Les voyages d'Anna

En 1885, Anna, jeune vénitienne, quitte sa ville et s’embarque avec Jules Toulet, célèbre peintre-voyageur. Pendant 25 ans, ils vont faire le tour du monde, souvent ensemble, parfois séparés.
Bien des années plus tard, elle lit les carnets que Jules lui a laissés et revit la passion du peintre à travers ses esquisses et ses aquarelles.

Par PATATRAK, le 1 janvier 2001

Notre avis sur Les voyages d’Anna

Petit cas à part dans ma bibliothèque, les voyages d’Anna ne sont pas une BD à proprement parlé, même si c’est dans ce rayon de votre librairie préférée que vous l’y trouverez.
Comme son nom l’indique, ce bel ouvrage nous emmène pour un tour du monde de rêve.

Pour la petite anecdote, j’avais trouvé amusant que ce peintre (imaginaire ?) porte le nom de famille de ma maman. Las, il n’a pas l’air d’avoir existé ! ;o) Dommage… (Autre anecdote au passage : mon cousin vient d’avoir un fils et il s’appelle… Jules! Un futur peintre?? ^_^)

Parlons du livre proprement dit maintenant.

Le regard est d’abord attiré par la très belle couverture, qui est une vraie invitation au voyage : cette jeune fille, toute menue qui regarde ce navire immense, perdu dans la brume, intrigue. Elle-même semble bien songeuse, des paysages exotiques plein la tête et les yeux, à n’en pas douter. En même temps, elle a l’air tellement nostalgique, comme si elle ne pouvait pas partir, que quelque chose la retenait.
Le contraste des couleurs évoque aussi l’évasion, le songe, je trouve : Anna , les pontons sont très colorés, alors qu’au loin, on voit cette ombre de navire sous la pleine lune, la barque (qui regagne le bord ou va accoster ?).

C’est donc presque naturellement qu’on tourne la première page, l’envie est insoutenable de découvrir le monde en compagnie d’Anna.

Ensuite, lorsqu’on feuillette l’album, c’est la qualité de l’ouvrage qui impressionne : un papier épais, au grain accrocheur, tactile sous le doigt. Une sensation vraiment très agréable qui donne l’impression (justifiée à mes yeux) d’avoir dans les mains un ouvrage extraordinaire.

La talent d’Emmanuel Lepage fait le reste : les paysages sont vraiment magnifiques et dépeignent des instants de vie remarquables, très communicatifs. Un peu comme dans certaines peintures de Dali (toutes proportions gardées, à commencer par un style totalement différent), on a l’impression d’être "dans le dessin", au milieu de ces personnages, de ces forêts ou de ces plages. L’atmosphère est très bien restituée par les couleurs, les personnages semblent tellement vivants…

Les textes de Sophie Michel achèvent de parfaire l’ensemble : Anna, c’est elle ! On a le sentiment qu’elle a vécu auprès de Jules, qu’elle a fait ce voyage. Son récit est en osmose parfaite avec les peintures d’Emmanuel Lepage. En plus de souligner l’art délicat de Lepage, ses textes ont leurs sensibilités propres : emprunts d’une profonde nostalgie, tant évoquée par la couverture, ils touchent profondément le lecteur.

En refermant ce beau livre, on a l’impression d’avoir été soi-même Anna, d’avoir manqué l’Amour de Jules et comme elle, on a un peu le sentiment d’être passé à côté de quelque chose ; On est aussi le personnage de Jules et on ressent presque la douleur du peintre à travers ses croquis d’Anna, cette douleur de n’avoir pu avouer son amour tout en le côtoyant chaque jour pendant 25 ans.

Personnellement, cette lecture m’a totalement bouleversé, j’ai rêvé comme rarement en lisant ce beau livre, mais l’amateur de dessins et peintures pourra regarder les planches avec un œil un peu plus technique, Emmanuel Lepage ayant pris soin de montrer un croquis de chacune de ses peintures. On prend ainsi conscience du travail, de la patience, du talent surtout de l’artiste : celui de nous faire partager une expérience intimiste exceptionnelle.

Je pense que pour toutes ces raisons, « Les voyages d’Anna » mérite amplement d’avoir sa place dans la Bédéthèque Idéale.

Par PATATRAK, le 19 juillet 2005

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