PRINTEMPS REFLEURIRA (LE)
Premier livre

Cracovie, 1919. Un jeune artiste peintre, Alfred Prinz, s’apprête à quitter la ville pour rejoindre Dresde, en Allemagne, afin de trouver du travail. Il sait qu’il n’a guère d’avenir dans la peinture. Ses amis de l’école d’art lui font une belle fête de départ, qu’il termine dans les bras d’un modèle, la belle Magdalena.

Bien des années plus tard, alors que l’Allemagne vit la montée du nazisme, Alfred apprend par un ami que Magdalena a eu un enfant et qu’il pourrait bien s’agir du sien. La nouvelle le bouleverse. Il finit par franchir le pas et à prendre le train pour retrouver cette femme et son enfant. Une occasion aussi de fuir le régime nazi et l’antisémitisme. Il n’oublie pas, en effet, que son père était juif. Mais, au cour du voyage, le train est bloqué en pleine forêt par un arbre qui s’est effondré sur les rails. L’attente devient vite oppressante.

Par legoffe, le 16 février 2010

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Notre avis sur PRINTEMPS REFLEURIRA (LE) #1 – Premier livre

Toute société en crise cherche de nouveaux repères, des idéaux, des voies nouvelles. L’avènement du totalitarisme, dans les années 1930, en est un des plus terribles exemples. Cette époque, comme le rappelle l’auteur, vit aussi la naissance d’autres mouvements. Une preuve, s’il en était besoin, de l’indéfectible doute, de la peur, qui perturbaient l’inconscient des hommes au point de remettre en question des notions aussi précieuses que la liberté.

Johanna s’interroge inlassablement sur ce qui fait la fragilité de ces hommes et de nos sociétés. Le choix d’un récit s’installant dans la montée du nazisme est, dès lors, assez naturel. Sa forme, en revanche, est des plus inattendues. L’auteur choisit d’accompagner un ancien artiste peintre qui, la quarantaine approchant, va remonter vers les terres de son passé, autant pour y voir le visage d’un avenir souriant (son fils) que pour fuir celui d’un avenir de mort (l’antisémitisme grandissant de l’Allemagne). Mais le voyage s’arrête soudain dans une forêt, train bloqué, mais filant – au dehors – à pleine peur. Ou, tout au moins à pleines angoisses. Lorsque la marche du destin s’arrête, les gens prennent le temps de s’interroger et de chercher des réponses qu’ils ne sont pas toujours en mesure de trouver.

Le livre est riche de symboliques qui laissent imaginer l’implication de l’auteur dans son livre et son travail de fond, impressionnant. Le titre, d’ailleurs, est issu lui-même du “chant des déportés” composé en 1933 par les prisonniers du camp de concentration de Börgermoor (Basse Saxe).

Les personnages sont nombreux et très divers. En effet, si l’auteur met l’accent sur Alfred, il instaure une importante galerie de seconds rôles, eux aussi coincés dans cette forêt. L’ambiance y est étrange et la tension monte inlassablement. La présence des SS n’en est pas la seule explication. Visiblement, Alfred, comme d’autres, ont quelques pans de passé à dissimuler. Beaucoup de questions sont posées, discrètement. Reste que nous n’en connaissons pas encore les réponses et qu’il nous faudra attendre le prochain tome pour cela.

Johanna nous offre un récit très déroutant, servi par des planches superbes, dotées de dessins d’une grande force. Leurs traits sont d’une étonnante vivacité, sans doute pour nous perdre un peu plus dans les méandres de l’esprit humain et de ses indicibles angoisses. Un récit à aborder de façon humble sous peine de le rejeter, lui et ses tourments.

Par Legoffe, le 16 février 2010

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