Les rois vagabonds

1932, Etats Unis. La grande dépression !

Freddie Bloch n’a plus le choix.

Son père, ne trouvant pas de travail et lassé de sombrer dans l’alcoolisme, décide de l’abandonner, lui et son grand frère Al, pour partir chercher du travail dans quelques villes lointaines ! Al, tout d’abord très optimiste, tombe progressivement dans les petits vols à la sauvette avant d’être capturé et foutu en prison.

Freddie n’a que 12 ans, bon dieu, que c’est dur, il s’enfuit sur les routes pour tenter de retrouver son père !

Il va ainsi découvrir la dure réalité des errants, ces hommes et ces femmes qui parcourent le pays pour trouver des petits boulots, qui se construisent des bidons villes, qui adoptent un style de vie, des codes de conduite, mais surtout… que personne ne supporte…

Freddie rencontre Sam qui prétend être le roi d’Espagne, il rencontre le vieux Jessie et tant d’autres qui essaient de survivre…

Tu as bientôt 13 ans, gamin, bientôt un homme…

Par fredgri, le 1 janvier 2001

Notre avis sur Les rois vagabonds

Octobre 1929, c’est le crash boursier aux Etats Unis, un crash qui va s’étendre progressivement, plongeant le pays et plus globalement le monde dans une crise sans précédent ! C’est ce qu’on appelle aux USA, la grande dépression ! Comme il est expliqué à la fin de cet album, dans un petit dossier très bien documenté, les marchés financiers se sont effondrés dans tous les secteurs, les grosses entreprises ont alors licencié à tour de bras, créant une masse impressionnante de chômeur, qui pour tenter de survivre, ont du commencer à parcourir le pays pour trouver du boulot. Ces hommes et ces femmes, on les a vite surnommé des « Hobos » !

Au travers de livres comme « Les raisins de la colère » de Steinbeck ou encore « USA » de Dos Passos, on peut se rendre compte combien ce style de vie errante, mélée de desespoir, de conviction politique, de perte d’identité, peut avoir été desastreux. Dans « Les rois vagabonds », James Vance nous emmène dans les traces de ce jeune gamin, Freddie Bloch, qui va devoir apprendre à devenir un petit homme et tirer un trait sur ses rêves d’enfant. C’est souvent très dur et impitoyable mais on trouve régulièrement des espaces ou souffler, ou la bonté et la solidarité peut encore fonctionner ! On est néanmoins très loin d’une imagerie un peu naïve et bien pensante à la Capra, ici, même les hobos peuvent être cruels entre eux, la police est souvent corrompue et intransigeante et le regard des gens plein de dégout.

Malgré tout, le message de Vance n’est pas seulement un message pessimiste, Freddie garde la foi en lui, en sa capacité de pouvoir grandir et de trouver un jour une solution. On n’est donc pas tout à fait dans une histoire larmoyante et pleine de poncifs, les gens croisés ne sont pas tous des gens extra ordinaires, il n’y a pas systématiquement de moral à tirer de ces vies… Non, nous sommes dans un récit qui transpire d’humanité, de cette force qui pousse les gens, parfois, à aller jusqu’au bout de leur force, à aimer, à hair, ou tout simplement vouloir juste avancer sur le chemin !

C’est l’essence même du « Road movie », une sorte de quête invisible qui permet de rester vivant, de garder en soi les lumières de ce vieux cinéma ou l’on se dépéchait avec ses amis, de se demander qui on est, qui sont ces autres qui nous entourent…

Cet album est plein de bonté, de réalisme et de lyrisme aussi. Fascinant.

James Vance est issu du théatre, il a écrit « On the rope » en 80, cette pièce racontait l’histoire d’un groupe de personne en 1937, pendant la grande dépression. Devant l’énorme succés de cette pièce il eut l’idée de reprendre un des personnages secondaires, un certain Freddie, mais de raconter ses premières années d’errance ! Son écriture est donc un étrange mélange de voix off, de situations théatrales et de BD plus traditionnelle, c’est très envoutant ! On se laisse prendre dans ce récit, dans cet album de 200 pages (pour 17€) en noir et blanc, sans prendre le temps de souffler. De plus, j’insiste, mais ça n’est jamais bassement larmoyant, le gamin est certe jeunes mais il essaye de se comporter en jeune adulte, même si ça n’est pas évident ! James Vance ne juge que très rarement tout les protagonistes, sous sa plume ils ne sont ni des loosers pathétique, ni des brigands terrés dans l’ombre, non, ce sont juste des hommes qui tentent de garder un peu de leur dignité !

Le dessin de Dan Burr est vraiment très bon aussi, réaliste et vraiment très propre. Avant de feuilleter cet album, je m’attendais à trouver un trait très underground, ben pas du tout, bien au contraire. C’est un style magnifique, un peu classique c’est vrai mais très expressif, malgré tout ! Ce qui est dommage c’est que Vertige Graphic n’ai pas gardé la couverture originale qui était bien plus belle que cette repro mise en couleur d’une case ;-((

« Les rois vagabonds » (son titre en VO : « Kings in disguise » (Les rois déguisés)) a remporté quelques prix intéressants en 89, comme notamment les Eisner Award du meilleur premier épisode, de la meilleure nouvelle série, et loupant de peu celui du meilleur scénariste face à un Alan Moore au mieux de sa forme ! Ce qui est surprenant, c’est que malgré toute cette reconnaissance critique, malgré cette réputation d’album culte personne n’a semblé y faire davantage attention en 89/90 que lors de la sortie de cette traduction chez Vertige Graphic en Décembre dernier ! Le titre n’apparaissant même pas sur leur site ! Il serait peut-être temps d’aller plus faire de publicité autour de ce formidable album qui continue à se cacher derrière certains autres chez vos libraires, Il mériterait plus de promo que bon nombre de volumes actuels !

Donc, si l’occasion se présente, je vous dis bonne lecture, vous en ressortirez chamboulé ! (Lire absolument les dossiers et prologue de cet album, très instructifs)

Par FredGri, le 9 mars 2004

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