Zátopek

 
Depuis sa plus tendre enfance, Emil Zátopek a montré des dispositions pour la course à pied. Il forçait d’ailleurs l’admiration de ceux qui le voyaient faire mais s’attirait en même temps les foudres de ses parents qui voulaient qu’il arrête, persuadés qu’il finirait un jour par attraper une maladie pulmonaire comme il en sévissait encore parfois de graves, à l’époque, en Tchécoslovaquie !

Quand il est entré comme chimiste en formation dans une usine Bata, Emil Zátopek n’a plus trouvé de temps à consacrer à la course. Plusieurs années durant, il ne s’est en effet consacré qu’à son travail et à ses études. Jusqu’au jour où on lui proposa de porter les couleurs de son usine dans une compétition et où sa bonne performance a ouvert les yeux de sa hiérarchie sur son potentiel sportif.

Dès lors, Zátopek a peu à peu pu délaisser son poste de travail pour consacrer du temps aux entraînements et aux compétitions. Ses efforts ont rapidement été récompensés : il s’est mis à collectionner les records nationaux et s’est logiquement qualifié pour les Jeux Olympiques de Londres en 1948 d’où il a même rapporté de l’or !

Profitant de sa renommée, il s’est même payé le luxe, dans un contexte politique "à la soviétique" où sortir du rang pouvait coûter cher, de défier les autorités de son pays pour qu’un autre coureur tchécoslovaque participe aux Jeux de Helsinki en 1952 alors qu’il avait été effacé des listes pour des raisons "politicardes"…
 

Par sylvestre, le 11 janvier 2018

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Notre avis sur Zátopek

 

Qui de plus indiqué pour parler d’un Tchécoslovaque que deux compatriotes ?! Les auteurs Jan Novák et Jaromir 99 sont tous les deux Tchèques. Avec cette bande dessinée, ils rendent hommage à un sportif sensationnel qui nous a quittés hier, en 2000 : le coureur de fond Emil Zátopek.

C’est avec un style graphique rappelant parfois celui de certaines affiches de propagande "à la soviétique" que nous est racontée la vie d’Emil Zátopek. Un style remarquable pour son encrage particulier, mais fort intéressant aussi pour sa mise en couleurs. Le noir, le rouge orangé, le bleu-vert, le blanc et le blanc cassé y sont en effet les cinq seules couleurs utilisées mais elles parviennent, selon leur proximité, leur cohabitation ou leur entremêlement, à faire croire qu’elles sont plus nombreuses selon les niveaux de contrastes qu’elles génèrent.

Le seul petit reproche qu’on pourra faire au dessin est qu’il rend éventuellement difficile la reconnaissance des personnages ; en tout cas lors de la première lecture. Des détails sont utilisés pour qu’il y ait le moins de doute possible comme un numéro de dossard ou un style de coiffure, par exemple, mais ce n’est pas toujours évident.

C’est depuis sa naissance et jusqu’à l’année 1952 (année qui l’a vu devenir un héros éternel suite à sa triple performance en or aux J.O. d’Helsinki) qu’Emil Zátopek nous est conté. Son personnage n’est pas forcément présenté de manière à ce qu’on l’aime à tout prix. Il nous est montré très "perso", pas toujours très diplomate ni très galant, ou très exigeant… Ces traits de caractère n’aident évidemment pas à le rendre sympathique mais c’est bien grâce à ces manières d’être et de progresser qu’il a réussi à se hisser jusque là où ses efforts l’ont mené : à des performances et à des records pour certains aujourd’hui encore inégalés !

Outre l’intérêt du traitement graphique et au-delà de l’attendu exposé de la carrière sportive de Zátopek, ce biopic est intéressant en cela qu’il aborde la vie de couple du champion. Il est intéressant également pour le rappel qu’il fait du contexte politique de l’époque ; quand la Tchécoslovaquie traversait le siècle sous l’occupation nazie ou dans l’ombre du grand frère soviétique, avec tout ce que ça signifiait en termes de répression. Dans cette bande dessinée, Jan Novák et Jaromir 99 ne minimisent pas l’importance à ces facettes noires des choses. La condamnation aux travaux forcés du seul entraîneur qu’a eu la "locomotive tchèque", la décision gouvernementale qui devait empêcher Stanislav Jungwirth de participer aux J.O. d’Helsinki en 1952 et le chantage qu’a eu le courage de faire le "Tchèque bondissant" aux autorités tchécoslovaques pour peser contre cette décision (ce qui fait de lui un héros politique en plus d’un champion sportif) ont toute leur place et leur importance dans la vie de l’enfant de Kopřivnice, ils l’ont aussi dans ce récit.

Zátopek est devenu une légende. En piste pour découvrir son parcours dans cette BD éponyme parue aux éditions Des ronds dans l’O !

 

Par Sylvestre, le 11 janvier 2018

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