The Maximortal

(The Maximortal 1 à 7)
Plusieurs évènements importants, qui vont à un moment se croiser…
D’une part, une mystérieuse météorite s’écrase en Sibérie en 1908, un voyageur qui passe par là découvre un être énigmatique et hermaphrodite qui, grâce à ce voyageur, conçoit un œuf qu’il enveloppe dans une gangue épaisse avant de la précipiter dans l’espace… Il vient s’écraser sur Terre, dix ans plus tard, et plus précisément en Californie, sous les yeux d’un couple de fermiers qui recherchent de l’or ! Ils découvrent, à l’intérieur de l’objet un petit homme qui a la taille d’un enfant. La femme s’entiche de lui, évidemment, mais ils se rendent vite compte que d’une part, "l’enfant" a d’étranges pouvoirs, mais surtout qu’il n’a aucun sens moral, pulvérisant leur maison de ses rayons optiques et battant sans se retenir l’homme qu’il ne considère guère plus qu’un vulgaire objet…
Quelques années plus tard, deux jeunes artistes viennent présenter leur nouveau personnage, Tin Man, à Sid Wallace, un éditeur qui publie des comics. Ce dernier, devinant le gros potentiel de ce personnage réussit à faire signer un contrat de cession de droit aux deux auteurs, n’hésitant pas ensuite à exploiter sans vergogne leur travail, tout en les payant au lance pierre…
En parallèle, le docteur Uppenheimer dirige les recherches sur une hypothétique bombe atomique, quand soudain il découvre, enfermé dans un coffre, le mystérieux "enfant" que l’on avait croiser au début. Afin d’utiliser sa puissance pour accélérer ses recherches, il décide d’analyser cet étrange personnage ultra puissant !

Par fredgri, le 24 août 2020

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Notre avis sur The Maximortal

Avec la sortie de sa mini-série Brat Pack, publiée en 1991, Rick Veitch lance l’idée d’un projet bien plus global, appelé "The King Hell Heroica" dans lequel s’articulera un ensemble de mini-séries qui en constitueront les volumes successifs, Brat Pack n’en étant que le quatrième et les 7 épisodes de Maximortal devenant ainsi le premier, le début de tout ! Un projet qui ambitionne de présenter une vision très personnelle sur le phénomène "Super-héros" et son impact sur la culture du XXème et XXIème siècle. 5 volumes sont initialement prévus !

Bien évidemment, on le devine très vite, cet ambitieux projet est avant tout, pour Rick Veitch, l’occasion de parler de cette industrie et plus particulièrement de DC qui lui a précédemment refusé un script pour Swamp Thing qu’ils jugeaient trop polémiste ! Déjà très virulent dans Brat Pack, Veitch en remet une couche et pousse encore plus loin la critique de l’éditeur et ses pratiques vis à vis des artistes comme Siegel & Shuster (Créateurs de Superman) en décortiquant les rapports de force en vigueur dans cette industrie du comics qui avait l’habitude d’exploiter sans remord les auteurs qui n’étaient alors considérés guère plus que comme de simples ouvriers, tout juste bons à livrer leurs planches afin de remplir les illustrés qui se vendaient par milliers d’exemplaires, alimentant ensuite toute une série de produits dérivés, véritable manne marcketing qui enrichissait l’éditeur au détriment de ceux qui en étaient réellement à l’origine… Et le cas du duo Siegel & Shuster en est le parfait exemple. Après s’être fait flouer sur les droits de Superman, ils vont subir le mépris de leur éditeur qui va tout bonnement les broyer en leur volant leur personnage, sans ménagement ni respect pour eux !

