Natures mortes

Lors d’un après-midi de l’année 1939, le peintre Joaquin Mir s’appuie sur le modèle féminin qu’il a loué pour exécuter un portrait. Malheureusement, le cœur n’y est pas, si bien que l’artiste décide de suspendre la séance. En effet, cela fait juste quarante ans que son ami, Vidal Balaguer, lui-même peintre sans renom, a disparu et son absence énigmatique continue à l’affecter. Aussi, devant l’intérêt de la jeune modèle, le peintre prend le parti de lui narrer sa relation avec ce personnage atypique qui vécut au siècle dernier. A cette époque où le progrès côtoie les sciences et les arts, cet artiste au talent reconnu par ses pairs croule sous les dettes et est poursuivi par ses créanciers. Profondément marqué par la disparition mystérieuse de Mar, sa muse, il ne peut se résoudre à vendre à un acheteur potentiel le tableau qui le relie à son inspiratrice. Incompris par ses amis, Vidal Balaguer se retrouve seul à son domicile et ne peut s’éviter, en revoyant le tableau de son égérie, de repenser à celle-ci, aux généreux moments passés avec elle. Peu de temps après, le peintre reçoit la visite de son acheteur et découvre que ce dernier est un policier qui enquête sur l’absence de Mar. Est-ce que Vidal n’aurait-il pas, en usant de son art, provoqué contre toute attente cette disparition et bien d’autres encore ?

Par phibes, le 1 mai 2017

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Notre avis sur Natures mortes

Zidrou et Oriol se retrouvent pour notre plus grand plaisir. Après avoir réalisé La peau de l’Ours et Les 3 fruits, les deux artistes nous renvoient dans un nouveau récit complet qui, cette fois-ci, se rapporte à la destinée – peu commune – d’un peintre dont la particularité est d’avoir, en usant de ses pinceaux, fait disparaître les sujets qu’il prend comme modèle.

Comme il se doit, Zidrou nous transporte dans un univers qui, tout en s’intégrant dans l’histoire de l’art catalan de la fin du 19ème, fait preuve d’une grande maturité. L’artiste a pris pour cible Vidal Balaguer, un peintre catalan inconnu voire oublié mais cependant grand prodige du modernisme espagnol, dont la notoriété (d’après la fiction présente) a été contrariée par sa « malédiction », et nous livre sa destinée au travers d’une vision fantastique pleinement captivante.

Sous le couvert de cette fiction artistique qui mêle histoire d’amour en suspension et petite intrigue policière, Zidrou structure avec art son récit. A l’appui de deux époques distantes de 40 ans, le scénariste nous sensibilise sur son personnage principal, sur son caractère, son tourment hors du commun et ce qu’il est censé provoquer. De fait, l’évocation qui en ressort tangue entre réalisme et illusion, via des rebondissements qui se joue de la relation mystérieuse qu’entretient Vidal Balaguer avec sa créativité.

La partie graphique se veut de haute volée. Au moyen d’un travail pictural exceptionnel type peinture à l’huile, Oriol nous immerge dans l’univers du peintre concerné via des effets superbes. Très colorés et assurément représentatifs du modernisme catalan, ses dessins révèlent une recherche graphique et documentaire ensorcelante. Ses vignettes révèlent de nombreux tableaux qui servent de fond à des personnages stylisés et emplis de sensibilité.

Une très belle histoire comme Zidrou sait les raconter, à la fois fondée et irréelle, illustrée par un Oriol en très grande forme. Et si vous voulez en savoir un peu plus sur ce peintre catalan méconnu et surtout sur ses créations, n’hésitez pas à faire un saut à la Galerie d’art Gothsland de Barcelone, il est prévu une exposition à partir du 2 mai jusqu’au 27 mai 2017.

Par Phibes, le 1 mai 2017

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