Lucienne ou les millionnaires de la Rondière

A la Rondière, Lucienne reçoit via le facteur des nouvelles heureuses de ses petits protégés qu’elle parraine généreusement. Le cœur léger, elle se dirige vers le poulailler et tombe sur autre lettre gisant au sol. Cette dernière qui lui est adressée personnellement l’informe qu’elle est la gagnante du gros lot des magasins Outillor. Elle en fait part aussitôt à Georges, son mari, qui lui explique qu’il s’agit assurément d’un attrape-nigaud. Irritée par la moquerie de son homme, elle décide de faire le tour de ses voisins afin de savoir s’ils ont été destinataires de la même lettre. Après avoir posé la question d’une façon détournée, elle comprend que personne, même sa nouvelle voisine Clémentine, n’a reçu le même courrier. Plutôt perturbée, certes par le fait que c’est l’anniversaire de leur fils décédé, elle en vient même à fouiller les poubelles la nuit. Elle se décide alors d’aller à la foire d’Orsennes afin de réclamer son dû au camion ambulant Outillor. Aura-t-elle gain de cause ? Et si ce n’était pas le cas, comment le prendrait-elle ?

Par phibes, le 17 mars 2020

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Notre avis sur Lucienne ou les millionnaires de la Rondière

Comme l’explicite le petit dossier annexé en fin d’album et comme le stipule une des vignettes de l’album (représentant une tombe d’un enfant), cette histoire rurale se réfère à un lieu authentique (la Rondière est situé dans l’Indre) et à des personnages ayant existés puisque liés à l’enfance du scénariste Aurélien Ducoudray. Par contre, elle met en avant une intrigue qui se veut, elle, totalement fictive.

C’est donc avec une tendresse non dissimulée que l’auteur construit son récit dans lequel interviennent donc Lucienne (sa grand-mère), Georges (son grand-père), Kikine (leur chien)…, le tout au sein d’un village campagnard échappant à toute contrainte urbaine. Le ton est généreux, rustique, nature, empli de prévenance, restituant ainsi des échanges propres au terroir particulièrement stimulants. S’appuyant sur une fibre sensible, Aurélien Ducoudray nous assure d’une équipée humaine simple à la fois émouvante et jubilatoire basée sur des souvenirs bien ancrés.

On se plait donc à suivre la sémillante Lucienne perturbée par cette lettre des établissements Outillor et prête, de par sa bonté, à faire du bien à tous les enfants miséreux de la planète. Ses agissements reposent, de fait, sur de bonnes intentions qui touchent profondément et même pourraient faire exemple. Via cette thématique, c’est la vie à la campagne et plus particulièrement au village de la Rondière qui est radiographiée. On y découvre des instantanés d’un autre temps (sans être péjoratif), riches de caractères et d’échanges sans fioriture, toujours dans une sympathie ambiante charmeuse.

Gilles Aris signe ici sa deuxième collaboration avec le scénariste. Après la Ballade de Dusty, épopée américaine, l’artiste revient dans des dispositions graphiques inhérentes à la campagne profonde française. A cet égard, on ne pourra que saluer le travail exécuté par ce dernier sur la physionomie de ses personnages. En effet, tous bénéficient d’une réelle représentativité qui marque pleinement. A la limite de la caricature, Lucienne, Georges, Clémentine, la mère Marie, Camille, Vonette,… se révèlent très convaincants dans leurs agissements et leurs dialogues. Par ailleurs, l’univers rural est également croqué avec goût. La Rondière nous apparaît dans sa simplicité et sa naturalité.

Une très belle histoire concoctée par deux artistes à la sensibilité avérée. Un plaisir de lecture !

Par Phibes, le 17 mars 2020

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