Cependant, loin d’être une simple histoire règlement de compte, The Maximortal est bien plus complexe que Brat Pack, ne serait-ce que par le regard que l’artiste porte sur la figure du super-héros et plus particulièrement ce qu’il nomme les personnages "amiraux" tels que Superman, Captain Marvel, Miracleman… Pour lui, il s’agit de présenter "… une méditation fantasque et imaginaire, non seulement autour de la valeur nominale de ces personnages, mais aussi de leur sous-texte, la même soif de puissance archétypale et évolutionniste qui sommeille en nous et qui prit, pour la première fois, forme dans "le mythe du surhomme" nietzschéen pour aboutir aux conséquences catastrophiques qu’on connait…" !
Rick Veitch nous raconte donc plusieurs récits en parallèle. Qu’il s’agisse de mettre en scène cette idée du surhomme, personnalisée sous la forme de ce jeune Maximortal qui va évoluer d’une part dans ce qui se présente comme la réalité du récit, capturé par l’armée et transformé en simple matière première d’une pseudo bombe atomique pour aller détruire Hiroshima, l’archétype de la puissance hégémonique américaine, d’autre part comme un personnage de comics à succès qui inspire, voire même obsède l’acteur qui le personnifie dans les films, dépassant ainsi son simple stade fictionnel, devenant une idée qui prend vie, qui se glisse dans le réel pour le pervertir. Sans oublier les travaux du professeur Uppenheimer qui découvre le jeune Maximortal, fasciné par ses pouvoirs qu’il devine extraordinaires et pleins de potentiel !!!

Maximortal n’est donc plus réellement un personnage en soi, mais bien plus un concept qui sert de miroir déformant aux ambitions de ceux qui vont l’exploiter, l’incarner, véhiculant au passage une morale rassurante et apaisante, une symbolique asceptisée qui va enthousiasmer les foules !

Veitch nous emporte donc dans une virulente démonstration qui condamne, sans appel, l’impact du phénomène et la perversité de cette industrie qui broie sans état d’âme tout ceux qui la font fonctionner.
Toutefois, certains passages restent assez difficiles d’accès, principalement parce qu’ils traitent frontalement de l’idée elle même, il faut alors faire preuve d’attention pour prendre du recul sur le récit, afin de mieux appréhender certaines explications. Veitch reste aussi parfois elliptique et opaque, surtout dans les dernières séquences qui annoncent la suite.
Malgré tout, l’ensemble est réellement fascinant. Dans une période post-Watchmen ou la figure du surhomme se voit soudain remise en question, Veitch se présente un peu comme le trouble-fête qui ne veut pas y aller avec des pincettes et qui pour cela, n’hésite pas à mettre des grands coups de pompes dans la machine !
A l’époque des Maximortal et de Brat Pack, il s’est tourné vers les indé en commençant à collaborer avec Tundra, puis en créant rapidement sa propre structure éditoriale, King Hell Press, qui va lui permettre de republier ses œuvres en noir et blanc, libre de toute contingence extérieure ! Ce qui explique la liberté de ton et l’aspect quelque peu "radicale" de ces projets !

Cependant, mis à part deux Heroica Super spéciaux: Brat Pack Maximortal 1 et 2, parus en 96 et 97, Rick Veitch va mettre de côté "The King Hell Heroica" pour n’y revenir qu’en 2017 avec le premier volume (sur 4) de "Boy Maximortal" qui raconte la jeunesse du héros et qui constitue donc le volume 2 de KHH. L’artiste semble décidé à compléter son projet, le Boy Maximortal 2 étant sorti cette année, on croise les doigts pour voir arriver la suite.
D’autant que Veitch a depuis décidé d’opter pour une édition à la commande, via la plateforme Amazon, ce qui lui permet d’agrémenter, pour un cout identique, chaque volume d’une multitude de bonus savoureux !

The Maximortal est donc une sortie évènement à ne pas laisser passer. Un volume coup de poing qui ne laisse absolument pas indifférent et je vous conseille vivement d’y plonger sans hésiter, ne serait-ce que pour y retrouver l’une des personnalités les plus atypiques de la bande dessinée moderne !
Un must have exceptionnel !

Par FredGri, le 24 août 2020

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