REALITY SHOW
Total Audimat

Gullick est un patron décidément sans scrupules. Grâce à son casque qui transmet les émotions d’Oshii, il est sur le point de convaincre la commission chargée de la censure à la télévision. Il est vrai qu’il a des ingrédients rêvés pour y parvenir. Oshii vient de retrouver son frère raciste, ses parents paumés, un amoureux qu’elle n’avait jamais oublié et elle s’apprête à sauver la fille du maire, prise en otage par un mouvement fasciste, le tout sur fond de haines religieuses. Avouez que, quand on dirige une chaine de téléréalité, le programme fait rêver !

Par legoffe, le 1 janvier 2001

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Notre avis sur REALITY SHOW #5 – Total Audimat

Attendez vous à beaucoup de surprises dans ce nouveau tome de Reality Show. Le premier est sur la couverture. Une étiquette qui vous annonce qu’il s’agit de la fin de la série. « Déjà ?!? » diront les fans comme moi avec une pointe de déception, mais aussi une furieuse envie de se ruer sur le livre pour en connaître l’épilogue.

Nous voici donc arrivés au bout d’une aventure trépidante, qui dénonce avec originalité la téléréalité sur fond d’enquêtes policières toujours bien trouvées et teintées de fantastique. Alors, on frémit. On se demande si la fin sera à la hauteur du plaisir que l’on a pris jusque là. Nous voilà déjà manipulés, accrochés par ce petit autocollant. « La fin, ils ont bien osé écrire la fin ? » se dit-on encore.
Chez Dargaud, on reprend le scénario. Le patron sourit en se disant que le coup est bon, que le lecteur va se ruer sur l’album, que les bénéfices vont grimper. En patron cynique, il n’espère qu’une chose après ça : qu’un fan prenne Morvan en otage pour le faire renoncer au sacrilège. Ca serait bon, ça, une prise d’otage à Angoulême…

Morvan, lui, pense déjà à son prochain voyage au Japon, à ses innombrables scénarii en route, au destin décidément complexe de sa belle Nävis. Il se dit qu’il fallait bien la finir cette série et qu’il a bien eu les lecteurs, qu’il fallait être culoté pour terminer ça comme ça. Ouais, fallait oser qu’il se dit avec un rire cynique. Il ne voit pas le coup venir. Celui de Porcel, bien décidé à l’obliger à continuer. Il est malin Porcel, il ne s’est pas inscrit sur la liste des auteurs Delcourt présents à Angoulême. Lui aussi prépare son plan. Morvan, il doit se douter de rien.
Et puis, ça fera une bonne histoire, se dit Dargaud. Un lecteur fou, un dessinateur revanchard ; deux adversaires, un même dessein… Il est pas rendu Morvan, ça non. Parce que là, on va vraiment lui faire revoir sa copie. Oui, il a été culoté le gars. Un poil trop peut être. Non seulement on veut pas voir tout ça se terminer, mais on a pas non plus envie que ça finisse comme ça. Original oui, mais pas trépidant. Gullick fait ce qu’il veut dans son coin, mais le lecteur rêve d’autre chose qu’une voix off et d’un scénario déroulé hors champs. Cela fait retomber un suspense jusque là grandiose. La fin, on la veut prise aux tripes, comme d’habitude, pas regardée à travers l’écran de télé. Pourtant ça paraît logique tout ça, comme la "morale" finale. Mais non, ça ne sonne pas totalement juste. La réalité glisse sur la fiction et le jeu jusqu’au-boutiste s’avère un peu casse-gueule. D’un point de vue conceptuel, c’est gonflé ; d’un point de vue suspense, ça perd en rythme.

Nous autres, lecteurs, sommes avides de ces personnages, de ces intrigues géniales. On veut encore du suspense et de l’émotion. Nous voulons trembler pour savoir si la fille du maire sera sauvée et jouer les voyeurs pour savoir si Oshii fera son choix entre son coéquipier et son ancien amoureux. Oui, nous sommes faibles ; oui nous sommes victimes du système. Alors, monsieur l’éditeur, faite votre boulot et le plein de cynisme. Je suis sûr que vous n’aurez pas besoin de la Matrice pour avoir le numéro de la chambre d’hôtel de Morvan fin janvier. Il ne vous reste donc plus qu’à donner l’info à Porcel et à un lecteur orphelin. Après, vous verrez, tout rentrera dans l’ordre : nous serons encore accros pour quelques albums et la prise d’otage vous fera une publicité qui fera exploser des ventes déjà coquettes. Bon, on est d’accord hein ? Chiche ?

Par Legoffe, le 11 janvier 2009

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