Une prédilection pour Tina

Martin Desseres est un artiste qui s’enfonce dans son art, son quotidien est rempli par ces boulots de commandes, ces pubs, ces dessins « pour les autres », jusqu’au jour ou il reçoit enfin une réponse positive à une demande de bourse, il va pouvoir se consacrer pleinement à ce qu’il aime, la peinture et ainsi préparer une expo érotique.

C’est à ce moment là qu’il rencontre Tina, une jeune femme obèse qui va lui servir de modèle ! Cette Tina commence à l’obséder, pourtant elle n’a rien pour elle, ni la beauté, ni la grace, ni même cette délicatesse hypnotique, non elle se contente de rester là assise à poser !

Mais les choses changent, glissent vers une sorte de relation dominé/dominante, les courbes et le regard de Tina entraînent Martin vers d’étranges « Ondulations » de l’air.

Il se souvient maintenant de cette époque, que lui est il arrivé ?

Par fredgri, le 1 janvier 2001

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3 avis sur Une prédilection pour Tina

« Ripple » ou ondulation, titre de l’album de Dave Cooper, déboule dans le milieu de la bande dessinée en France comme une véritable révélation. Ce titre, plutôt évocateur de poésie, est assez trompeur. En effet, nulle brise ni aucun ricochet sur la surface de l’eau dans ces Ripple..Non, ce qu’on y voit ce sont plutôt des effets de masses graisseuses en mouvement.

Avec cette œuvre audacieuse et caricaturale, Dave Cooper se lance corps et âme dans une description fouillée, modelée, exhibée de l’anatomie adipeuse et laide d’une femme jeune et timide. Et son talent lui permet de dessiner les défauts, les bourrelets, les boutons, provocant instantanément une répulsion.
Mais la force intuitive de ce récit est que, petit à petit, on est subjugué par cet aspect outrancier. La nudité devient un pôle d’attraction irrésistible.
L’image charnelle est charismatique, le sexe fantasmatique, le fantasme paroxystique. Bref on atteint directement le point culminant d’un septième ciel mental.

Plutôt dramatique et psychologique, ce récit agit comme un révélateur. L’évolution des deux personnalités montre comment on peut être révélé à soi-même et comment le goût du sexe désinhibe un tempérament coincé. On joue des rapports classiques sado-maso- cuir et talons et domination. C’est exhibitionniste, voyeuriste, limite culpabilisant.
Ainsi, au fil de l’histoire le lecteur est pris dans un étrange engrenage, plus l’œuvre se veut outrancière plus elle nous absorbe.. de même que le héros-dessinateur qui, voulant mettre en avant l’érotisme de la laideur au travers d’une exposition tombe amoureux de son modèle et en devient l’instrument totalement dépendant.
Etrange également de voir l’inexorable montée en puissance de l’instinct « animal » et de la dépersonnalisation en parallèle.

Le trait se rapprochant de celui de Crumb marque l’aspect méticuleux du travail de Cooper. Tout est assez fabuleux dans cet ouvrage. On est dérangé, certes, mais je classe « Ripple » parmi les travaux d’auteurs dits underground parmi les plus intéressants que j’ai pu lire récemment. Si vous aimez l’humour décalé et si vous aimez l’avant-gardisme en général vous serez comblé. Il faut s’attendre à être dérangé, puis totalement séduit et finalement sous influence.

Sans être dithyrambique, la déclinaison de l’être humain vue sous cet angle me fait l’effet d’un petit chef d’oeuvre. A découvrir.
(Pour public averti)

Par MARIE, le 9 février 2005

« Ripple » traduit le récit principal de « Weasel », une série qu’anima Dave Cooper à partir de 99. Le portrait qu’il dépeint de cet artiste complètement envouté, « possédé » par l’image fantasmagorique de son modèle est aux limites de la cruauté, cet homme s’embourbe dans la melasse de cette passion, ne voit plus rien, subit ses pulsions plus qu’il n’en jouit, insatiable Tina !

Nous suivons donc Martin essayer de réévaluer sa notion de la beauté, essayer de comprendre ce qui lui arrive et surtout plonger dans les plis de cette chair qui l’attire…

C’est un album fascinant qui dérange, on est face à une histoire qui nous entraîne vers des territoires intimistes aux limites du voyeurisme le plus cru et Dave Cooper réussit le pari de ne jamais être veritablement vulgaire. Dans ces scènes, on découvre avant tout deux êtres qui se cherchent, se découvrent et se perdent dans une étrange ronde sexuelle.

