SIR ARTHUR BENTON
Wannsee, 1942

Marchand questionne toujours le colonel Kensington, alias Arthur Benton. L’interrogatoire porte principalement sur la fameuse réunion qui a eu lieu près du lac de Wannsee, le 20 juin 1942, et sur ses conséquences. C’est lors de cette réunion qu’une quinzaine de dirigeants du Reich ont décidé de procéder à l’extermination massive des juifs. Benton raconte.

Lui, le britannique qui a choisi d’œuvrer pour le camp allemand, n’avait pas assisté à cette réunion, bien que proche de certains des participants. Ne soutenant pas la solution finale mais étant par contre partisan d’une guerre prioritairement axée sur le combat contre le communisme sur les fronts de l’est, il a essayé en vain de faire peser son point de vue. Des clans se forment au sein de l’intelligentsia germanique.

Les contacts allemands de Marchand et celui-ci mènent mission sur mission pour tenter de coincer Benton. Infiltrations, captures et interrogatoires de collabos, attentats, tout est bon pour mener cette guerre des services secrets. Au cours de son voyage vers Varsovie où Benton a été envoyé mais où il ne sera toujours pas capturé, Marchand verra de ses yeux un camp d’extermination…

Le conflit a atteint des sommets en terme de stratégies inhumaines : l’Allemagne, dirigée par des politiques sans cœur, écrase tout sur son passage. Pourtant, l’avenir devient de plus en plus incertain pour Hitler. Ce dernier sortira indemne de l’attentat perpétré contre lui dans son bunker de Prusse Orientale, lui faisant remettre en cause la confiance qu’il accordait à ses plus proches conseillers. Le début de la fin…

C’est que tout acquis qu’il est à la cause allemande, Benton gravite quand même dans les milieux hostiles à la politique du Führer…

Par sylvestre, le 1 janvier 2001

Notre avis sur SIR ARTHUR BENTON #2 – Wannsee, 1942

Après le tome 1 qui avait été très bien accueilli, voici déjà le second volet. Le scénario de Tarek est très bien documenté et cette histoire qu’il continue de nous raconter, bien que revenant dans cet épisode sur des faits historiques qu’il nous semble avoir entendu et ré-entendu, nous ouvre les yeux de manière différente sur les événements et leurs coulisses.

En effet, à la lecture de ce tome 2, on mesure beaucoup plus cette notion de contre-courant existant au sein de la machine de tête du Reich. On touche un peu plus du doigt ce qui a en partie grippé cette horrible "machine" de guerre pourtant bien huilée qu’était l’idéologie aryenne. Il est vrai que toutes les histoires de services secrets ne sont pas étalées au grand jour et que les archives gardent souvent trop longtemps leurs secrets…

Ce tome est en effet développé autour des camps de concentration. Ces usines de la mort ont été construites dès 1941 pour ne tourner à plein rendement qu’à partir de juillet 1942, soit un mois après cette fameuse réunion de Wannsee. Comme quoi elle a eu lieu mais la décision était déjà prise de mettre en œuvre cette politique inhumaine. Politique inhumaine qui aura finalement créé des ennemis au Führer et à ses fidèles dans leurs rangs. Mais le message passe, au travers les missions de Marchand : "Les alliés étaient au courant de l’existence des camps de la mort bien avant que ceux-ci ne soient libérés, en 1945" ! (On a d’ailleurs pu voir à la télé des documentaires sur ce sujet qui laissent perplexe devant l’attitude des alliés).

Le dessin de Stéphane Perger, toujours si spectaculaire, si caractéristique, me laisse quand même soulever deux petites remarques : les contrastes dont il use donnent parfois à ses visages l’aspect de visages qui seraient "mis sous plastique" : des facettes se détachent parfois trop de ces contrastes et accentuent trop la rudesse des expressions, même si, j’imagine bien, cette rudesse est voulue, relative au contexte. Et dans l’exercice de dessiner des visages de personnes ayant existé, c’est peut-être voulu que la représentation ait ce côté impressionniste.

L’autre remarque est qu’il est dommage que la couleur ne soit pas légèrement différenciée entre les scènes du présent (l’interrogatoire de Benton) et celles se déroulant dans le passé, dans ce que livre Benton ou ce que raconte Marchand. Cependant, on comprend bien que l’environnement, l’ambiance ont orienté les choix de Perger. On n’a pas affaire à une vision qui se voudrait en noir et blanc, car le rouge des drapeaux à croix gammée est bien rouge, le jaune des explosions tranche, aussi, mais on en vient à se demander, abreuvés d’images d’archives aux couleurs ternes, si les couleurs existaient bien il y a 50 ans !!!

Un cahier de quelques pages vient compléter ce récit. J’oserais dire qu’il est ultra-nécessaire. En tout cas pour ceux, comme moi, à qui il faut quand même réveiller la mémoire sur certains points plus précis que d’autres. Ultra nécessaire car nous proposant quelques paragraphes rappelant les faits et dates principaux, mais aussi car il donne des éléments qui nous éclairent sur ce qu’on a pu lire dans certaines bulles des planches. Pour exemple, lorsque Benton va assister à la pendaison de son ami, ce dernier l’informe : "Notre plan a foiré à cause d’une table". Là, je dois dire, je n’ai pas compris. Mais lorsque que j’ai lu dans le cahier supplémentaire que c’est grâce à une table en bois massif qu’Hitler n’est sorti que légèrement blessé de l’attentat dont il était la cible, la compréhension a tout de suite été plus facile. Je vous conseille donc peut-être de parcourir ce cahier avant la BD elle-même. C’est un bon outil pour trouver ses repères.

Si le dessin avait été plus "grand public", aurait-on plus entendu parler de "Sir Arthur Benton" ? Je ne sais pas, mais ce qui est sûr, c’est que ceux qui auront dépassé l’appréhension de ce graphisme rare ne vont pas regretter d’avoir mis leur nez dans cette trilogie où ces personnages si connus (mais finalement si méconnus) sont mis en scène dans une relecture très intéressante de la seconde guerre mondiale.

Par Sylvestre, le 9 décembre 2005

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