Une histoire d'amour d'un certain type

Sarah est une femme de milieu modeste, qui travaille dans une imprimerie. Elle n’est pas jolie, elle a des kilos en trop, elle n’est pas heureuse. Paul, lui, est un beau gosse, avocat. Un soir, Sarah l’aborde dans un bar huppé. Ils entament la conversation. Le courant passe et ils se voient de plus en plus souvent. Leur relation peut elle aller plus loin ?

Par legoffe, le 16 mai 2010

2 avis sur Une histoire d’amour d’un certain type

Grégory Mardon adapte, ici, une nouvelle de Russel Banks, parue dans les années 1980 et qui obtint le prix O’Henry. Elle raconte “une histoire d’amour d’un certain type” comme le dit le sous-titre de l’album. Et pour cause ; le livre nous parle de la relation d’une femme plutôt laide qui séduit un homme riche et beau. Une façon imagée d’aborder, selon Banks lui-même, “l’affection sentimentale (et érotique) de la bourgeoisie libérale pour la classe ouvrière.”

L’auteur aborde ainsi son thème sans tabous, formant progressivement un couple improbable dont nous suivons pas à pas la relation.

Il y a beaucoup de retenue et de délicatesse dans ce récit qui privilégie régulièrement des scènes sans dialogues, comme pour mieux installer la complicité des deux protagonistes. Ce sont des regards, des sourires, des rires… et des doutes. Leur situation sociale, leur apparence sans doute aussi, freine leur relation et apporte une ambiance lourde.

Nous assistons à une histoire étrange et il faut bien admettre que notre culture et les modèles que l’on a pu nous inculquer sont plus que bousculés. En d’autres termes, le récit – en plus d’être improbable – dérange. Le lecteur s’interroge autant sur la nature de cette relation que sur les pensées et les motivations de Paul, qui nous échappent quelque peu.

Le style graphique de Mardon, aux lignes épurées, donne toute sa place aux personnages, que l’on suit sans être distraits par d’autres éléments. Un effet renforcé par la sobriété du noir et blanc.

Globalement, on suit avec intérêt l’histoire de ce couple même si cela laisse un arrière goût étrange, quelque peu dérangeant. Le lecteur sera aussi certainement soumis au doute devant la conclusion de l’histoire, qui reste sujette à interprétation. En dehors de la particularité même du récit, certains pourront regretter la rapidité avec laquelle se lit cet album. L’auteur, visiblement, a voulu en dire le moins possible pour nous laisser ressentir les choses, les voir selon nos propres émotions. Un pari qui apporte au livre des forces… et des faiblesses.

Par Legoffe, le 16 mai 2010

Elle, Sarah, est une femme d’une quarantaines d’années au physique que l’on peut qualifier sans aucun cynisme d’ingrat. Divorcée de son mari, elle s’occupe seule des ses trois enfants et travaille comme ouvrière dans l’imprimerie. Lui, Paul, est un beau jeune homme, un peu plus jeune qu’elle, il exerce la profession d’avocat.
Sarah et Paul font connaissance dans un bar chic ; c’est Sarah qui aborde Paul. Tout semble opposer ses deux êtres, leur milieu social, leur physique, leur train de vie… Tout sauf peut-être le fait que tous deux soient des gens gentils, simples (dans le sens noble du terme). Ils sympathisent rapidement, puis nait une relation plus sérieuse, plus forte entre eux, de l’amour ? Je pense que oui, mais un amour qui n’a pas su résister au poids des conventions, au regard des autres, au carcan dans lequel notre société d’apparat nous enferme.

Adapté d’une nouvelle de l’auteur américain Russell Banks, qui signe une préface très intéressante pour la compréhension de l’album – et qui dit avoir apprécié pleinement cette adaptation sensible et délicate, ce qui représente peut-être l’une des plus belles récompenses pour son auteur Grégory Mardon – Sarah Cole est un récit fort qui pourra peut-être néanmoins troubler plus d’un lecteur. Troubler car il réside une part d’ambigüité dans cette


« histoire d’amour d’un certain type


». Son interprétation pourra s’avérer différente en fonction de l’éducation, du vécu, des valeurs de chacun. Mais quoi qu’il arrive, ses auteurs y soulèvent un point intéressant qui est la place que l’on accorde au regard de l’autre, à la peur d’être jugé. Et tout cela sans porter de jugement justement. Extérieurs, ils ne prennent pas partie dans cette histoire, ils ne font que la raconter telle qu’elle est.

Grégory Mardon réussi dans cet album à instaurer une force émotionnelle dans son dessin tout le laissant presque comme en retrait, c’est comme s’il s’effaçait pour laisser tout la place à l’histoire. Ce travail d’une grande finesse est révélateur du talent de Grégory Mardon.

Sarah Cole c’est une histoire sensible, délicate et « intelligente », qui à coup sûr ne laissera pas indifférent. C’est une histoire d’amour singulière entre un homme gentil et salaud et une femme gentille et chieuse. C’est l’histoire de leur échec et ça fait mal…

A découvrir sans fautes.

Par melville, le 31 mai 2010

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