Sortilèges et méchanteries

Nous retrouvons, dans cet album, les deux histoires écrites par Yann et dessinées par René Hausman: "Les trois cheveux blancs" (1993) et "Le prince des écureuils" (1998)…
Au fond des bois, il y a d’abord une sauvageonne, élevée au fond des bois, qui rêve du beau prince énigmatique, sans pour autant connaître ses propres origines… Puis il y a cet écureuil qui est transformé en homme grâce à la magie d’une sorcière, mais qui change au contact de la société humaine.

Par fredgri, le 19 février 2017

Publicité

Notre avis sur Sortilèges et méchanteries

Sous des dehors de contes, ces surprenantes histoires nous révèlent des destinées cruelles et sans concessions, même si elles recèlent une certaine tendresse, dans le fond !

Ici les belles princesses sont cruelles, avides, orgueilleuses, les princes massacrent des innocentes et les animaux parlent ou prennent la forme des hommes, même s’il reste toujours la possibilité de réaliser ses rêves, quitte ensuite à en payer le prix !

On retrouve Yann en pleine forme, qui détourne intelligemment tout les éléments du conte de fée traditionnel. C’est savoureux et passionnant, il sait aussi nous surprendre à chaque tournant que prennent les histoires, grâce aux multiples rebondissements, aux retournements de situation imprévisibles et savoureux !

De son côté, Hausman est vraiment à l’aise dans ces histoires, du pur plaisir des yeux. Ses héroïnes dégagent un charme fou, même si elles ne sont pas super belles, tandis que les animaux, tordus, gardent un côté "mignon" et très attachants, quand bien même on les regarde déchiqueter leurs petites proies innocentes ! On se perd facilement dans les gestes gracieux de Vaïva, on sourit en regardant les petites bouilles du renard Sajudis. C’est magnifique, tendre et très attachant.

A mille lieux des histoires d’Heroic Fantasy de bourrins, de la pur Fantasy bien racontée, même si parfois bien cruelle !

Yann et Hausman nous livrent des contes qui allient tout les éléments habituels en y rajoutant de la cruauté. Car, encore une fois, rien n’est facile pour ces personnages, ils commettent des erreurs, font souffrir, mais vivent aussi quelques bons moments !

Yann adopte un style en prose qui rappelle directement les textes de Perrault ou des frères Grimm. On est plongé dans l’irréel de ces mondes peuplés d’ogres, de chevaliers, de princesses… Mais on découvre vite qu’on a affaire a des textes beaucoup plus durs, sans illusion, Yann part très vite dans des directions plus violentes. Et c’est là, à mes yeux, que ce recueil prend toute sa dimension, cette capacité à tordre les vieux mythes.
On commence par trouver, par exemple, ce petit écureuil très sympa, puis beaucoup moins et finalement très pathétique, il n’y a plus trop ce phénomène d’identification, juste une morale parfois un peu trop directe !

Quand aux planches de Hausman, c’est magnifique, sa mise en couleur directe à l’aquarelle est d’une telle beauté qu’il transcende la moindre scénette, la moindre course poursuite d’un renard entre les branchage ou la moindre pirouette de ce petit écureuil… C’est sublime !
Alors certes, ses personnages ne sont pas des prix de beauté, ils peuvent même être tordus, mais ils dégagent une telle douceur, une telle mélancolie aussi qu’on est complètement transporté !
Cet auteur, récemment disparu, était le spécialiste des histoires de contes et légendes, des petits personnages des bois, des ambiances à la fois oniriques et fantastiques, champêtres et rurales. Il nous transportait dans des univers bruts et magnifiques. On se souvient encore bien de sa reprise de Chlorophylle, superbe hommage très personnelle à la série de Macherot !

Un petit bijou de graphisme délicat et d’histoires atypiques !
Très recommandé.

Par FredGri, le 19 février 2017

Publicité