Prison d'ébène

Au XXIème siècle dans les rues de Nantes, Lucien, un vagabond, croise la route d’Ernest. Ce vieillard est issu d’une longue lignée de négriers qui, depuis une négociation frauduleuse avec un puissant sorcier vaudou au XVIIIème siècle, sont poursuivis par une malédiction.

Quand Ernest propose d’héberger Lucien dans cette vieille bâtisse du centre-ville, ce dernier, loin de se douter du sort, accepte. Il commence même à flirter avec la voisine. C’est alors que la malédiction refait surface, incarnée par un serveur de bar aux mystérieux rituels. Mais la magie vaudou se trompe de cible…

Par geoffrey, le 1 mai 2015

Notre avis sur Prison d’ébène

On croit d’abord que l’auteur utilise un calame pour faire naître un dessin si sombre. Puis les vagues sur lesquelles naviguent les bateaux des négriers se forment, se creusent dans l’encre de chine et les renversent sous les coups de pinceau. De nouveaux paysages naissent ensuite, îles, villes et les rues du Nantes d’aujourd’hui.

Sylvain Combrouze, dont Prison d’ébène est la première BD, réussit à nous plonger dans une histoire joliment brodée et savamment tressée à partir d’un fond historique et d’une mystique incarnée par la magie noire vaudou. Amour, haine, rencontre, filiation, hasard, magie… Il utilise les ingrédients d’un récit au charme ensorceleur. Tout se déroule pourtant sans un mot. Les naufragés restent muets. Tout comme les esclaves noirs enlevés, la magie invoquée, le serveur dans le quartier du Bouffay ou le vagabond. Ce parti pris laisse le lecteur cheminer sur sa propre voie. Le récit offre ainsi plusieurs interprétations, là où les mots donneraient un cadre plus contraint, un charme sans doute moins puissant.

L’auteur compose une atmosphère sombre, violente, mais pas seulement. Il fait surgir des clairs-obscurs et même des impasses devant les personnages que l’on croit principaux. Ils ne sont en fait que des passeurs, au mieux des observateurs d’un récit plus grand qu’eux écartelé entre deux époques lointaines, le XVIIIème et le XXIème siècle (bien différenciées grâce à la présence d’une couleur "ébène"), dont les résonances resserrent les fils d’une seule et même trame.

Des sentiments sans mot, des maux plus anciens que le livre et un récit rythmé tissent la toile de cette Prison d’ébène. Quelque chose d’intimiste, tout en retenu et équilibre se met en place à la lecture et déferle au fil des pages que l’on tourne irrésistiblement.

Par Geoffrey, le 1 mai 2015

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