Tempête sur Bangui

 
C’est en 2003 que le général putschiste François Bozizé a défait David Dacko pour devenir à son tour le chef d’état de la République Centrafricaine. Le pays n’a alors pas connu mieux qu’une paix fragile que de vives tensions ont sans cesse menacée.

Bozizé a été réélu en 2012, mais les groupes d’opposition l’ont soupçonné de vouloir modifier la constitution nationale pour s’octroyer de plus grands et plus durables pouvoirs. Ils se sont alors alliés et, pour le détrôner, ont donné naissance à la Séléka, une armée qui allait fondre sur Bangui et la mettre à feu et à sang.

Ce fut la guerre. Une guerre mettant face à face la Séléka et des milices créées par des partisans du régime ; une guerre rendant surtout la vie impossible à une population impuissante et de plus en plus effrayée devant l’horreur des exactions commises par les différents belligérants.
 

Par sylvestre, le 2 novembre 2015

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Notre avis sur Tempête sur Bangui

 
Il y a des pays comme la République Centrafricaine dont on n’entend malheureusement parler que lorsqu’il s’y passe des choses vraiment très graves. Ce fut notamment le cas lorsque les soldats de la Séléka sont entrés dans Bangui en 2013 et ont horrifié la planète entière avec leur sale guerre ; c’est le sujet de cette bande dessinée. Qui dit guerre dit victimes, et même si le pouvoir était l’enjeu in fine, y accéder justifiait semble-t-il aux yeux des bourreaux de la Séléka les attaques qu’ils menaient contre la population au sein de laquelle un soldat pouvait toujours – pardi – trouver partisan du régime ennemi à humilier, à voler, à tuer…

Pendant cette guerre entre la Séléka et les milices banguissoises, la population fut en effet aux premières loges. Vols et crimes en tout genre furent légion et les gens (des civils, des femmes, des enfants…) en furent les toutes premières victimes ; de quoi traumatiser des générations entières ! De quoi aussi révolter ceux qui choisissaient de s’interposer ou de résister plus discrètement, comme l’a fait Didier Kassaï avec ses armes à lui : du papier, ses crayons et ses couleurs.

Dans Tempête sur Bangui, Didier Kassaï (enfant du pays né à Sibut) raconte cette déferlante de violence qui a fondu sur Bangui. Il y était ! Il a donc vu, vécu, et il se souvient, nous rapportant aujourd’hui des faits réels. C’est malheureux que ce soit dans ces conditions qu’il ait eu à nous dresser le portrait de Bangui qui d’ordinaire se fait appeler "la coquette". Car avec son dessin et ses couleurs, très vivants, l’auteur nous montre aussi la capitale centrafricaine dans tout ce qu’elle a de plus authentique. Et ainsi on remarque, dans les vignettes très fournies, plein de détails qu’apprécieront encore plus ceux qui ont voyagé en Afrique Noire : les enseignes des petits commerces, les inscriptions sur les murs, les panneaux publicitaires, les boubous, les attitudes, ou tous ces objets et autres détritus qui jonchent le sol… Tout ça est très vrai ! Et ce qui nous fait donc frissonner encore plus, c’est de se rendre compte que la guerre qu’il nous raconte, dans ces décors, fut elle aussi tout aussi vraie… !

Cette BD est exceptionnelle. Oui : par la vision qu’elle apporte du conflit vécu de l’intérieur. Par son intérêt historico-politique, donc. Et par son traitement graphique qui est de grande qualité et qui donne toutes ses couleurs à l’Afrique.*

Bravo ! A découvrir absolument !

* Comme le fait aussi, également aux éditions La Boîte à Bulles, la bande dessinée relative à Madagascar (nettement moins dramatique !) : Sous le tamarinier de Betioky.
 

Par Sylvestre, le 2 novembre 2015

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