Une vie de moche

Guylaine, depuis qu’elle est petite, ne supporte pas son physique, elle se trouve moche, trop plate, pas assez féminine, peut-être même sans véritable personnalité, qui sait ! Toujours est-il que progressivement, elle ne peut s’empêcher de regarder autour d’elle, de repérer les "belles", de s’y comparer. Elle n’a pas de petit ami, peine à être simplement intéressante… Mais, au fur et à mesure, elle gagne en personnalité, elle s’essaye au punk, se coupe les cheveux, se cherche une vraie image, sans véritable succès, si ce n’est entre les bras de Gérald…

Par fredgri, le 11 novembre 2019

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Notre avis sur Une vie de moche

On aurait pu aussi appeler cet album "Chronique d’une vie de moche", tant le récit qui nous est proposé est une sorte de prétexte à la confidence. L’héroïne nous raconte sa vie, mais elle se concentre surtout sur le regard qu’elle porte sur elle même, sur cette intransigeance que peuvent avoir parfois ceux qui ne s’aiment pas, qui voudraient être autrement, plus comme ça et moins… Disons moins différente des autres, de ce modèle qu’on aime façonner, imposer, qu’on affiche un peu partout sur les murs, dans les cours de récré… Le culte de la beauté envahissant, tout ce qui pèse sur la jeune fille…
Guylaine n’est pas vraiment moche, en fait, elle voudrait juste être un peu plus entourée, plus modelée comme les autres, avoir plus d’aura…
Mais comme on dit: "il faut déjà commencer par s’aimer soi-même…"

Nous la suivons qui observe les autres autour d’elle, qui repère les belles qui sont au centre des discussions, elle évolue, trouve des petites astuces pour se trouver de nouvelles copines, peut-être même pour profiter un peu de leur aura… Elle se pose la même et lancinante question… Comment m’accepter ?

Le scénario de François Bégaudeau est particulièrement subtil, se penchant sur cette douleur intime du rejet de soi, il explore les remises en question de la jeune femme qui vieilli petit à petit, qui se résigne. Il rend son personnage attachant, voir même émouvant, d’autant qu’il s’agit là d’une fragilité que l’on connait tous à un moment donné… On a juste le sentiment que Guylaine, finalement, traîne son adolescence toute sa vie, peinant à sortir de cette problématique, au lieu de s’épanouir autrement !
Et ce regard que je porte sur cet album montre bien la sensibilité qui s’en dégage, qui nous touche, nous pousse à nous poser nous aussi des questions. Cette héroïne on la comprend, on a l’impression de la connaître depuis des années, peut-être est-ce même cette silhouette qui nous regardait dans la cour, enfant !
Et c’est exactement ce qui rend ce scénario captivant, cette proximité !

Mais il ne faut pas oublier le trait de la jeune artiste, Cécile Guillard, qui rend une copie absolument fascinante. Elle transcende littéralement le récit de ses planches, son trait qui s’efface, qui suggère, qui montre sans s’attarder, nous tombons sous le charme d’une courbe, d’une silhouette en patt’ d’ef", Guylaine n’est peut-être pas un canon, mais sous le trait de Cécile elle gagne une sensualité troublante !
Encore merci pour ces magnifiques pages !

Sortie un peu discrètement, au milieu de la multitude d’albums de la rentrée, ce volume mérite amplement d’être redécouvert et choyé !

Très recommandé !

Par FredGri, le 11 novembre 2019

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