Otomi

Deux récits sont à découvrir dans ce livre :

La chasteté d’Otomi :

Dans un village japonais évacué en prévision d’une attaque, un homme rôde et finit, poussé par une pluie battante, par pénétrer dans une maison qui n’est pas la sienne. Quelle n’est donc pas sa surprise lorsqu’une habitante des lieux arrive quelques instants plus tard ! C’est Otomi, une fidèle servante de la propriétaire des lieux. Elle est venue, au mépris du danger de l’attaque imminente, rechercher Miké, un chat sans qui sa patronne était partie. Se retrouvant seul avec Otomi, l’homme a vite voulu profiter de la situation pour tenter de posséder Otomi…

Le martyr :

Un tout petit enfant abandonné a été recueilli par les prêtres de la mission catholique Santa Lucia, à Nagasaki. Baptisé Lorenzo, il va être éduqué sur place et montrer au fil des ans une ferveur à la prière et à la vie religieuse sans pareilles. Quelques années plus tard, soupçonné de cacher une relation amoureuse avec une paroissienne, il va être exclus de sa communauté de Santa Lucia et se retrouver à la rue comme un pêcheur infidèle, comme un moins que rien…
 

Par sylvestre, le 1 janvier 2001

Notre avis sur Otomi

Adaptés de contes du Japonais Ryûnosuke Akutagawa (1892-1927) comme c’était déjà le cas avec Rashômon également aux éditions Les Enfants Rouges, les deux récits rassemblés dans Otomi mettent une fois de plus en lumière le talent dont ont su faire preuve le scénariste Mk. Deville et le dessinateur Philippe Nicloux en s’appropriant les textes et en les traduisant en images avec une très grande sensibilité.

Ces deux histoires parviennent en effet à émouvoir vraiment et ce pouvoir qu’elles ont sur le lecteur trouve peut-être son explication dans la manière avec laquelle les auteurs ont abordé leur travail d’adaptation. On observe par exemple un style de découpage et une narration qui répondent à des codes chers à la bande dessinée asiatique. La scène initiale et interminable de la pluie qui tombe sur le village d’Otomi et de Shinko en est une illustration : la distorsion du temps… Les successions de plans orientés tous dans une direction différente (six, soit un par case, en page 31) en est une autre : découpages acrobatiques des scènes d’action… Le fait que les planches soient en noir et blanc pousse à comparer au manga, aussi. Et pourtant… Pourtant on ne se risquera pas à parler de manga, cet ouvrage pouvant aussi souffrir de la comparaison avec d’excellentes réalisations comme on en trouve au catalogue de prestigieuses collections comme Ecritures, chez Casterman.

La superbe couverture d’Otomi ne manquera pas de vous attirer l’œil. Même s’il est vrai que son visuel est un tantinet racoleur, il ne trompe pas pour autant sur la marchandise et la lecture des deux récits, si agréable et si touchante, finira de toutes façons par vous séduire en chatouillant chez vous d’autres sentiments que celui qui a brillé dans vos yeux et traversé l’esprit du clochard Shinkô alors qu’il était "seul au monde" avec la dévouée servante qui a donné son nom à ce recueil !

Les deux histoires m’ont plu. La première est pour ainsi dire le portrait d’une femme d’honneur. La seconde, autrement plus dramatique, aura au final eu ma préférence. Est-ce parce que son casting rapprochait plus son contexte de notre culture européenne ? Ou bien est-ce parce que ce récit, une fois après avoir dévoilé ses secrets, pousse le lecteur à le parcourir à nouveau avec d’autres yeux ?

N’hésitez pas à vous procurer Otomi. C’est un excellent ouvrage à découvrir aux éditions Les Enfants Rouges.
 

Par Sylvestre, le 18 mars 2009

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