SDF
Si Doux Foyer

René est à la rue. C’est un SDF, comme qui dirait. Un clochard, comme on disait avant. Et rhâââ !!! C’est sûr, il préférerait vivre ailleurs. Mais bon, il a fini par s’adapter, par se faire une raison. Et c’est toujours ça de pris, car ainsi, il ne tombe pas dans la déprime ou dans la connerie.

Un jour, Jean-Paul l’a rejoint sur son bout de carton, sur le trottoir. Jean-Paul, il avait une bonne place dans sa société. Mais c’est ça, la société… C’est ça, la vie : même les éléments indispensables peuvent un jour être jetés dehors…
 

Par sylvestre, le 16 février 2010

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Notre avis sur SDF #1 – Si Doux Foyer

Quoi de mieux que les vagues de grand froid pour rappeler aux gens que certains meurent dehors en hiver ? Eh oui, on se les caille, dehors, en hiver, et alors on se dit que c’est pas humain, un froid comme ça. Et puis on rentre se mettre bien au chaud, et on en oublie ces autres qui n’ont pas d’autre choix que rester dehors…

Et bé vous savez quoi ? Voilà que les éditions Fluide Glacial publient en ce début d’année 2010 le tome 1 de cette série S.D.F. Voilà qui fera grincer des dents dans certaines chaumières (plus ou moins bien chauffées), car forcément, s’il y a le thème qui est délicat en soi puisque cette misère du S.D.F. est à nos portes, il y a aussi et comme derrière toute parution de BD des histoires de pognon. Ca fait un peu "Je profite du truc"…

Mais à y regarder de plus près, ce n’est pas complètement ça. Les râleurs devront donc mettre un peu d’eau dans leur gros rouge qui tient chaud. Car en effet, même si le style "à la Reiser" de l’auteur Le Borgne donne tout de suite à ses planches un aspect crade qui semble bien coller à l’univers des clochards, il est à noter que dans S.D.F., le clochard est… digne, respecté… Mais oui, c’est vrai ! Dans S.D.F., pas de héros complètement pochtron et dépravé, gerbant ici ou là et se complaisant dans sa saleté. Pas de bagarre de mecs bourrés et de dégueulis incontrôlés… Non. Ca, c’est malheureusement le type d’images qui vient un peu trop naturellement lorsqu’on parle de ces gens qui sont à la rue. Mais il faut savoir que c’est maintenant presque une condition comme une autre, S.D.F. C’est un statut qui a fait son entrée dans les esprits et dans l’échelle sociale. Puisque de plus en plus de personnes s’y trouvent confrontées. Il y a la période salariée, la période de chômage et des aides financières, et puis un beau jour, patatras… c’est la chute. La rue.

Et c’est cette dignité qu’il laisse à ses personnages qui permet à Le Borgne d’en tirer des gags sans avoir à se soucier des reproches des bien-pensants. Car l’auteur réussit à retourner les situations et parfois plus que des clochards, c’est des autres qu’il se moque. De ceux qui se donnent bonne conscience une fois l’an dans un élan programmé de solidarité ponctuelle, par exemple. Et comme il laisse à ses personnages un bon degré de philosophie et d’espoir, il en fait des gens sympathiques au point qu’on se sent proches d’eux ; tellement proches qu’on en oublierait que Jean-Paul, par exemple, est typiquement le "vous-et-moi" qui s’est fait broyer sans rien avoir vu venir… Les boules, hein ?!

Avec un titre en trois mots reprenant les initiales S.D.F, chaque petite historiette pointe avec humour des situations qui mettent en scène (et certes parfois de manière exagérée) un peu du quotidien des gens de la rue. Les poubelles, les bidonvilles, la manche, etc… Mais tout n’est pas encore abordé : pas de centre d’hébergement, pas de Restos du Cœur, pas de tentes Quechua ni d’Amis de Don Quichotte. Ou pas encore, en tout cas (il y aura de quoi faire quelques autres tomes, à mon avis, et de quoi accueillir d’autres persos !) mais qui sait… Ca ne saurait tarder, peut-être !

S.D.F., c’est aux éditions Fluide Glacial ; éditions qui n’ont jamais hésité à mettre les pieds dans le plat, quitte à être politiquement incorrectes. Celles-là même qui, on fait forcément le rapprochement, proposaient aux festivaliers du FIBD 2010 d’Angoulême une soupe chaude au comptoir de leur stand posté rue Hergé!

Et si acheter cette BD ne changera sûrement rien à la face du monde, elle aura au moins attiré l’attention sur un véritable problème de société. Voire, si l’on va plus loin, sur un véritable problème de désengagement de l’état. A bon entendeur, salaud ! (Comme disait l’autre)
 

Par Sylvestre, le 16 février 2010

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