées accompagnées des dialogues) Et moi, je fais des dessins que je lui envoie en retour. Et si tout le monde est content, alors on passe à la suite. En règle générale, on a pas besoin de discuter des heures, comme on est assez raccords sur les références et la vision d’ensemble du projet, les choses se font facilement.

Sceneario.com : Il est annoncé que la saga comportera 6 tomes. Les scénarii sont-ils déjà dans la boîte ? A ce titre, prévois-tu une publication régulière ?

Gaëtan Petit : Alors en effet, nous sommes partis sur 6 tomes et ceux malgré qu’ils ne soient pas écrits. Toutefois la trame et les différentes lignes directrices de notre histoire sont tracées sur un grand tableau au-dessus de mon bureau. On sait où l’on va et là où on veut emmener nos lecteurs. On connait les personnalités de nos personnages principaux et les différents milieux où ils vont évoluer. Mais il y a encore beaucoup de boulot, car les fausses pistes sont importantes dans cette série.

Toutefois, nous garderons le rythme d’un tome par an, en septembre chaque année.

Sceneario.com : Compte tenu du caractère poisseux des deux premiers mystères soulevés, se pourrait-il qu’il en est un qui bénéficie d’un « petit » message d’espoir ? Ou, au contraire désires-tu aller encore plus loin dans l’horreur ?

Gaëtan Petit : Bien tenté, mais vous ne saurez rien pour le moment… Gardez espoir !

Sceneario.com : Comment avez-vous ressenti le retour des lecteurs vis-à-vis des épisodes de votre série ?

Julien Monier : Personnellement, j’ai été agréablement surpris par l’accueil que les lecteurs ont réservé aux deux premiers tomes. Je pensais qu’un univers aussi sombre et sordide pouvait un peu rebuter les gens mais non, ils semblent non seulement l’apprécier mais ont aussi su percevoir l’humour noir qui affleure sous la couche de glauque, pour peu qu’on gratte un peu.

Gaëtan Petit : Nous sommes plus que ravi. Nous avons reçu que des encouragements et des bons commentaires jusque-là. Le sujet n’est pas le plus accessible et pourtant petit à petit notre série fait sa place.

Récemment, j’ai demandé à un ami si le deuxième tome lui avait donné envie de relire le premier. Celui-ci m’a répondu : « Oui mais il m’a surtout donné envie de lire le troisième… »

Eh bien c’est ce qu’on voulait. Créer à la fois de la nostalgie des tomes précédents, l’envie de fouiner pour être sûr de ne pas être passé à côté de quelque chose et créer une sorte de frustration jusqu’au tome suivant…

Sceneario.com : Avez-vous d’autres projets en cours ou à prévoir prochainement ?

Julien Monier : J’ai récemment dessiné un album « À l’ancienne » avec Benoit Vieillard, qui est sorti en mai dernier. Mais dans les mois à venir, les tomes suivants de RIP vont occuper le plus clair de mon temps.

Gaëtan Petit : Je viens de terminer l’écriture du tome 4 de la série western Catamount. Benjamin Blasco Martinez m’a passé le relai pour la partie scenario, mais rassurez-vous, il sera toujours de la partie pour la partie dessin. Sinon plusieurs projets chez Petit à Petit notamment en docu BD sur l’histoire des villes telles que Toulouse et Narbonne.

Bien entendu, il y a encore 4 tomes de RIP à écrire aussi.

Sceneario.com : Julien, peux-tu nous en dire un peu plus sur ta façon de travailler (dessins, couleurs directes, informatiques…) ? Quelles ont été tes influences ?

Julien Monier : Je fais tout à l’ordinateur, à la palette graphique (« encrage » et couleurs) Je fais un brouillon très rapide sur papier, histoire de savoir comment organiser la page et je passe directement à l’encrage, sans crayonné détaillé. Ça me permet d’avoir un trait plus lâché, il me semble.

Pour ce qui est des influences, il y a tout un tas de dessinateurs que j’aime beaucoup (de Sergio Toppi à Sean Murphy en passant par Mignola…) mais je ne crois pas que ça se ressente beaucoup lorsqu’on regarde les planches de RIP. Ce style semi réaliste, avec des personnages un peu distordus c’est comme ça que je dessine spontanément, quand je n’essaie justement pas de ressembler aux styles d’autres dessinateurs. À vrai dire, je crois que ce style doit plus aux jeux Lucas arts (genre Day of the tentacle ou Sam & Max) auxquels je jouais enfant dans les années 90 et qui m’ont graphiquement pas mal marqué.

Sceneario.com : Quels sont les domaines (hormis l’horrifique) dans lesquels vous souhaiteriez vous lancer ou persévérer ?

Julien Monier : Personnellement, tous les styles m’intéressent, du moment que le scénario me plaît. J’aime beaucoup le polar, c’est le genre dans lequel je suis le plus à l’aise mais je ne m’interdis rien, pourquoi pas du fantastique ou même un space opéra… On verra bien.

Gaëtan Petit : Je m’adapte assez facilement et j’ai pu travailler sur des projets jeunesses, tout public, western, historiques… mais je crois bien que c’est dans le polar que je m’éclate le plus.

Sceneario.com : Sceneario vous remercie vivement pour vos réponses !

Julien Monier : Merci à vous.

Gaëtan Petit : Je dirais même plus. Merci à vous !

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