ORACLE
Le malformé

A la suite d’une traversée difficile, le navire marchand transportant Homère et son vieux compagnon aveugle, l’oracle, aborde la grève proche de Corinthe. Les deux hommes sont accompagnés par un individu qui revient en la cité grecque après une très longue absence. Afin de comprendre sa destinée, ce dernier interroge l’oracle. Celle-ci étant, semble-t-il, liée à un nommé Melos, le vieil aveugle entreprend de lui conter son histoire funeste qui commence au moment où, de par sa beauté physique, la déesse Aphrodite tombe sous le charme du jeune homme. Jaloux, Apollon s’en prend à Melos au point de le transformer en un être bossu et d’une laideur insoutenable. Rejeté par tous et totalement désespéré par ce qu’il lui arrive, le malformé part se réfugier en pleine forêt. C’est alors qu’il rencontre Thesmodion le satyre et les ménades qui l’accompagnent dans ses longs moments de jouissances. Subjugués par la succulence des mets qui lui sont servis, Melos entrevoit l’occasion de regagner le cœur d’Aphrodite malgré son apparence hideuse et ainsi de se venger du mauvais sort d’Apollon. Aussi, demande-t-il au satyre de l’initier à l’art culinaire.

Par phibes, le 13 octobre 2014

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Notre avis sur ORACLE #4 – Le malformé

Le duo représenté par le vieil oracle et Homère qui s’est formé lors de leur rencontre dans le premier opus (voir La Physis) se reconstitue dans ce quatrième épisode qui nous permet d’appréhender une nouvelle histoire d’une vengeance d’un mortel sur le cercle divin. A cet égard, c’est au tour de Patrice Lesparre et Nicolas Demare d’intégrer la série concept initiée par Jean-Luc Istin et de nous narrer la dramatique destinée de celui que l’on surnomme Le malformé.

Force est de constater que ce nouveau volet ne dépareille pas des précédents tant sa teneur reste d’une densité toujours aussi appétissante. Ici, par la voix du conteur habituel, l’oracle aveugle, le lecteur pénètre dans les ambiances d’une tragédie grecque ô combien vibrante, dans laquelle hommes et êtres mythiques se croisent et se décroisent sans se faire réellement de cadeau.

Patrice Lesparre mène de façon bien inspirée son intrigue historique qui a le mérite de lier deux destinées bien précises, celle d’un mystérieux individu qui se déclare dès le départ de l’aventure à l’oracle et celle de Melos, dit le malformé. Si l’histoire du premier reste nébuleuse jusqu’à la fin, la deuxième trouve le temps de s’installer et de se démouler dans des accents pour le moins sombres. Passé sous les fourches caudines du dieu Apollon et privé de son pouvoir de séduction, Melos nous dévoile donc son parcours porté par une douleur et une soif d’amour perceptibles. Son cheminement épicé ne manque pas de surprises puisqu’il est associé à la rencontre d’êtres fabuleux tels Thesmodion le satyre, les ménades et autres qui apporteront une certaine légèreté, une jouissance enivrante, rapidement muselées par les agissements fous du bossu passionné. A ce titre, Patrice Lesparre ne manque pas d’interpeller avantageusement en basculant, à partir de cet instant, son récit dans des dimensions horrifiques pour le moins impressionnantes, générant au passage de nouvelles effusions divines imparables.

Remarquable illustrateur qui a pu prouver son talent sur de nombreuses couvertures d’albums (Le sang du dragon, Hannibal Mériadec, Triskell…), Nicolas Demare reste dans des dispositions artistiques de grande qualité. Ce dernier met en avant des décors vraiment somptueux (la grande forêt, les vues panoramiques d’extérieurs…) mis en relief par une recherche du détail bluffante et une colorisation harmonieuse de Digikore Studio. Au niveau des personnages, là-aussi, on ne peut que saluer le travail méticuleux de ce dessinateur qui joue parfaitement sur l’onirisme de certains, sur leurs proportions physiques (entre beauté et laideur) et leurs expressions.

Une nouvelle histoire complète qui allie drame et mythologie grecque dans toute sa splendeur. Un excellent moment de lecture !

Par Phibes, le 13 octobre 2014

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