RIVAGE
Tome 2

Le malheur continue de s’abattre sur l’île du démon : les plantations sont ébouillantées par l’eau souterraine qui fait surface en même temps que le volcan semble se réveiller, les poissons s’éloignent du rivage, et même le lac voit son eau douce remplacée peu à peu par de l’eau de mer. La famine menace…

La chef du village invite donc son peuple à travailler en différents groupes : creusements de puits, construction de meilleurs bateaux de pêche, rassemblement des victuailles. Elle invite également ses pairs à prier. C’est pendant la séance de prières que le doyen va avancer l’idée que fuir l’île permettrait à tous de survivre à la catastrophe qui se prépare. C’est pendant cette séance aussi que Momoé, le fils de la chef, va croire, sous les effets de l’alcool, apercevoir une silhouette qui observait la scène.

Momoé finira par découvrir la cachette de Manamé. Entre lui, Torago et Kukuri va s’installer un climat de méfiance et de chantage. Cette fille étrangère sur qui les croyances de Momoé font reposer la responsabilité du malheur lui plaît, pourtant, et une étrange relation s’instaure entre eux, faisant naître de la jalousie chez Kukuri, aussi, à qui Manamé s’est confiée et en qui elle a mis ses espoirs de fuite de l’île.

Torago, pour ne pas que Momoé la tue, a juré de tuer elle-même Manamé si les malheurs persistaient. La jeune femme va malheureusement être prisonnière de sa parole donnée : la nature ne semble pas apaiser ses colères…
 

Par sylvestre, le 1 janvier 2001

2 avis sur RIVAGE #2 – Tome 2

Cette bande dessinée se boit comme du petit lait. C’est avec fluidité que l’on parcourt ses pages et que l’on dévore cette aventure. La catastrophe naturelle apporte son lot de stress et de suspense quand, côté relationnel, on assiste à un jeu intéressant de pouvoir et de soumission, de confiance et d’amour ou de méfiance et de chantage parmi les 4 personnages principaux Torago, Kukuri, Momoé et Manamé. Beaucoup plus de planches érotiques viennent rythmer ce second volume qu’il n’y en avait dans le premier. Qu’il fait chaud, sur l’île du démon ! 😉

Bien malin celui qui peut savoir, à ce stade, comment vont évoluer les choses. L’idée du départ de l’île pour aller se réfugier sur "l’île du large" (que l’on voit par jours de beau temps à l’horizon) est avancée. Sera-ce la solution pour ce peuple menacé par une catastrophe naturelle de plus en plus imminente ? D’autant que Manamé proviendrait peut-être de cette fameuse île qu’elle doit regagner au plus vite pour ne pas retomber sous le coup de la haine des îliens qui, à part les 3 autres héros principaux, la croient tous morte, rejetée à la mer, depuis longtemps.

Le tome 3 étant à paraître le mois d’après la sortie de ce tome 2, on n’aura pas trop à attendre la suite. Tant mieux !
 

Par Sylvestre, le 3 octobre 2006

L’auteur pose son récit dans une époque lointaine, sur une île isolée, pour mieux analyser les liens sociaux.
La microsociété ainsi décrite est restée coupée des influences extérieures, figée à un stade primitif : les habitants vivent en autarcie, en clan, sous le commandement spirituel d’une shaman et dans le respect de la nature. Le respect des Lois y est donc primordial pour maintenir la cohésion du groupe.

C’est d’ailleurs dans la rupture de la Loi que l’un des personnages centraux va se détacher : Torago, celle qui a voulu essayer le bateau en dépit de l’interdit, celle qui va aussi secourir l’étrangère.
Le comparatif en début de récit entre les positionnements des trois enfants par rapport à la loi est intéressant : Tana est l’aînée, la plus réfléchie, qui prend toutes les précautions pour qu’un incident ne survienne pas en dépit de la violation de l’interdit, Torago la cadette tumultueuse et aventureuse qui ne se soumet pas, Kukuri enfin l’enfant soumis à la loi.
La sanction pour la rupture de l’interdit est, en revanche, démesurée : il y a une sanction du clan, toute en violence, et une plus extérieure (la perte de la grande sœur par noyade). La violation initiale de la loi ouvre d’ailleurs la voie à la seconde rébellion de Torago, déjà isolée du groupe pour son premier dérapage.

L’apparition de l’étrangère va marquer un tournant dans la vie du clan : elle est symbole de rédemption pour Torago et Kukuri mais de catastrophe pour le reste du groupe. Elle est l’Autre, venue de l’extérieur, avec de possibles influences néfastes. Elle arrive surtout à un moment où la nature se retourne contre le clan. Une éruption volcanique est en train de se préparer mais pour les habitants, c’est une punition divine. Ils trouvent donc en l’Etrangère une parfaite responsable du cataclysme. Elle est l’exutoire qui doit être sacrifiée pour apaiser la nature.

Au-delà des liens sociaux, l’auteur explore aussi la psychologie des personnages : Torago qui se sent responsable de la mort de sa sœur et sacrifie donc son appartenance au groupe pour sauver celle qui lui ressemble ; l’Etrangère, qui ne trouve pas sa place dans ce monde codifié et qui va devoir s’adapter pour survivre ; la shaman qui doit préserver la cohésion du groupe à un moment où son pouvoir se confronte à une nature hostile ; Kukuri qui n’a jamais révélé son secret au clan par peur de l’isolement et qui adopte un comportement ambivalent à l’égard de l’étrangère. Son positionnement est peut-être le plus alambiqué : soumis au clan, il a choisi de fuir sa responsabilité pour ne pas être exclu mais s’est rapproché de Torago comme par souci de réparation. Lorsque l’étrangère apparaît, il est tiraillé entre la loi, Torago et ses sentiments d’homme : il commence alors à mentir, cacher, raisonner, à être « corrompu ».

Pour ce qui est du graphisme, le dessin se veut réaliste, le trait assez rond. Une attention particulière est portée à l’environnement, aux éléments de fond, qu’ils soient naturels ou construits. L’auteur s’efforce véritablement de dresser le cadre des évènements avec le plus de précision possible. Les personnages sont, en revanche, un peu stéréotypés et on peut regretter que Torago ait l’air d’une Xéna, princesse guerrière : elle est gigantesque, chasse les oiseaux en se terrant sous la terre et rouste les hommes du clan avec autant de délicatesse qu’un char d’assaut. Il est vrai qu’il était essentiel de marquer le contraste entre les femmes de la nature habituées à travailler et la femme de la ville, plus menue, coquette, délicate. Mais on peut se demander s’il était nécessaire d’exagérer le trait à ce point.

Un ouvrage sur les liens sociaux intéressant mais à réserver à un public averti.

Par KOMORI, le 8 janvier 2007

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