MAMADA
Époustouflante migrante

 
Mamada est l’insupportable chef de son village namibien himba. Née avec le regard de celle qui avait déjà quelque chose à reprocher aux autres, les siens ont fini par la supporter plutôt que véritablement la respecter… C’est que personne n’a maille à la contredire, sinon c’est la volée de bois vert assurée ! Seules deux jeunes filles de son village parties étudier à la ville osent, quand elles reviennent, essayer de lui faire reconnaître qu’autour d’elle, le monde évolue et qu’il faudra bien qu’un jour, elle s’en accommode.

Mais c’est le mauvais discours à tenir à Mamada ! Gardienne des traditions de son peuple, elle ne sait par exemple des Blancs que ce qu’ils lui laissent comme impression lorsqu’ils passent par grappes prendre furtivement deux-trois photos avant de filer et soutient qu’elle seule et ceux qui la suivent savent encore vivre autrement que superficiellement ! Ça oui, c’est sûr, Mamada déteste les touristes, elle déteste les Blancs, elle déteste… tout le monde !

Peu douée pour la chasse, Mamada demande un jour un grigri au marabout de son village qui lui refourgue alors la première babiole qui lui tombe sous la main. Lors de la partie de chasse qu’elle part faire aussitôt après tombe du ciel un objet duquel s’échappe une substance qui entre en contact avec elle. De là lui viendra un superpouvoir dont le premier effet sera de la téléporter au beau milieu… d’un wagon du métro parisien !!! Mamada était servie, elle qui ne pouvait pas blairer les Blancs ! Et peu à peu, sur le chemin du retour à son village, elle apprendra à maîtriser ce superpouvoir…
 

Par sylvestre, le 7 octobre 2013

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Notre avis sur MAMADA #1 – Époustouflante migrante

 
On a tellement aimé les précédentes bandes dessinées de David Ratte que c’est avec une confiance sans bornes qu’on se ruera à la découverte de son quatorzième album : ce tome 1 de la série Mamada. Et l’on ne sera pas déçus ! En tout cas pour peu qu’on accepte que dans cette nouvelle histoire s’invitent les notions de fantastique et de superpouvoirs… Se détachant en effet de la solidité et de la simplicité du contexte universellement connu sur lequel il s’était appuyé pour réaliser Le voyage des pères et L’exode de Yona, l’auteur a pris cette fois plus de risques en imaginant une histoire qu’on aborde sans y avoir de repères.

Pas de panique, cela dit. Car c’est justement sur ce vertige, sur cette absence de repères, que joue l’auteur qui va propulser sa peu tendre Mamada au cœur d’un monde qu’elle dit haïr (mais sans doute par méconnaissance ; on le sait bien, le racisme naît souvent de là). Et à y être, plutôt qu’avoir dépaysé son héroïne de la manière douce comme l’avait fait par exemple Tom Tirabosco dans son superbe Monroe, David Ratte a choisi la voie de la science-fiction et du fantastique pour gagner du temps et ainsi créer un absolu et brutal décalage pour Mamada ! Qui ne s’en émouvra d’ailleurs pas particulièrement, prenant d’entrée avec un grand sang-froid le métro pour le monde des morts qu’elle s’est alors simplement évertuée à quitter !

Du fantastique, donc. De l’absurde, c’est clair. Des références, aussi : musicales, par exemple, avec Psy ou Carly Rae Jepsen joués par les walk-man des deux étudiantes himba, et même l’apparition de Stromae (!!?) Mais bien évidemment de l’humour, également. Une bonne grosse dose d’humour, tenace comme l’ocre sur la peau de Mamada : cet humour qui nous a fait rire dans les autres albums de l’auteur et qu’on retrouve ici, dans des situations comiques graphiques, mais également dans de truculents dialogues bien décalés !

Cerise sur le gâteau, le retour post-téléportation de Mamada vers son village ne sera pas le seul thème de cette série. David Ratte ne semble en effet pas vouloir s’en tenir au simple road-movie en forçant la rencontre entre Mamada et Sidonie (histoire d’amitié et message d’espoir), en envoyant des Européens dans le désert namibien de la même manière que Mamada a été déracinée (naissance d’une communauté blanche en terre himba et donc pourquoi pas de relations originales entre eux et les autochtones ?) ou encore en nous tenant en haleine avec cette expérience des Chinois qui est à l’origine de l’intrigue générale…

Le pack complet, quoi : originalité, humour, plaisir ! Rien qui puisse vous faire hésiter à accepter ce rendez-vous en terre inconnue !
 

Par Sylvestre, le 7 octobre 2013

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