Tropique de l'agneau

Parce que Julien a décidé de convoler en juste noce avec Sophie, Armand, son demi-frère s’est arrangé pour organiser en catimini l’enterrement de la vie de garçon du promis. Jetant son dévolu sur la publicité furtive de l’hôtel Paradise, il invite sa bande de copains à faire le grand saut de l’autre côté de la terre, sur une île du Pacifique. Parvenu à destination, le groupe prend immédiatement ses marques pour une fiesta de tous les diables. Mais la fièvre de première heure dû à l’exotisme ambiant fait place peu à peu à l’inquiétude de par la disparition de certains membres et se transforme définitivement en épuration sanglante. La chasse est ouverte, impitoyable, et le loup se prépare à croquer l’agneau. A moins que ce dernier, dans un ultime effort, se rebiffe !

Par phibes, le 20 février 2010

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Notre avis sur Tropique de l’agneau

Les deux inséparables compères, MK Deville et Philippe Nicloux reviennent à la charge en ce mois de janvier avec une nouvelle histoire qui sent bon la libération scénaristique. En effet, après s’être testés précédemment sur des adaptations littéraires japonaises (Otomi, Rashomon), ils passent à la vitesse supérieure et se lancent dans un récit sang pour sang retentissant qui ne plaint certainement pas notre sensibilité et, qui plus est, inaugure la toute nouvelle collection Dahlia.

A partir d’un projet banal d’enterrement de vie de garçon qui pourtant présage la bonne humeur, MK Deville, au scénario, nous entraîne résolument sur une toute autre voie, celle de la peur et du sang. A cet égard, pour mettre en condition le lecteur, les premières planches auront tendance à aiguiser notre appétit de sensations fortes. Jouant subtilement sur le terme d’enterrement de vie de garçon, un peu à l’image de l’ouvrage d’Hervé Bourhis dans Un enterrement de vie de jeune fille, il évoque le parcours infernal de cette bande de copains pris dans l’engrenage d’une manipulation horrifique.

L’histoire est alléchante, crissante, peut-être pas forcément d’une grande originalité mais réserve au lecteur de nombreux temps forts et un bon suspens. L’atmosphère générale dans laquelle plane quelques allusions cinématographiques, pèse au fur et à mesure que les péripéties se dévoilent. Les tropiques, pourtant évocateurs de rêves, se transforment alors en cauchemars les plus glaciaux et réservent des surprises les plus cruelles.

Le jeu des personnages est assurément le fer de lance du récit. Chaque protagoniste développe un trait particulier, une personnalité révélatrice de la société moderne et qui, pour certains, semble être double. Bien sûr, Julien tient le haut du pavé puisque de traqué, il va devenir traqueur, d’agneau, il va se transformer en loup. Mais, d’autres intervenants auront un rôle à jouer, ambigu, surprenant voire terrifiant (Marcel, Sentenza, Sheenza).

Le trait de Philippe Nicloux convient parfaitement aux péripéties. Il peut se révéler dans une pléthore de détails réalistes extraordinaires telle la luxuriance inextricable de la jungle comme dans des effets libérés de toute redondance quand il s’agit de mettre en évidence les personnages. On ressent beaucoup d’énergie dans sa façon d’animer ses dessins en noir et blanc et on se plait à apprécier, quand c’est le cas, le jeu adroit des ombres.

Un volume angoissant remarquablement réalisé qui pourrait faire réfléchir les candidats aux voyages sous les tropiques.

 

Par Phibes, le 20 février 2010

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