RETOUR DE DORIAN GRAY (LE)
Le sacre d’Invisible 1er

Le Londres du début du 20ème vit sous la menace d’un malandrin qui est l’origine de rapines des plus osées et pour cause, il est invisible. Dans ce climat d’inquiétude générale que tente d’amenuiser la gent policière, un vieil homme au visage émacié, transportant avec lui un rouleau contenant son propre portrait en peinture, est recueilli par Phillis Appelton, une jeune suffragette de souche bourgeoise pour le moins émancipée. Possédant un physique peu ragoûtant, il n’en demeure pas moins que le vieil homme intrigue la jeune fille qui ne tarde pas à lui témoigner une compassion revigorante. Qui est-il réellement ? Quelle est cette particularité extraordinaire qui le lie à son portrait ? Par ce biais, pourrait-il, grâce à lui et à certaines concessions sanglantes, retrouver sa physionomie d’antan ? Dorian Gray, car tel est son nom, a recouvré l’espoir !

 

Par phibes, le 18 janvier 2012

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Notre avis sur RETOUR DE DORIAN GRAY (LE) #1 – Le sacre d’Invisible 1er

Cette nouvelle aventure qui intègre la collection 1800 en même temps que celle de L’Ours-Lune, se veut être, à l’image de Mister Hyde contre Frankenstein de Dobbs et Marinetti, un mix adapté de deux œuvres littéraires publiées à la fin du 19ème, l’une d’Oscar Wilde intitulée Le portrait de Dorian Gray et l’autre de H.G. Wells titrée L’homme invisible. A la manœuvre, se trouve Stéphane Betbeder, scénariste reconnu pour ses productions aux accents fantastiques telles Bunker, Alister Kayne, Sanctuaire Redux

Ce premier opus nous plonge dans les ambiances victoriennes du début du 20ème, ambiances malaisées par la misère qui grève la cité de Londres. Dans cette décadence sociale environnante, deux hommes et une femme sont appelés à se croiser. Tout d’abord, Dorian Gray, personnage marqué par le temps, porteur d’un objet pour le moins fantastique, son portrait en peinture. Ensuite, la sémillante Phillis Appelton, fille de famille aisée, suffragette patentée, qui va éveiller l’espoir de Dorian. Enfin, vient l’homme à l’aspect hideux qui s’autoproclame représentant de la caste ouvrière manifestante et qui, par sa noirceur d’âme, va servir le dessein de Dorian.

Stéphane Betbeder gère remarquablement et originalement son récit en donnant, en quelque sorte, une suite au roman d’Oscar Wilde. Ressuscitant ce personnage emblématique et faisant perdurer le lien atypique qu’il entretient avec un portrait de sa jeunesse, ce tome place avantageusement les bases d’une intrigue susurrée habilement ici par la "renaissance psychologique" et très partiellement physique de Dorian, et qui devrait prendre toute sa puissance dans l’album prochain. A cet égard, chaque personnage revêt un caractère bien tranché, prouvant ainsi que l’auteur a souhaité instaurer entre chacun d’eux une franche démarcation. Par ailleurs, on ne pourra qu’apprécier le travail historique admirable du scénariste qui sert de cadre à son récit, un cadre solide qui campe avec brio l’état sociétal d’une cité en déliquescence, aux couches sociales bien prononcées.

C’est Bojan Vukic qui assure la partie graphique. Fidèle à la collection 1800 (ce dernier est intervenu récemment dans le diptyque Les grands Anciens avec Jean-Marc Lainé), ce dessinateur démontre une fois de plus qu’il a du talent et qu’il sait le distiller au moyen d’un geste rigoureux, adroit, plein d’authenticité. Londres, sous sa plume acérée, est superbement restituée dans sa vision victorienne, animée de personnages emplis de symbolique. Par ailleurs, l’artiste sait faire naître l’angoisse, la traduisant par des aplats de noirs conséquents et par l’évocation d’une certaine violence voire horreur personnifiées.

Un très bon début d’adaptation littéraire, portée par un mélange hardi et des élans fantastiques bien entreprenants.

 

Par Phibes, le 18 janvier 2012

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