Spirou par Y. Chaland

Novembre 1981, en pleine guerre de succession pour le personnage de Spirou, après le départ de Fournier, Dupuis décide de multiplier les projets autour de son personnage fétiche. Les éditeurs s’affrontent alors. C’est dans cette ambiance que le rédac chef de Spirou, Alain de Kuyssche décide de téléphoner à Yves Chaland, le jeune prodige qui fait les beaux jours de Métal Hurlant… C’est pour l’artiste l’occasion de réaliser un vieux rêve… Mais le reste de l’histoire risque d’être moins enthousiasmant. Le jeune dessinateur commence donc "Cœur d’acier" qui va être annulé au bout d’une quarantaine de strip…
Mais que raconte cette histoire ? Spirou et Fantasio sont envoyés, par un riche excentrique, en Urugondolo, au cœur de l’Afrique, afin d’y retrouver son fidèle serviteur Bocongo, qui a disparu. Les deux héros se lancent donc dans l’aventure, sur les traces de l’énigmatique International Corporation…

Par fredgri, le 10 octobre 2013

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Notre avis sur Spirou par Y. Chaland

Quand les éditeurs chez Dupuis doivent chercher une relève pour remplacer Fournier sur Spirou en 1980, très vite il se forme des camps aux idées très opposées. D’un côté on veut imposer le duo Nic et Cauvin, de l’autre on leur préfère les deux petits jeunes Tome et Janry. Néanmoins la période est aux petites expérimentations et c’est dans cette ambiance digne des tranchées que Chaland se retrouve à devoir animer deux strips par semaine !
Pour peu qu’on connaisse le style de l’artiste, ses références à Jijé, à Franquin, cette ligne claire à la fois rétro et incroyablement moderne, ce choix tombe sous l’évidence ! Mais voilà, cette personnalité graphique très forte bouleverse mine de rien la situation. Non seulement Chaland ne cherche pas à moderniser le personnage, ni même à s’inscrire en simple suiveur, non, il entreprend carrément de revenir aux bases, là ou les avait laissées le grand Jijé, tout en y mêlant un sens très aigu du rythme et de l’humour, avec un brin de cynisme propre à Chaland. Ainsi on a droit au vieux militaire colonialiste, aux africains qui parlent "petit nègre", le tout comme cadre d’une histoire non terminée qui fleure bon les vieux albums plein d’aventure, de mystères, légèrement digressifs sur les bords, qui démarrent sur les chapeaux de roue, tout de suite ! Un vrai régal de réappropriation, un voyage dans le temps !

Dupuis nous propose donc, trente ans plus tard de revenir sur "l’amour vache" qui lia les éditions Dupuis et Yves Chaland. On y trouve les fausses couv qu’il dessina, les petits strips, les histoires, le tout accompagné par un texte de José-Louis Bocquet qui revient sur la carrière de Chaland, sur sa rencontre avec Metal Hurlant, sur ses influences, sur ses albums, sur son impact dans le monde de la BD et sur cette rencontre improbable avec Dupuis. Il y a des commentaires sur cette histoire de relève, des bouts d’interview etc. C’est passionnant d’un bout à l’autre, car en effet ce volume ne se borne pas qu’au passage de l’artiste sur les aventures de Spirou, il englobe l’ensemble, quand les chemins se croisèrent avec Dupuis !
Comme d’habitude avec ces ouvrages plus documentaires que propose Dupuis, c’est très instructif et cela ouvre des pistes de réflexions très intéressantes sur l’œuvre du dessinateur, sur le parcours de Spirou et sur cette troublante époque ! On regrette que ces quelques projets aient été annulés (quand on sait qu’il avait entamé avec Yann un album qui allait devenir ensuite, bien plus tard "Le groom vert-de-gris"… On reste songeur. Pour peu que que les éditeurs aient seulement voulu davantage soutenir Chaland on aurait eu droit à des albums prestigieux !

Un volume indispensable pour tout amateur de l’auteur et du personnage !

Par FredGri, le 10 octobre 2013

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