Quand vous pensiez que j’étais mort. Mon quotidien dans le coma

Matthieu a bien failli y passer… Fin avril 2002, le jour des deux ans de sa fille Jeanne, il est victime d’une violente attaque cérébrale. Les maux de tête terribles, son corps qui convulse et qui se tord, les nausées et les vomissements le conduisent d’urgence à l’hôpital où il tombe dans le coma avant d’être opéré d’une tumeur au cerveau. Mais cette première expérience de la mort n’est que le commencement du voyage, le premier round du combat qui s’annonce à sa sortie du coma quelques semaines plus tard.

Dans un récit à la première personne, Matthieu Blanchin arrache le lecteur à sa confortable réalité pour l’embarquer dans ce qui sera son quotidien pour plusieurs années : une quête de soi aussi éreintante que vibrante pour tenter d’apprivoiser son corps, de comprendre son esprit, et de réapprendre à vivre.

Par Anaïs, le 10 mars 2015

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Notre avis sur Quand vous pensiez que j’étais mort. Mon quotidien dans le coma

De loin la plus personnelle de ses bandes dessinées, Quand vous pensiez que j’étais mort. Mon quotidien dans le coma publié aux éditions Futuropolis propose une autobiographie quelque peu hors norme de Matthieu Blanchin. Pas véritablement un récit de sa vie, elle relate son passage (temporaire) de l’autre côté, dans la mort clinique -arrêt du cœur et coma- puis dans la mort sociale -une nouvelle existence évidée d’envies, de projets dessinés qui caractérisaient sa vie d’avant-, avant sa renaissance au bout d’un long cheminement personnel.

Le dessin d’Anubis, divinité égyptienne de la mort, en page titre donne dès le départ le ton de l’histoire : un entre-deux brumeux entre vie et mort, rêve et réalité, angoisse et calme.
D’une grande intensité narrative, les planches décrivant les douleurs physiques provoquées par la première attaque cérébrale projettent le lecteur dans un monde parallèle déroutant, délirant et terrifiant habité par un étrange et monstrueux bestiaire fait de corbeaux, de fourmis géantes, de squelettes, de machineries infernales qui broient l’auteur, le dévorent, le morcellent, le martyrisent. Véritable plongée dans son psychisme et ses entrailles, cette mise en scène très riche de son monde intérieur rend compte avec un symbolisme quasi-documentaire des expériences sensorielles vécues et de sa lutte interne pour la vie.

Parfois un peu complexes à lire par leur densité, leur noirceur, voire leur surréalisme, ces planches doivent être abordées par le lecteur -comme Matthieu a été contraint de le faire- dans un total lâcher prise des repères de la rationalité rassurante qui donne un sens à tout pour tenter de percevoir les sensations, ressentir les émotions, davantage que de chercher à comprendre tout les éléments.

A côté de ces figures irréelles, une batterie de personnages réels (neurologues, homéopathe, ostéopathe, psychanalyste, famille) l’accompagnent pour le soigner, l’épauler, le faire réfléchir, se souvenir. Dans ce sens, le caractère délié, parfois flou du dessin -et de la typo, un véritable élément graphique- sert bien le propos comme s’il rendait compte de ce difficile chemin de la remémoration, du travail analytique, en même temps que de son urgence et de sa nécessité pour mettre les choses à leur place, dans le passé.

Un témoignage puissant de près de 200 pages pour se souvenir et enfin tourner la page.

Par Anaïs, le 10 mars 2015

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