REVUE DESSINÉE (LA)
Automne 2014

Dans ce nouveau numéro l’équipe de La Revue Dessinée s’intéresse, entre autre, à l’affaire du juge Renaud et par la même au gang des lyonnais et des membres du SAC qui dans les années 70 imposaient leurs lois dans la région. Elle s’intéresse ensuite à l’Écosse et sa volonté de s’émanciper de l’autorité du Royaume Uni ! On se tourne ensuite vers le phénomène de la mobilité ouvrière, avec ces travailleurs obligés de partir loin de chez eux pour bosser, quitte ensuite à vivre en communauté, entre collègues ! Puis il nous est expliqué ce que sont les emprunts toxiques et en quoi ils mettent en péril l’économie de crise…

Par fredgri, le 14 septembre 2014

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Notre avis sur REVUE DESSINÉE (LA) #5 – Automne 2014

Plus on avance au fil des numéros plus il apparait important d’avoir un outil d’actualité du calibre de La Revue Dessinée, qui propose un regard sur l’actualité (Ici l’Ecosse, les ouvriers, les emprunts…), qui revient en arrière pour expliquer ou commenter (L’affaire du juge Renaud, les rubriques ciné, musique, informatique) ou qui met en avant des points de culture, des artistes (la syntaxe, Pierre Etaix…)
Ainsi, La Revue expose le travail de sa rédaction, un travail documenté, réfléchit, ou deux personnalités (un journaliste et un artiste) se sont groupées pour présenter un reportage pertinent et passionnant !

Au centre de ce nouveau numéro, on trouve donc l’incroyable enquête menée par Benoît Collombat et Etienne Davodeau. 64 pages ou les deux "journalistes" reviennent sur les traces de ce juge hors du commun, intransigeant et incorruptible, qui fit trembler à la fois la pègre et les forces du SAC (Service d’Action Civique) plus ou moins impliquées dans le retentissant hold-up de Strasbourg en juin 71, qui aurait certainement servi à financer des partis politiques… Ce reportage s’appuie principalement sur des rencontres, des témoignages, on découvre progressivement l’envers du décor, cette société lyonnaise des années 70 qui ressemblait à une guerre des gangs digne de Chicago. On glisse dans l’affaire, on entre dans des dossiers sensibles, c’est émouvant, effrayant, indignant, car très vite se reflète le portrait d’une justice qui n’a pas fait son boulot, qui s’est laissée corrompre par une époque, par une situation qui dérape, plutôt que de soutenir la mémoire d’un homme qui se positionnait en dehors des clous, avec intégrité !
La présentation sous forme d’une série d’entretien est d’autant plus fascinante qu’on passe par le filtre de l’émotion tout en gardant la dimension informative extrêmement riche et foisonnante. Les auteurs décortiquent devant nous tout les éléments du dossier, reviennent sur certaines incohérences, sur les positionnements des uns et des autres, recadrent l’affaire dans son contexte. Du vrai travail d’investigation, fascinant voyage dans le temps qui montre bien l’exigence de La Revue et de ses collaborateurs !
Davodeau, toujours fidèle à lui même, nous livre des planches magnifiques qui nous renvoient vers ses albums témoignage comme Les Ignorants, Rural… Il y a de la douceur dans ses portraits, mais aussi une sorte de réalisme cru très agréable !

Toutefois, il ne faut pas non plus occulter le reste du numéro, qui mérite amplement la lecture.
Après tout, le reportage sur l’Ecosse, sur sa volonté d’indépendance, de s’en sortir seule et gérer elle même sa propre économie est des plus intéressants aussi ! Les auteurs, Olivier Hensgen et Daniel Casanave, décortiquent eux aussi la situation, abordent touts les aspects du problème, qu’ils soient politiques, économiques ou culturels, il est important de bien comprendre que la situation est réellement plus complexe, qu’il ne s’agit pas ici uniquement d’une pirouette d’un parti qui monte dans les suffrages !

Mais au milieu de ces enquêtes on retrouve le maestro Carlos Nine qui nous parle d’un artiste qu’il admire, Pierre Etaix, l’illustrateur, le clown, le réalisateur, le musicien, cet homme aux multiples talents qui côtoya Tati, Carrière… qui marqua son époque par la richesse de son talent. Nine rend donc hommage à l’oeuvre et à l’homme qui s’y révèle. Nous découvrons avec lui cet Art. Néanmoins, même si j’adore littéralement le style de Nine je regrette qu’il n’ai pas laissé plus de côté son propre art afin de mettre en scène le travail d’Etaix que l’on n’aperçoit finalement que très peu.
Ne boudons malgré tout pas trop le bonheur de se régaler de ces 20 pages de Nine qui font indubitablement partie des grands plaisir de ce numéro (avec aussi le mini portfolio De Crécy !!!)

J’aimerais aussi souligner que La Revue Dessinée n’est pas "simplement" une suite "d’enquêtes, reportages et documentaires en bande dessinée", qu’on y trouve aussi des rubriques tout aussi passionnantes, comme cette très instructive histoire de l’informatique par Bourhis, cet hommage au chanteur musicien Daniel Johnston par Le Gouëfflec et Moog, les deux études de cas qui s’arrêtent sur une scène du film "Le cabinet du Dr Caligari" et sur la célèbre photo de la place Tian’Anmen… Deux façons de regarder un instant qui porte un message, de disserter sur la valeur de l’image, sur ce qu’elle peut véhiculer.
Ces deux petites rubriques s`reviennent donc sur un rôle important de La Revue, cette fonction de témoin qui se propose de préciser le monde qui nous entoure en analysant aussi ce qui nous est montré, en approfondissant cette dimension de l’image qui nous entoure !

Une nouvelle fois La Revue Dessinée reste un acteur qui s’impose dans le paysage de la bande dessinée d’actualité, une bande dessinée qui se découvre actuellement de nouveaux champs d’action, une démarche devenue possible grâce a des gens comme Davodeau, Sacco, Kris etc.

Nécessaire et important !

Par FredGri, le 14 septembre 2014

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