Monsters

Bobby Bailey n’a plus personne dans la vie, ses parents sont morts depuis longtemps et il n’a pas d’amis. Il décide de s’engager dans l’armée. Au bureau de recrutement, il rencontre le sergent McFarland qui l’oriente aussitôt sur un programme top secret appelé le "projet Prometheus" qui recherche justement des jeunes recrus sans liens. Cependant, le projet est dirigé par le colonel Friedrich, un ex-scientifique nazi qui va tout de suite commencer ses expériences génétiques sur Bobby, le transformant progressivement en une créature monstrueuses. De son côté, McFarland culpabilise, il ne supporte pas l’idée d’avoir entraîné le jeune homme dans cette histoire extrêmement louche dont lui même ne connait pas les tenants et aboutissants. Il fait part de ses doutes au colonel qui voit en lui une menace et commandite aussitôt son exécution. Mais le sergent a le temps d’aller libérer Bobby. Désormais libre, la créature erre et se souvient de son passé, de sa mère aimante et de son père brutal…

Par fredgri, le 8 juin 2021

Notre avis sur Monsters

On pourra dire que ce volume aura eu sa part de rebondissements !
L’histoire était initialement prévue pour Marvel, Winsor-Smith abordait la relation entre Bruce Banner et son père, afin d’expliquer les traumas qui se sont ensuite manifestés par l’apparition de la créature verte. Mais le script est passé entre les mains de Bill Mantlo, le scénariste qui s’occupait alors de la série sur Hulk, qui s’est empressé d’utiliser l’idée dans ses propres scénarios, coupant ainsi l’herbe sous les pieds à Winsor Smith qui s’est alors tourné tout d’abord vers Dark Horse après avoir éliminé toutes les références à l’univers Marvel. Après quelques soucis avec l’éditeur, il s’est dirigé vers DC pour finalement aboutir avec son dossier sous le bras chez Fantagraphics ! Entre temps, le projet a évolué, il est devenu un pavé de plus de 370 pages, en noir et blanc. Et même si l’on avait fini par se dire qu’il s’agissait avant tout d’un énième projet avorté, quelque part on y croyait encore un peu. Surtout depuis quelques années ou l’artiste s’était remis plus intensément à sa réalisation…

C’est d’ailleurs intéressant de connaître un peu le passif de ce Monsters, de voir d’où il vient, quelles en étaient les premières intentions. On comprend mieux son mécanisme, les petites références qui peuvent encore se deviner.
Mais au delà de ça, Monsters est surtout le Magnus Opus de Barry Winsor-Smith !!! Un imposant volume très immersif qui nous entraîne dans les méandres d’un récit mosaïque particulièrement bien écrit, en plus d’être graphiquement très impressionnant !

L’artiste est alors au sommet de son art, on s’en rend compte dès les premières pages qui nous plongent dans des cases en noir et blanc sublimes, avec un encrage très fin, nourri de mille et un petit traits qui dessinent les volumes, les ombres, les expressions. On ne lit pas encore les mots, on est déjà subjugué !

Petit à petit, on entre pourtant dans cette intrigue bouleversante, dans les traces, tout d’abord, du jeune Bobby qui veut s’engager, mais qui tombe dans un véritable cauchemars. Il n’est pourtant pas seul, il y a déjà le sergent McFarland qui va rapidement regretter de l’avoir entraîné dans cette histoire. Puis il y a l’officier Jack qui est jadis tombé amoureux de la mère de Bobby, mais n’a su réagir à temps pour l’aider à s’échapper, avec son fils, des griffes de son mari ultra violent. Toutefois, ils n’ont su protéger Bobby, afin qu’il puisse sortir de cet engrenage qui va ruiner sa vie entière.

Winsor-Smith explore donc tous les aspects de la vie de Bobby, il revient dans le passé, nous raconte le quotidien de Jen, sa mère qui ne reconnait plus en son mari l’homme qu’elle aimait et qui s’est littéralement transformé pendant la guerre, revenant traumatisé, complètement reclus derrière une façade de violence alcoolisée. On découvre aussi la famille de McFarland, sa femme qui souffre de ne pouvoir le libérer de cette culpabilité qui le ronge, ou encore sa petite fille, Nina, qui a le don de pouvoir parler aux esprits…
Un scénario très intense et profond qui brosse un ensemble de portraits extrêmement fins et émouvants ! Barry W. Smith reste un scénariste inspiré qui prend son temps, tout au long de ces nombreuses planches, pour développer ces micro-récits jusqu’à cette fin qui ne laisse personne indifférent. C’est passionnant !

Monsters est définitivement LA sortie de l’année, très largement à la hauteur des espoirs que l’on pouvait avoir jusque-là !
Delcourt annonce déjà la sortie de la traduction pour fin septembre prochain, réservez votre exemplaire !

Par FredGri, le 8 juin 2021

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