Le saigneur de Tiffauges

Le 26 octobre 2007, délaissant sa sœur en état de choc et ses parents abattus, disparaît Rémi, un jeune garçon non loin de la bourgade de Tiffauges. Ses restes sont retrouvés quelques temps plus tard dans une urne funéraire. Un an après ces faits, jour pour jour, lors de la visite du château de la même ville, Nicolas, un autre garçon échappe à la vigilance de son institutrice et disparaît lui aussi, ne laissant pour seule trace, son petit sac. L’inspecteur Deray du commissariat de la Roche-sur-Yon, qui connaît bien les affaires pour avoir rencontré les parents concernés, mène l’enquête et soupçonne un serial killer de rôder autour de Tiffauges. Mais quel est-il ? Subirait-il l’influence de l’ancien maître de ces lieux ancestraux à savoir Gilles de Retz alias Barbe Bleue ? Et puis, quelle est cette vieille femme qui semble être présente à chaque disparition ?

Par phibes, le 26 février 2010

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Notre avis sur Le saigneur de Tiffauges

L’association entre les deux auteurs se pérennise après un travail commun sur deux épisodes dans la saga Le maître de jeu (n° 5 et 6) et la publication de l’adaptation de la célèbre nouvelle de Franz Kafka, La métamorphose. En effet, Eric Corbeyran, auteur très prolixe, et Horne, dessinateur d’univers plutôt angoissant, se lancent dans un nouveau one-shot à sensations qui se veut un mélange subtil de références historique, littéraire, policière, fantastique et ésotérique.

Préalablement averti par le premier de couverture sanguinolent qui donne une orientation évocatrice du fameux Barbe Bleue, le lecteur a tôt fait d’être absorbé par l’ambiance angoissante de l’histoire liée à la disparition énigmatique d’enfants. Une fois que ces faits douloureux ont été exposés (en quelques planches), la fiction vient se raccrocher au personnage clé à savoir l’inspecteur de police Deray. Ce dernier apparaît dans une ambiguïté scénaristique calculée (son nom, son émoi, ses actions) que le lecteur va devoir assimiler, approfondir et juger. Pour ce faire, son jeu équivoque de par la direction de l’enquête, intrigue, pèse par cette ambiance de folie qui l’auréole et vient éclater au final dans une confusion (voulue) déroutante.

Pour parfaire ses péripéties au déroulement certes classique mais surprenant, Eric Corbeyran a puisé son inspiration dans l’Histoire et la littérature. En effet, s’il a assimilé la biographie glaçante du Seigneur de Tiffauges, Gilles de Retz (ou de Ray alias Barbe Bleue), personnage sanguinaire du 15ème auquel lui sont imputés le viol et le massacre incalculable d’enfants, il la complète par la véritable évocation de Barbe Bleue perpétrée par le romancier Charles Perrault et dont une partie de son conte est reprise dans le récit.

Horne, de son côté, nous a habitué précédemment à un dessin très réaliste. En cet opus, il ne déroge pas à sa ligne de conduite et nous sert un travail de choix, basé sur une recherche photographique bien exécutée. Il perpétue avec délice l’ambiance lugubre impulsée par son scénariste en jouant sur un ombrage omniprésent et se veut le rapporteur fidèle d’une page d’histoire assez douloureuse.

Un album assurément angoissant et superbement construit. Frissons garantis !

 

Par Phibes, le 26 février 2010

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