MONDO REVERSO
Cornelia & Lindbergh (Edition limitée)

Cornelia est une aventurière recherchée par toutes les mercenaires et autres shérifes de l’ouest. Alors qu’elle fuit une chasseuse de prime particulièrement acharnée elle rencontre Lindbergh qui vient justement d’échapper à sa femme banquière et qui tente maladroitement de se déguiser en docteur itinérante. Tous deux doivent alors mettre la main sur un philtre indiens qui serait capable de transformer les femmes en hommes et vice versa…

Par fredgri, le 15 janvier 2018

Notre avis sur MONDO REVERSO #1 – Cornelia & Lindbergh (Edition limitée)

Alors, tout de suite, il faut bien comprendre que l’univers de Mondo Reverso, comme son nom l’indique, est complètement inversé. Les femmes sont le sexe fort et affichent leur virilité, tandis que les hommes portent des robes et se cantonnent à des rôles de potiche, comme dans tout bon western classique bien de chez nous ! Ce qui créé un récit à la fois complètement décalé, tout en ayant une intrigue qui se veut assez convenue !
Mais justement c’est ce qui en fait tout l’intérêt !

Car, à travers ce récit ou les rapports de force sont résolument échangés, nous pouvons appréhender avec plus de justesse les codes du western tels que l’on peut les voir dans la multitude de films ou d’albums BD. Ici l’homme devient un objet, il gesticule mièvrement, il pleurniche quand le danger se rapproche et se contente de satisfaire la femme qui porte la culotte. Le langage a lui aussi évolué, Jésus devient Jésuse, Dieu/Dieue, Poule mouillée/coq mouillé etc. Et même si on rit en suivant ces diverses mutations, progressivement, la vision que nous proposent Le Gouëfflec et Bertail devient aussi particulièrement édifiante.
Quelle façon plus efficace de montrer ce machisme inhérent au genre qu’en extrapolant ses codes au travers d’une démonstration qui frôle l’absurde le plus jubilatoire !

Ainsi le scénario nous présente une rencontre entre les deux sexes, avec le couple Cornelia/Lindbergh alors qu’ils se sont tous deux travestis. Cette rencontre improbable va leur permettre de passer outre les barrières entre homme et femme et se découvrir le plus sincèrement possible.
Le Gouëfflec s’amuse à troubler les repères, il insiste sur cette différences entre les deux genres, il amène en substance un discours sur le transgenre, l’homosexualité, la transformation ou le sexisme. Il ne porte pas forcément de jugement, mais n’hésite pas à tomber parfois dans la caricature la plus grossière… Toutefois, avec un peu de gymnastique d’esprit, il n’en faut pas beaucoup pour se rendre compte que ce qui nous apparait comme caricature n’est en fait que la simple transposition des codes du western tel qu’on les connait jusqu’à maintenant, ni plus ni moins. Des choses qu’on a acceptées, qu’on trouve "normales", mais qui nous apparaissent ici comme des éléments parodiques, un humour nettement plus subtile qu’au premier abord !

Ainsi, mine de rien, le scénariste nous amène certes à rire, mais aussi à réfléchir sur les fondements de notre pensée masculine dominante !

Mais n’oublions pas l’incroyable travail de Dominique Bertail qui propose ici des planches absolument magnifiques, pleines d’une multitude de détails, d’une très grande précision, avec des décors à tomber. C’est simple je suis complètement tombé sous le charme de ces dessins quand ils ont été prépubliés dans Fluide Glacial, chaque nouveau rendez-vous était un vrai régal pour les yeux !
Il faut juste préciser que la version album est très légèrement "retravaillée" par rapport à la première version dans Fluide. Ainsi des sexes disparaissent derrière des éléments de décors rajoutés… par exemple…

Cette édition limitée (tirée en 1200 exemplaires) propose aussi un ex-libris signé et un très beau cahier graphique, avec des storyboards, des illustrations hommage, des recherches de perso… Ça aurait peut-être mérité d’être plus étoffé, c’est vrai, néanmoins ce sont aussi de très agréables bonus !

Vous l’avez compris, une sortie que je vous conseille vivement !

Par FredGri, le 15 janvier 2018

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