Le singe

Un jour, par magie, un rocher fut fécondé, il engendra un œuf de pierre d’où émergea un singe doué de parole. Ce dernier rencontre ensuite une petite communauté d’hommes qu’il aide à franchir une cascade derrière laquelle se trouve un pays merveilleux, une sorte de paradis. Pour cet exploit on le nomme "le roi des singes". Mais l’inactivité lui pèse au bout de quelques années, d’autant qu’il commence à être obsédé par sa propre mortalité. Il entreprend alors de trouver un sage qui pourrait lui apprendre à accéder à l’immortalité…

Par fredgri, le 31 juillet 2013

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Notre avis sur Le singe

Le roi des singes, connu sous le nom de Sun Wukong, est un des personnages les plus célèbres de la littérature chinoise classique (d’ailleurs au Japon on l’appelle Son Gokū, il va inspirer de nombreuses œuvres, et notamment Dragon Ball de Toriyama !) En fait il est la figure centrale du Xiyou Ji, le roman de Wu Cheng’en paru à la fin du XVIe siècle ! Mais derrière une approche pleine d’humour et au style très enlevé, ce roman proposait plusieurs niveaux de lecture et plus particulièrement une critique du système politique et administratif de l’époque Ming (1368 – 1644), ainsi que cette fusion idéologique de différents cultes comme le bouddhisme, le taoïsme, et le confucianisme. Véritable regard sur son époque, ce roman va très rapidement devenir une vraie référence pour tous.
Avec cette adaptation, Pisu et Manara ont donc entrepris à la fois de retranscrire le message de l’œuvre originale, mais aussi de suivre son exemple en parlant de leur époque.

En effet, l’album est très régulièrement ponctué de clins d’œil modernes sur notre société (l’album date de 1976, tout de même !), sur ces systèmes politiques, les dérives du pouvoir et c’est vrai que le matériau de base est idéal pour présenter une satire mordante sur le monde qui nous entoure. Néanmoins, j’avoue qu’il faut quand même s’accrocher au début tant parfois la narration tombe dans une sorte d’hystérie formelle ponctuée de textes brassant des références assez pointues.
Il faut dire que Manara en est à ses débuts, qu’il règne une joyeuse folie dans ces planches et que l’artiste se fait visiblement beaucoup plaisir ! Et même s’il semble déjà obsédé par les sculpturales femmes aux physique de hardeuses, Manara explore ici toutes les possibilités de son art, jouant avec les cadrages, avec une palette assez large d’encrage, expérimentant sans cesse, repoussant les limites du medium… C’est époustouflant !

Bien loin de ses albums érotiques obsessionnels ce "Singe" demeure, à ce jour, l’une des pièces fondatrices dans l’œuvre du maître, une de celles qui vont progressivement l’amener à devenir celui qu’il va ensuite être !
Pour moi, je range cet album à côté des Guiseppe Bergman, des albums avec Pratt, un indispensable !

Et même si en effet le principal attrait de ce volume reste toujours et encore l’incroyable travail graphique de Manara, il ne faut toutefois pas bouder le plaisir de la lecture. Bien que restant un peu touffu globalement on se prend vite au jeu de cette folie qui hante tout l’album. On peut être quelque peu largué par le côté "religieux" du récit, mais cela reste vraiment prenant, ne serait-ce que par l’étrangeté qui plane sur tout ça !

Une très belle redécouverte que je vous conseille très vivement !

Par FredGri, le 31 juillet 2013

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