Interview

Bengal… dessinateur de Manga Européen

Sceneario.com : Comme à l’accoutumé des interviews, peux tu te présenter ?
Bengal :
J’ai 27 ans, je suis né dans la région des Alpes, j’habite sur Paris depuis de nombreuses années, et je suis arrivé à la BD le jour où j’ai rencontré Morvan en 1996. La mise en place a été plutôt longue, le temps que je m’améliore en dessin, j’ai eu une expérience dans le jeux vidéo, et enfin j’arrive dans la BD avec Meka.

Sceneario.com : Le jeu vidéo ?
Bengal :
J’ai travaillé dans le jeu vidéo suite à un besoin de terminer la production du jeu "Alone in the dark 4" fait par le studio darkworks, et j’ai continué durant 3 années dans une team de 3 dessinateurs qui s’entendaient plutôt très bien. Puis l’envie de faire de la BD a repris le dessus, et me voici.

Sceneario.com : Où as-tu rencontré Morvan ?
Bengal :
Lors d’une séance de dédicace à la Défence à Paris au moment de la sortie du premier tome de HK. On a beaucoup discuté avec Morvan et j’ai fini par lui demander si je pouvais venir le voir à Reims car j’étais curieux de savoir comment s’organisait le travail en atelier. J’en ai profité pour montrer mes dessins, et Jean-David m’a dit qu’en travaillant je pourrais arriver à faire quelque chose de bien, alors j’ai bossé.

Sceneario.com : De 96 à 2004… il y a 8 ans…

Bengal : Oui en effet…
Alors en fait le chemin est très chaotique. Pendant deux ans j’ai appris à dessiner, j’ai fait beaucoup de dessin, je me suis fait taper sur les doigts par l’ensemble des gens de l’Atelier 510…
Jusqu’au jour où j’ai été présenté à Jean-Claude Camano, ancien directeur de collection chez glénat, il a été d’accord de signer un projet qui lui semblait suffisant pour faire une BD. Mais j’ai mis assez longtemps à le faire, car je n’étais pas encore prêt, mon dessin n’était pas assuré, j’ai changé de direction plein de fois. Pour quand même gagner ma vie je me suis retrouvé designer, j’ai laissé de côté la BD, elle était terminée mais pas coloriée, en plus le coloriste qui avait travaillé dessus était parti avec l’argent. Super génial. Cette BD est donc depuis 3 ans dans un placard chez Glénat, et bonne nouvelle elle sortira un jour peut être. Du coup suite à cette très très très mauvaise expérience, j’ai été bien content de pouvoir m’éloigner de la BD.
J’en ai profité pour apprendre à colorier, à travailler en équipe, et c’est donc que depuis un an que je me suis mis à bosser à fond sur Méka.

Sceneario.com : Pourquoi Jean-David Morvan a t-il pensé à toi, ton dessin correspondait à ce qu’il recherchait ?
Bengal :
Je pense que oui. Au départ c’était beaucoup plus léger au niveau scénaristique, même si Méka prendra vraiment du poids dans le tome 2, c’était une BD que lui et Gérald Parel (7 secondes) avaient envie de faire surtout pour se faire plaisir, sans prétention d’en faire une grande BD. Ils avaient surtout envie de s’amuser, de se divertir. Et finalement Gérald avait beaucoup de boulot avec le tome 3 de « 7 secondes », il a fait quelques pages qui doivent traîner dans un coin, et il a laissé tomber. Dans ce même temps, je disais un peu partout que j’avais envie de revenir à la BD, et par mon métier de designer j’avais fait des centaines de robots. Jean-David m’a parlé de Méka et ça correspondait exactement à ce que j’avais envie de faire.

Sceneario.com: Dans Méka certaines pages sont vraiment très peu travaillées. (On feuillette la BD ensemble…) Comment pensez vous que ça sera perçu par les lecteurs ?
Bengal :
On ne sait pas trop en fait. On peut dire ça en effet. La réalité est que en effet j’ai fait l’album relativement vite, et que mes dessins peuvent paraître parfois rapides, ceci étant dû au fait que j’ai surtout très envie de raconter des histoires, et j’ai totalement conscience qu’il y a des centaines de choses que je ne dessinerai jamais bien. Mon dessin est un dessin automatique et honnête, ce n’est pas une économie de moyen. Mais je comprends le côté non académique de mon travail, et le certain minimalisme de certaines cases de la BD, et de ce fait je comprends les réactions qu’il peut y avoir.

Sceneario.com : En revanche c’est aussi vrai que la légèreté du dessin, le peu de texte, permet de donner un super rythme à la BD, et en lisant ce tome 1, on sent vraiment le stress et l’oppression des deux héros. Donc vos dessins et les textes sont aussi un avantage pour le scénario.
Bengal :
Jean-David et moi adorons les mangas. En ne parlant que de narration et pas de dessins, ce n’est pas réalisable dans un format européen de faire du manga. Du coup Méka c’est vu quelque peu hors des standards, ce qui comme tu le dis peut paraître très léger, mais il ne faut pas oublier que notre optique c’est une histoire de 90 pages, et donc qui ne sera complète vraiment qu’avec la fin. Ce n’est pas un mea culpa. On a envie que les gens aiment ce 1° tome, on a envie de le diluer extrêmement. Le deuxième tome sera condensé et très différent. On laisse les gens juger, et on les laissera juger aussi à la fin du deuxième tome.

Sceneario.com : A la base tu as quand même une inspiration très manga ?
Bengal :
Oui j’ai eu une énorme période manga vers l’adolescence avec les dessins animés… J’ai une grosse passion pour les mangas, mais aussi important que ma passion pour les BD européennes. A l’adolescence j’ai dessiné dans le but de devenir le meilleur dessinateur du monde (rires), et c’est donc l’influence la plus forte qui se retrouve dans mon dessin. Mais j’aime autant des auteurs de mangas que des auteurs de BD Européenne. Je me sens un peu perdu au milieu de ces mouvances.