Le dessin de Cooper est avant tout un dessin très personnel, très underground, une sorte de mélange entre caricature et réalisme, ses personnages sont grotesques, hyper expressifs, à mille lieux des canons de la beauté habituels, ils sont comme tout un chacun et du coup il se créé une sorte de lien entre lecteur, créateur et créature, je ne parlerais pas d’identification car cette histoire de passion addictive est tellement extrème qu’à aucun moment il n’a été possible de se rapprocher de ces personnages. Malgré tout il se dégage une proximité assez troublante vis à vis de ces » amants » !

Si « Ripple » m’a fait plaisir, c’est principalement parce qu’il signe la première apparition de Cooper en France ! On a un temps avancé son nom pour un éventuel « Donjon Monster », j’espère que les lecteurs français sauront acceuillir cet auteur hors normes qui possède un univers magnifique et complètement décalé.

12,50 € pour 240 pages, très fortement conseillé.

Par FredGri, le 8 février 2005

Si, si ! Je l’avais feuilleté à l’époque où il était sorti. Non, non ! Je n’étais pas allé plus loin qu’une ouverture "pour voir" suivie (très vite) d’une re-fermeture. Ce jour-là, je ne pouvais toujours pas dire de quoi "Ripple" parlait… Et puis vous savez ce que c’est, le temps a passé, et un beau jour je l’ai eu en mains "pour de vrai". Là, chez moi, il n’était plus noyé dans la multitude de titres qui chargeaient les rayons de la librairie. J’étais seul à seul avec cette BD : la lecture pouvait commencer sérieusement. Je dirais seulement, avant de continuer, que "Ripple" semble être le troisième volet d’une trilogie ; je n’ai pas lu les 2 autres tomes mais cette histoire est envisageable comme un one-shot.

Tout d’abord, ma première remarque fut pour ce format rigolo. Un tout petit carré. Comme une toute petite fenêtre au travers laquelle on pourrait épier des gens chez eux, à leur insu. Et c’est bien ce qui s’est passé ! Au travers les pages de cet album, j’ai espionné Martin et Tina. Ces derniers sont les héros (principaux) de cette histoire. Mais ce ne sont pas des héros qui se montrent. Ce sont des héros qui vivent pour eux, sans savoir qu’on les regarde. Ils perdent alors toute notion du "qu’en-dira-t-on" et devant nos yeux ahuris vivent une tranche de vie pour le moins surprenante.

Ca part d’une simple idée : Martin veut dessiner l’érotisme de la laideur. Cette idée aurait pu ne pas dépasser les murs de la maison et de la cervelle de Martin, mais c’est ensuite renforcé par l’acceptation de Tina de lui servir de modèle. Tina… Tout un poème, celle-là, hein ?! Puis l’idée germe et, avec elle, un vent d’amour et de liberté éhontés se lève. On rentre dans le vif (j’allais dire dans le gras) du sujet. Que je vous laisse découvrir. Deux êtres se trouvent et se découvrent.

Cet album dérange. Un code-couleurs est utilisé que je n’ai pas forcément pris le temps de déchiffrer tant j’ai été happé par cette lecture. Le dessin est assez grossier, crade : des traits fouillis, des brouillons sophistiqués… Le tout pour une œuvre bien spéciale, mais très forte.

Et puis j’ai refermé l’album. J’ai refermé la petite fenêtre, laissant Martin et Tina après avoir assisté à leur intemporelle fusion. Content de ne pas en voir plus, car on en avait vu déjà pas mal, ça c’est sûr, mais aussi content de me confirmer que la bande dessinée reste un lieu d’expression très libre où s’expriment des idées qui n’auraient eu leur place nulle part ailleurs. Est-ce une biographie, un reportage ? Une fiction ? Pourquoi Dave Cooper a-t-il voulu aborder tout cela, et comme ça (Bon, j’avoue, je ne connais rien d’autre de cet auteur – il y a peut-être des pistes à suivre dans le reste de son oeuvre pour mieux comprendre) ? Est-ce un pari qu’il a fait ? Bref, c’est tout ça à la fois. C’est curieux. C’est surprenant. Et on n’en ressort pas indemne.

Par Sylvestre, le 14 décembre 2005

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