SECRETS : L'ECORCHE
Tome 1/2

A Paris, en cette année 1871, c’est la "semaine sanglante". Au cimetière du Père Lachaise, un peloton d’exécution anéantit un des derniers groupes de Communards. Seuls deux parmi ces prisonniers-là auront la vie sauve, car celui qui commande le tir reconnaît la fille d’une de ses connaissances, Alix. Bien que celle-ci ne le veuille pas, par idéal, elle pourra quand même éviter la mort avec son compagnon qui la convaincra qu’il vaut mieux être vivant pour défendre ses idées. Cet homme, c’est Valère, un poète dont le chemin bifurquera de celui d’Alix à partir de ce jour-là.

Quelques temps plus tard, du cabinet d’Emile Préau (le père d’Alix), ce même Valère ressort accompagner une certaine Justine qui tient dans ses bras un enfant. Cet enfant, elle n’a pas les moyens de le garder : il va être confié à un couple d’artisans bouchers, Angèle et Clovis, qui vont l’élever comme leur propre fils. Tristan, c’est son nom, s’il a eu cette chance de ne pas être abandonné, a tout de même une particularité qui ne lui promet pas que des bons jours : il est en effet atteint d’une difformité qui l’oblige à se masquer tout le bas du visage.

Ce handicap le fera grandir dans une certaine solitude affective : il n’a pas d’amis et les seules personnes qui lui montrent de l’affection sont sa mère adoptive (qu’il croit être sa mère naturelle) et sa mère naturelle (avec qui il a été convenu dès l’adoption qu’elle pourrait rendre visite quand elle le souhaite à son fils, mais en tant que "cousine Justine"). Cette solitude lui permettra cependant d’étudier.

Un jour, aux abattoirs où il accompagne régulièrement son père adoptif, Tristan a une révélation : à l’aide d’une queue de vache et de sang, il se met à dessiner avec un certain talent. Ce goût pour le dessin ne le quittera plus.

Tristan devient un peintre qui gagne à être connu. Il a même eu une première commande, grâce à Valère qui est resté un ami. Il peint beaucoup. Des femmes, surtout. Des modèles qu’il doit payer, car sa difformité ne lui vaut aucun égard de femmes. Jusqu’au jour où il est repéré par une galeriste qui s’intéressera à lui pour ce qu’il est vraiment et non pour son apparence.

Tristan est donc promis à un brillant avenir, mais les secrets qu’il sent peser sur sa famille le tracassent et le renferment sur lui-même. Valère, qui semble détenir des réponses aux questions que se pose Tristan, prend quant à lui le rôle très lucratif de maître chanteur auprès d’un certain Monsieur Abel, forcément lié à Tristan si l’on en croît les précautions qu’il prend dans cette affaire qui le rattrape ; précautions qui vaudront jusqu’à la vie aux parents adoptifs de Tristan décidément malmené par la vie…

Par sylvestre, le 1 janvier 2001

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3 avis sur SECRETS : L’ECORCHE #1 – Tome 1/2

L’écorché est un album très particulier portant sur la difformité, sujet très sensible et sans doute encore tabou dans la société. Pour aborder ce thème, Giroud construit une histoire assez atroce autour d’un personnage très mystérieux, mystère d’autant plus épais qu’il a choisi d’enlever au héros les moyens de s’exprimer verbalement. L’aventure humaine est d’abord intérieure puis plus exhibée au moyen d’un transfert que l’artiste fait sur les toiles qu’il peint. Comme si ça ne suffisait pas, le premier tome aborde furtivement (en fin de livre) un autre sujet tout aussi difficile mais beaucoup moins tabou qui est celui de l’expérience. Nous savons tous que pour évoluer la science expérimente sur des cobayes (animaux et humains volontaires sous contrôle médical moyennant rémunération.) et c’est donc de ça dont il est apparemment question ici. Alors il est trop tôt pour savoir qui est responsable de la monstruosité physique du héros mais on est en présence d’indices assez parlants pour se dire qu’elle n’est pas l’effet du hasard.
Au quotidien, le rejet de ces personnes est bien connu et difficile à vivre. Les auteurs le montrent avec détails et le héros semble cruellement manquer d’amour de façon si visible dans ses peintures.

