Les Sans-Visages

Lors de la guerre de Trente Ans, une escouade de mercenaires commandée par celui qui se fait appelé Le capitaine traverse un énième charnier où le sang des civils ébranchés se mêle à celui des soldats mis à terre. Ayant atteint un éperon rocheux, ceux qui se font appeler les Sans-Visages découvrent qu’un escadron de cavaliers adverses fonce sur eux. En cherchant à l’esquiver, ils tombent sur une troupe de reconnaissance avec laquelle ils engagent le combat. Malheureusement, les Sans-Visages sont rattrapés par le gros des troupes et doivent fuir avant d’être totalement débordés. Ils s’engagent alors dans de hautes broussailles qui masquent une cavité dans la montagne. En poursuivant leur chemin souterrain, ils finissent par déboucher dans une immense vallée où la guerre n’a jamais fait son office destructeur. Saisis par la beauté des lieux, Le Capitaine et ses hommes découvrent alors qu’une communauté y habite et que celle-ci obéit à des rites où la violence n’a pas sa place. Est-ce que les Sans-Visages pourront trouver l’occasion de se faire accepter par les autochtones et de s’installer définitivement ? Seront-ils à même de préserver la quiétude de ce paradis terrestre ?

Par phibes, le 21 octobre 2019

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Notre avis sur Les Sans-Visages

A l’origine de nombreux récits ayant pour thème le petit peuple (entendez celui enchanté peuplés d’elfes, de fées, lutins, farfadets…), Pierre Dubois sait aussi œuvrer dans un autre registre, beaucoup plus dur, qui est celui des hommes et de ses actes vis-à-vis de son prochain. Après avoir démontré toute sa violence dans l’ouest sauvage avec Sykes et Texas Jack, ce scénariste émérite plonge dans l’Histoire, celle du 17ème siècle, lors de la sanglante guerre des Trente Ans.

Après une entrée en matière particulièrement explicite historiquement parlant, l’on découvre les fameux Sans-visages, véritables renégats qui ont renoncé à se montrer à visage découvert et qui agissent pour le compte des belligérants en tuant à tour de bras. Nous les suivons dans la découverte d’un endroit qui n’a rien à voir avec ce qu’ils connaissent. Sous le couvert d’un chef autoritaire et intègre, une possibilité de rédemption s’offre à eux. Mais sauront-ils en profiter ?

Cette histoire complète possède un charme réel. Via son récit, Pierre Dubois introduit « un loup dans la bergerie » et nous fait attendre les répercussions. Sans se précipiter, l’artiste nous ouvre les yeux sur cette communauté vierge de toute violence au travers de ses traditions, tranchant évidemment aux pratiques barbares des mercenaires. A la faveur d’échanges nourris (les dialogues sont bien fournis), il dresse les caractères profonds de ses personnages, donne naissance à des élans d’amour et fait même tomber quelques aveux. Bien sûr, Le Capitaine représente celui qui porte le récit et partage sa place avec le druide de la communauté, ce face-à-face se jouant habilement sur le fil du rasoir. On se prend donc à leur jeu et à celui des deux « camps », attendant la petite étincelle qui mettra le feu aux poudres.

La partie graphique exécutée par Kas se veut on ne peut plus captivante. L’artiste fait preuve d’un très gros travail sur les péripéties guerrières de ses Sans-Visages. Ses planches regorgent de détails impressionnants – trop peut-être au point de faire un peu confus. Malgré tout, l’empreinte de son maître Rosinski est là et qu’à cet égard, le dessinateur joue la carte d’un réalisme inspiré historiquement. Sous une colorisation directe un tantinet fade qui écrase la profondeur, personnages et décors forment un résultat illustratif qui force tout de même le respect.

Une épopée historique remarquable qui joue subtilement sur les contrastes à découvrir dans la collection Signé de chez Le Lombard.

Par Phibes, le 21 octobre 2019

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