Mon frère nocturne

Jakob a bientôt dix ans. Il est né neuf mois après la mort de son frère.
Son frère s’appelait Jakob aussi. Avant lui. Et il venait de fêter ses 10 ans lorsqu’il est décédé.

Dans les yeux et le cœur de sa mère, peut-être que Jakob était né pour remplacer son défunt frère, celui qui venait parfois lui parler, la nuit…

Jakob pensait que lui aussi quitterait le monde le jour de ses dix ans. Quelle angoisse ! Alors, avec son amie Miranda, il a tout fait pour vivre pleinement ses derniers instants, quitte à faire l’école buissonnière ou à se laisser tenter parfois par des jeux dangereux…
 

Par sylvestre, le 1 janvier 2001

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Notre avis sur Mon frère nocturne

Avec des planches en noir et blanc tantôt dessinées finement et pleines de détails ou tantôt noircies à coups de pinceaux appuyés, cette bande dessinée cherche graphiquement l’équilibre entre l’innocence du petit héros Jakob qui n’est âgé que de dix ans, la pression psychologique qu’il subit en tant que puis-né d’un enfant décédé, et l’angoisse qu’il s’impose à être persuadé que sa vie s’arrêtera comme celle de son frère à qui il est toujours comparé.

Beaucoup de choses viennent perturber Jakob. Mais l’histoire malheureuse de son frère a manifestement perturbé aussi ses parents… Donner à son second enfant le prénom du premier n’est pas le meilleur moyen de faire son deuil, semble-t-il ! Le père est parti après le drame, en plus, et on n’a pas l’impression que la mère ait su faire face, ait su parler au Jakob qu’il lui reste pour en faire un enfant épanoui, un enfant qui ne soit pas écrasé par le souvenir de l’autre.

Jakob fait du piano comme en a fait son frère… Jakob n’a jamais été mis sur un vélo puisque l’autre est justement décédé dans un accident avec un bus sur le vélo qu’il venait d’avoir pour son anniversaire… Jakob ci, Jakob ça… Pas simple pour un gamin de voir sa vie réglée par la tristesse des autres !

En cela, le dessin et les textes de Joanna Hellgren sont doux et justes. Il y a ces moments où l’enfant voit avec ses yeux de gamin et il y a les moments d’angoisse. Entre les deux, il y a aussi ces parenthèses nocturnes, rassurantes, où Jakob communique avec son frère, mais toutes rassurantes qu’elles sont, ces parenthèses aussi le ramènent invariablement à ce qui ébranle sa fragile psychologie. Heureusement, il y a Miranda. La seule amie de Jakob, sans doute. Un regard extérieur, en tout cas, et positif, qui va apporter de la joie et de l’espoir dans le quotidien de Jakob qui le vit comme si étaient arrivés ses derniers jours.

Conçu plutôt comme un carnet intime que comme une bande dessinée classique, Mon frère nocturne réussit à faire vibrer le lecteur pour ce petit bout de chou qui vit une situation déstabilisante. Il n’est pas dit qu’une fois le cap de ses dix ans passé, Jakob ne pourra pas affranchir ses mauvais démons et vivre normalement, libéré. On pourra donc choisir de lui imaginer un avenir en couleurs. Mais ça aura en tout cas été une force de cette œuvre que d’avoir su traduire en images et par des textes très délicats cette si noire épreuve que fut celle de Jakob de réussir à enfin entrer dans sa propre vie.

Quelques mois après sa parution aux éditions Cambourakis, Mon frère nocturne a été nominé au festival d’Angoulême 2009. Un ouvrage et une auteure à découvrir.
 

Par Sylvestre, le 19 novembre 2008

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