Le dessin de Pellejero est très personnel et son trait jeté, un peu épais, un peu gras alourdit l’ambiance déjà difficile à soutenir. L’ensemble est sombre, lourd, impressionnant.
Nous fermons l’album, assez bouleversés, en quête d’un peu d’oxygène et pour une fois, heureux de devoir faire une pause à la lecture.
Encore un très bon album de la collection « Empreinte(s) » qui met mal à l’aise et qui s’inscrit dans la mémoire. Il n’y a plus qu’à espérer que cela ne nous provoque pas de cauchemars.

Par MARIE, le 8 juillet 2006

Alors, ce secret est un poid lourd de sens, de compromis, de regard des autres, Tristan se fatigue de cette vie ou il doit se cacher derrière une sorte de minerve de cuir, il y cache une sorte d’horrible marque qui paralyse d’effroi quiconque le regarde de près, il est jugé, repoussé et pour ne pas perdre la raison il se réfugie dans ses toiles peintes avec du sang, ce même sang qui coule des chairs des animaux de l’abattoir où travaille son père adoptif, ces "écorchés" révèlent toute la délicatesse des âmes qui se cachent, qui souffrent de cette "mise à nu" ! Et Tristan se courbe, Tristan retrouve une lueur d’espoir dans le regard de ces quelques femmes qui l’admirent ! Giroud et Germaine nous content là la souffrance d’un artiste à vif qui doit, pour survivre et tenter de trouver une voix, se révéler dans son art et dans ses rêves, on aurait tendance à se dire que les deux scénaristes ont bien chargé leur personnage, rien ne lui est épargné et du coup le tableau qui en ressort semble bien plus "écorché" que le moindre des ouvrages de Tristan, comme si au fond, sa peinture n’était pas une façon pour lui de sublimer sa vie et ses rencontres dans le sang, la pureté d’un corps, l’idéal d’un regard ! Nous retrouvons également le sublime graphisme de Ruben Pellejero qui permet d’atténuer délicatement la gravité de cette histoire avec son trait gras et souple, magnifiquement mis en scène !
Un album qui ne se lit pas à la légère mais qui laisse une empreinte vive et durable !
Fantastique.

Par FredGri, le 30 octobre 2006

Deux choses m’ont obligé à lire cet album : le fait qu’il fasse partie de cette excellente série Secrets, dont les scénarii sont signés par Frank Giroud, et le fait que Ruben Pellejero soit au dessin. En effet, j’ai déjà été séduit par beaucoup des histoires du premier et étais tombé sous le charme du dessin du second en découvrant son travail grâce à son magnifique Tour de Valse.

Je suis très satisfait de cette acquisition. Le dessin et les couleurs tiennent leurs promesses. Je reste bluffé par le talent de Pellejero dont le trait très épais n’empêche pas des résultats graphiques précis.

J’avoue par contre qu’au niveau du scénario, les éléments sont nombreux qui nous embrouillent dans notre quête de la solution du mystère, du "perçage" du secret. Je reste donc dans l’attente du prochain tome (qui clôturera le diptyque) pour me faire un avis complet. En effet, de très nombreux détails sont troublants, voire incompréhensibles, et on ne peut à mon avis après ce premier tome que s’en remettre à la confiance que l’on a en le scénariste : à lui de nous faire retomber sur nos pattes ! La dernière planche finit d’ailleurs de nous déstabiliser quand on y voit un Tristan vieil homme alors qu’on ne l’a vu au cours de la lecture qu’enfant ou jeune adulte !

Qu’est devenue Alix, effacée pendant tout ce tome 1, mais dont on reparle à la fin ?
Et que sait-elle ?
Que sait donc Valère, aussi ?
Qui est véritablement Justine par rapport à lui ?
Et Valère par rapport à Tristan ?
Ce que ramasse Valère dans le cabinet d’Emile Préau (une sorte de bourse) est-il aussi important qu’on est en droit de le supposer ?
Qui est ce Monsieur Abel ?
Dans quelles conditions reverra-t-on Mathilde Maraval ?
Etc, etc…

Les 62 pages de ce généreux tome 1 ont largement de quoi nous intriguer, nous tenir en haleine. Vivement donc le tome 2 pour découvrir la vérité et retrouver le dessin de Ruben Pellejero !

Par Sylvestre, le 25 avril 2006

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