Sceneario.com : Quel est le sentiment lorsque enfin sa BD sort…
Bengal :
Surtout quand tu en as une qui n’est pas sortie… c’est quand même pas mal… Ca fait vraiment plaisir, et d’autant plus lorsqu’elle sort comme tu l’as vraiment voulu. Pour moi l’ accueil des gens te concerne vraiment, si ils ont aimé c’est bien pour toi, ceux qui n’ont pas apprécié tu ne peux t’en prendre qu’à toi. Après tout le travail réalisé sur ta BD, lorsque tu as des retours ce qui est agréable c’est que c’est de ta propre responsabilité. L’impression a été de très bonne qualité, les couleurs sont fidèles, il faut dire qu’il y a eu d’énormes progrès dans ce domaine. Je suis donc très content car c’est vraiment mon boulot tel que je l’ai réalisé.

Sceneario.com : Au niveau colorisation c’est tout par ordinateur ?
Bengal :
oui tout. C’est réalisé avec Painter, que nous sommes très peu à utiliser, mais qui est un très bon outil, que j’utilise car je l’aime bien.

Sceneario.com : Si tu avais utilisé un autre programme genre photoshop, penses tu que le résultat serait différent ?
Bengal :
Oh oui. Photoshop a à mes yeux la même valeur que Painter, mais pour des raisons totalement différentes. Je ne peux me passer ni de l’un ni de l’autre. Photoshop a été utilisé pour l’après et post pro des pages, mais des outils de Painter correspondent plus à mes besoins. Il y a des souplesses dans ce programme qui me plaisent.

Sceneario.com : Au fur et à mesure que tu as travaillé sur cette BD, t’est -il arrivé de t’attacher de plus en plus aux personnages ?
Bengal :
Aux robots, oui de part mon passé dans ce milieu… Quant aux personnages, leur aventure est exceptionnelle, mais pour moi pas les personnages. C’est pour ça qu’ils sont un peu banaux… en revanche au fur et à mesure de l’avancé dans la BD, oui je les ai de plus en plus apprécié, au point même de me faire un petit plaisir en détachant les cheveux de l’héroïne au milieu de la BD.

Sceneario.com : Es -tu intervenu dans le scénario ?
Bengal :
Hum… ça a fonctionné dans les deux sens. J’ai proposé autre chose à Jean-David et lui a fait de même au niveau du découpage.

Sceneario.com : De qui vient cette excellente idée du personnage pilotant le robot en étant en quelque sorte en apesanteur, comme si il planait dans le cockpit ?
Bengal :
De moi. A partir du moment où ils étaient deux dans le cockpit, je ne voyais pas un cockpit avec deux sièges très serrés comme dans les avions de chasse. Et vu la taille du robot, je voulais les mettre dans la tête. Et pour lui je voulais donc arriver à représenter son environnement virtuel.

Sceneario.com : Lis-tu des BDs ?
Bengal :
Oh oui.

Sceneario.com : Et quoi dernièrement ?
Bengal :
Hou la… Ce que je lis à assez peu de rapport avec ce que je fais, c’est d’ailleurs assez drôle. Alors dernièrement j’ai lu, "KOMA tome 2" de Wazem et Peeters qui ont un vrai de killers, Extrème Orient de Frank Bourgeron, Le Réducteur de Vitesse de Blain, avec une grosse claque dans la gueule.

Sceneario.com : Première BD avec Morvan, c’est plutôt bien… et si tu devais choisir un scénariste pour qui tu aimerais dessiner ?
Bengal :
Je suis ravi de travailler avec Jean-David. En fait on sait quel type de BD on veut faire. Il y a des choses que j’aimerais faire seul… mais je n’ai jamais réfléchi à ta question. En tout cas mon emploi du temps ne me permet pas pour le moment de réfléchir à ça. Je vais essayer de faire un livre tout seul. On verra.

Sceneario.com : Quelle BD emmènerais-tu sur une île déserte ?
Bengal :
(Rires) Blacksad, car ça me fait plaisir d’avoir quelque chose de très bien dessiné… Le marché est tellement énorme je trouve que Blacksad est vraiment sorti du lot. Il brillait parmi toutes les BD dans les rayons de la FNAC. Je prendrais le tome 2 avec. Sinon je prendrais avec moi Banquise de Gauthier, quelques Mangas aussi.

Sceneario.com : Stop tu n’aurais plus de place pour ton maillot de bain.
Bengal :
(Rires)

Sceneario.com : Tu achètes à la FNAC ?
Bengal :
Euh, j’achète quand j’y passe oui.

Sceneario.com : Et internet ?
Bengal :
J’y passe beaucoup de temps. J’ai même vraiment voulu m’y impliquer à mon niveau. Quand j’ai vu cette émulation entre les Américains et les Européens, même avec les Japonnais j’ai vraiment voulu y participer. J’y ai rencontré plein de monde avec qui j’ai de nombreux échanges. J’ai appris plein de choses avec internet, beaucoup de choses sur la colorisation, grâce à de nombreux échanges avec des gens plus ou moins connus.

Sceneario.co m : As -tu déjà eu des écho concernant ta BD ?
Bengal :
Plus ou moins. J’ai surfé sur internet. Comme on s’y attendait les gens ont trouvé que la BD se lisait trop vite. Mais de manière générale soit les gens ont beaucoup aimé, soit pas du tout.

Sceneario.com : Merci beaucoup
Bengal :
C’est moi, ce fût un plaisir

 

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