Pacifique

Pendant la seconde guerre mondiale, dans le Pacifique, le jeune Udo Grothendieck embarque à bord d’un U-Boat allemand. Il découvre alors l’ambiance à bord, la tension, mais aussi les règles de vie auxquelels il va devoir obéir dorénavant. Dans son maigre "bagage" on trouve un livre mystérieux. Udo ne l’a jamais vu auparavant, néanmoins l’équipage lui apprend que de telle lectures ne sont pas admises à bord, qu’il faut rapidement s’en débarrasser. Mais, à chaque fois, le livre revient, se multiplie, obsédant de plus en plus les hommes qui finissent par le lire un par un…

Par fredgri, le 17 mai 2013

Notre avis sur Pacifique

Attention, avant de lire cet avis, sachez que certains éléments de la fin sont dévoilés au détour de l’argumentaire. Vous êtes prévenus !

"Pacifique" commence comme un récit de guerre assez classique, un jeune radio est engagé à bord d’un sous-marin allemand, les premières brimades, un capitaine mystérieux et autoritaire, les liens qui se renforcent avec quelques compagnons de route. Puis les auteurs glissent, sans en avoir l’air, une légère pointe mystérieuse avec un livre dont il est impossible de se débarrasser et qui finit même par se multiplier, faisant basculer le récit vers une sorte de fantastique poétique qui interpelle très vite le lecteur.

L’album, en format italien est mené de main de maitre par un jeune duo d’artistes qui se partage le scénario et le dessin, auteurs interchangeables qui mélangent leur style, leur personnalité, qui créent un tout très homogène et efficace. L’histoire est très adroitement mise en scène avec un vrai sens du rythme, de l’image et de la planche dans son ensemble. De plus, ce format horizontal met très intelligemment en avant cette idée oppressante du sous-marin, tout en longueur, avec une mise en couleur jonglant sur ces espaces clos éclairés avec des lanternes, et mettant en valeur un dessin très minutieux tout en gardant une stylisation très moderne et fraîche !

Le récit est partagé en deux.
Tout d’abord on a le récit de guerre assez classique, la vie des marins, les attaques ennemis. On se rend compte que ce microcosme vit sur le fil du rasoir, avec beaucoup de promiscuité, mais aussi un bel esprit de corps. Le jeune Udo qui ne connait finalement pas grand chose d’autre que sa radio, va donc évoluer au fur et à mesure de l’avancée de l’histoire et gagner en texture, son caractère se forge, cette aventure s’annonce comme formatrice. D’autant qu’on entre progressivement dans la seconde partie de l’intrigue, celle qui nous entraine lentement vers une ambiance plus irréelle, plus étrange.

Et les auteurs ne donnent pas de pistes en trop, laissant le lecteur interpréter ce qu’il lit.
On commence par se demander ce que signifie ce livre, quel est son titre, pour petit à petit se rendre compte que ça n’a pas réellement d’importance, ce qui en a c’est l’idée qu’il représente, cette promesse d’une évasion, d’une "vie meilleure", qu’il existe autre chose autre part, loin de cette réalité guerrière dans laquelle ils pataugent à longueur de journée. A l’issue d’une mission particulièrement éprouvante, ils apprennent ainsi que ce conflit est terminé pour eux, que la "guerre" est finie, c’est la fin de la mission qui n’a donc plus de substance. Il y a toujours cette idée d’un après, et les hommes décident de "suivre le courant" pour aller découvrir cette île ou toutes les épaves finissent par échouer.
La fin reste malgré tout mystérieuse, car il n’y a pas de vraies explications. Personnellement, je trouve que c’est très bien comme ça, de laisser libre court aux regard des uns et des autres. Même si, à mes yeux, le basculement du récit réaliste vers le fantastique marque bien le passage à un aspect plus symbolique de l’intrigue, à quelque chose de moins littérale de plus ambigüe.
D’ailleurs cette transition est assez finement amenée avec cette histoire de livre qui tourne à l’obsession.

Une très très belle découverte qui nous permet de rencontrer deux nouveaux auteurs à suivre très attentivement, Martin Trystram et Romain Baudy sont des noms qu’il ne faudra pas oublier !
En attendant lisez absolument ce très bel album !

Par FredGri, le 17 mai 2013

Publicité