TRILOGIE DES VENTRES CREUX
Les mèches courtes

Dans la dure vie d’un bidonville d’Amérique du Sud, certains tentent d’exister vraiment, ou tout au moins de survivre. Il faut pourtant faire avec Monteiro, le mafieux local qui règne sur ces misérables ruelles. Paulo, un gamin qui a grandi là-dedans, doit maintenant se débrouiller seul depuis que son père, incapable de subvenir plus longtemps à ses besoins, a dû le mettre à la porte. Le gosse part avec trois de ses amis pour rejoindre une bande misérable qui vit dans une grotte sous le périphérique.

De son côté, Francisco vient d’être libéré de prison. Il retourne voir son père, gravement malade. Il lui confie son désir de relancer la lutte des classes. Pour lui, la révolution rouge est la seule manière de sortir tous ces gens de la misère. Il crée le “Commando Rouge” qui va rapidement prendre de l’ampleur et inquiéter autant les autorités que la mafia locale.

Par legoffe, le 24 mai 2010

Notre avis sur TRILOGIE DES VENTRES CREUX #1 – Les mèches courtes

Ce livre ouvre la “Trilogie des ventres creux”. Les auteurs nous entraîneront, en trois albums, sur trois continents : l’Amérique Latine, sujet des Mèches Courtes, l’Afrique et l’Europe.

Les pays qui serviront de cadre aux trois histoires (indépendantes) sont des lieux imaginaires. Pour autant, croyez moi, le récit est, lui, totalement réaliste. Terriblement réaliste devrais-je dire. Pour ce premier essai, nous plongeons dans les bas quartiers d’un pays qui fait beaucoup penser au Brésil et, plus particulièrement, à Rio et ses environs. C’est une véritable chronique sociale que nous offrent Tillon et Remise. Ils nous entraînent dans le quotidien de quatre enfants des bidonvilles, mais aussi sur les pas d’un révolutionnaire idéaliste, qui n’en peut plus de cette vie misérable à laquelle les condamne le système. Enfin, justement, les auteurs mettent aussi en scène ce système à travers sa police impitoyable et sa mafia, très complice des forces de l’ordre. Ils sont, en fait, les garants d’un ordre établi qui fonctionne, pour eux, très bien et qu’il n’est pas question de voir perturber.

Dès les premières pages, nous sommes confrontés aux immondices et à la mort. Ce qui nous choque, plus que le premier cadavre du récit, c’est la banalité avec laquelle il est regardé par les enfants et les gens du quartier. Il fait partie du décor. Nul ne pense même à le retirer de la décharge dans laquelle il gît. Le ton est donné.
Par la suite, nous découvrons la corruption et les liens qui régissent le trafic de drogue et la police, mais aussi leur volonté, non pas d’améliorer les choses, mais surtout de détruire ces pauvres qu’ils regardent tel des animaux. La scène où un commando policier, transformé en milice sans uniforme, part “chasser” littéralement les enfants cachés dans la grotte est un moment d’horreur, d’effroi. Si les auteurs s’appuie sur la réalité, je puis vous assurer que cela fait encore plus froid dans le dos.

Quant à la lutte de Francisco, le lecteur ne lui donne guère de chance d’aboutir. Le réalisme de ces terribles conditions de vie semble déjà avoir eu raison de nos dernières bribes d’optimisme. Nous sommes comme accablés par la situation, mais les personnages du livre parviennent à nous tirer de notre torpeur et nous pousser au cri de colère et de révolte, nécessaire devant tant d’injustice.

Pour mettre en image ce récit poignant, Tillon a fait appel à Gaël Remise. Son trait simple, mais très vivant, capte avec réussite l’émotion, les beautés ou les horreurs du genre humain. Il parvient à nous emmener très vite aux côtés de ces personnages et nous faire vivre ces ambiances chaudes au service de destins condamnés froidement par des dirigeants sans scrupules.

Voilà donc un récit incroyablement humain, qui démontre le désir des hommes de vivre dignement, même lorsque tout semble désespérer. Un beau livre, dur mais passionnant, qui réveille la flamme de la révolte en chacun de nous.

Par Legoffe, le 24 mai 2010

Publicité