SPIROU ET FANTASIO - L'INTEGRALE
1992 - 1999

(Regroupe les albums "Le Rayon Noir", "Luna Fatale" et "Machine qui rêve", ainsi qu’un dossier, des illustrations et l’ébauche d’un album jamais terminé !)
Cette Intégrale termine donc la période Tome et Janry sur la série, une période qui se termine en apothéose avec ces trois albums hors du commun !

Par fredgri, le 18 mai 2015

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Notre avis sur SPIROU ET FANTASIO – L’INTEGRALE #16 – 1992 – 1999

On se souvient de cette période, de ces 17 ans passés à redonner du relief à ces personnages, mais on se souvient surtout de ces derniers albums ou les auteurs poussèrent davantage cet univers, explorant des choses jusque là jamais réellement tentées.
"Le Rayon Noir" s’interroge sur le racisme, et plus particulièrement à Champignac, petit village traditionnellement synonyme de bonne humeur, le cadre de nombreuses aventures, se voit ici éclairé sous un autre angle moins gentillet, moins lisse ! "Luna Fatale" pose un regard sur le rapport de Spirou avec les femmes. Ça n’est pas forcément le fond de l’intrigue, mais on sent que les auteurs veulent creuser un peu plus cet aspect du héros… Puis le magistral "Machine qui rêve" qui prend Spirou à rebrousse poil, qui décide de refondre l’univers avec une approche plus réaliste, plus sombre. La démarche va rompre avec le style jusque là appliqué à la série. Mais le projet fut certainement trop ambitieux, car il signa la disparition de la série pendant quelques années. Il faudra ensuite attendre jusqu’en 2004 que Morvan et Munuera prennent la relève, mais nous en reparlerons dans le prochain Intégrale.

Ce seizième volume marque donc un vrai tournant dans la série.
Tome et Janry, qui ont amené Spirou vers des sommets rarement atteints jusque là, financiers surtout, décident de sortir cette série de son espace de confort ou elle se cantonnait depuis longtemps, pour aborder des thèmes plus sensibles. C’est très audacieux, car il peut aussi y avoir un effet inverse. Mais le succès est au rendez-vous et le traitement va crescendo vers quelque chose de plus personnel.
Le passionnant dossier que nous ont concocté Christelle et Bertrand Pissavy-Yvernault met donc l’accent sur le contexte, sur la confiance des éditeurs et sur le succès en parallèle du Petit Spirou qui va amener les deux auteurs à passer la main. Comme à leur habitude c’est extrêmement précis, c’est bourré d’informations avec des illustrations dans tout les coins, on est gâté et on dévore ces presque 50 pages d’intro avec régal.
Et c’est important de bien lire ce texte avant d’aborder les albums en eux même, car cette contextualisation, les divers témoignages permettent de bien comprendre à la fois l’ambiance éditoriale qui entourait Tome et Janry, cette confiance qui leur a permis d’expérimenter sans soucis, de tenter des choses qu’il aurait été impensable de faire quelques dix ans auparavant, mais aussi de bien saisir la dimension innovante de ces derniers albums, ce côté iconoclaste qui sera définitivement la marque de fabrique de ces deux auteurs qui firent glisser Spirou vers la modernité !

Certain diront qu’en fin de compte cela ne collait plus vraiment avec ce qui avait été fait auparavant, que pour Spirou il fallait un traitement plus léger (c’est la principale critique sur "Machine qui rêve" d’ailleurs !), cependant il faut bien comprendre que la série devait être dépoussiérée, et qu’en se la réappropriant, en jouant avec les contraintes imposées par les éditeurs, avec les codes de la série elle même Tome et Janry lui ont surtout permis de se réactualiser, d’être plus proche des jeunes lecteurs qui n’étaient plus les mêmes qu’il y a 20 ans. Et si les chiffres de vente ont explosé c’est bien parce que le projet a fonctionné, démontrant ainsi qu’avec une écriture intelligente, avec des dessins frais et une vraie identité qui s’était enfin abstraite de l’héritage Franquin la démarche correspondait aux attentes d’un lectorat qui se renouvelait et qui découvrait une série qui s’accordait enfin avec l’air du temps !

C’est avec une certaine nostalgie que j’ai relu ce volume, car ces histoires n’ont absolument pas vieilli. J’ai eu les mêmes sourires complices devant les trouvailles de Tome et Janry, la même envie d’en avoir davantage, mais je crois qu’il faudra se contenter de ces quelques pages qui ébauchaient une suite qu’on ne verra jamais (alors que ça pourrait donner un très beau volume de Spirou et Fantasio vu par… Mais bon !)

En tout cas, je vous conseille vivement cette lecture, ne serait-ce que pour avoir du Spirou en très très grande forme, un vrai régal !

Par FredGri, le 18 mai 2015

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