1905 - 1914

(Reprise des strips de Little Nemo in Slumberland parus entre le 15 octobre 1905 et le 26 juillet 1926)
Nemo est un petit garçon rêveur. Une nuit, Morphée, le roi du monde des rêves, appelé Slumberland, souhaite voir Nemo afin de le présenter à sa fille la princesse, qui s’ennuie. Chaque soir, alors, on tente d’amener le petit garçon jusqu’à Slumberland. Mais l’entreprise n’est pas facile. Il faudra plusieurs mois pour y arriver, chaque fois il se réveille au mauvais moment. Et même une fois sur place, le simple fait de pouvoir parvenir jusqu’à la princesse s’avérera particulièrement ardu.
Némo va ensuite vivre tout un tas d’aventures, toutes plus rocambolesques les unes que les autres, accompagné par la princesse, par Flip son ami, bonbon le page en sucre ou encore Imp le petit sauvage. Des aventures qui vont ensuite l’amener sur Mars, sur la Lune, chez le père Noël, à dos d’oiseau, sur des chevaux de mer…

Par fredgri, le 26 mai 2014

Publicité

Notre avis sur 1905 – 1914

Même si, contrairement à ce qui est dit un peu partout, Little Nemo in Slumberland n’est pas l’une des premières bandes dessinées (McCay en produisait lui même depuis deux ou trois ans, avant Little Nemo) il n’en demeure pas moins qu’elle reste, encore à ce jour, l’une des plus innovantes, des plus imaginatives qui soit. Une œuvre majeure incontournable !

Pourtant dès sa publication en 1905, ce fabuleux strip n’arriva pas à séduire le grand public qui ne s’y intéressa tout bonnement pas.
Tout d’abord publié dans le The New York Herald jusqu’en 1911, le strip va suivre McCay qui arrive ensuite au New York American de Randolph Hearst jusqu’en 1914. McCay va plus tard revenir au Herald, en 1924, ce qui va lui permettre de ramener brièvement, jusqu’en 1926, Little Nemo. Mais quand il retourne chez Hearst, ce dernier préférera le cantonner au dessins politiques et ca sera définitivement la fin du strip… Il faudra attendre le bouche à oreille, les louanges des lecteurs pour avoir, au milieu des années 80 la publication des premières Intégrales chez Fantagraphics, traduites par Zenda dans la foulée !

Et c’est ce qui est réellement incroyable dans cette histoire, s’imaginer un auteur du calibre de McCay, produisant une œuvre aujourd’hui reconnue comme étant fondatrice, mais n’étant absolument pas reconnu en son temps et pratiquement pas soutenu par ses éditeurs qui diffusaient le strip dans finalement assez peu de journaux ! Il n’est évidemment pas le seul, le Krazy Kat de Herriman subira aussi le désintérêt populaire, excepté de l’intelligencia, mais au moins lui avait le soutien inconditionnel de Hearst !
Mais qu’importe, car quand on relit aujourd’hui ces pages, quand on replonge dans l’incroyable énergie créatrice de Little Nemo on ne peut que se laisser séduire devant le génie de cet artiste en avance sur son temps, qui explora les limites de la bande dessinée, qui joua avec ces codes, avec la lecture, qui repoussa les possibilités du médium tout en jalonnant ses planches de questions sur la psychanalyse du rêve, sur l’inconscient. On est très vite ébouriffé devant tant de potentiel, devant la finesse du graphisme, des perspectives, devant ces jeux formalistes, cette liberté quasi totale !
C’est magnifique, c’est passionnant !

Bon, c’est vrai aussi que la lecture est mine de rien assez intense, qu’il vaut mieux l’aérer en se concentrant sur quelques pages, chaque soir plutôt que tout lire d’un bloc. Mais cette découverte et redécouverte reste encore maintenant, alors que je n’en suis pas à ma première lecture, un merveilleux moment d’étonnement. Cet artiste, dès le début du vingtième siècle, créa une bande dessinée qui continue d’éblouir par son audace, par sa perpétuelle réinvention de son propre support. Rares sont ceux qui actuellement s’amusent autant avec le fond et la forme, et avec autant d’intelligence !

Plus de 110 ans après son lancement, Little Nemo in Slumberland démontra que la bande dessinée pouvait aussi s’adresser à tout les publics, petits comme grands, populaire comme intellectuel. Pouvant aussi se lire au premier degré, tout simplement, ou alors ouvrant sur plusieurs niveaux de lecture.
Je ne vais pas entrer ici dans une analyse de l’approche psychanalytique de Little Nemo, il y aurait beaucoup à dire, certainement. Toutefois c’est intéressant de ne pas s’arrêter aux simples aventures du petit garçon, de guetter les sous-entendus qui se glissent, par exemple, entre Nemo et la princesse, de réfléchir aux signes de l’inconscient qui se glissent deçi delà.

Little Nemo in Slumberland est l’une des plus grandes BD qui soit, qu’il vous faut absolument avoir dans votre bibliothèque…
C’est juste incompréhensible qu’il soit si difficile d’y avoir accès. Cette édition Taschen est certes la plus intéressante (même s’il manque la période 1924-1926, que l’on trouve uniquement dans le deuxième volume de la version Horay), mais elle a très vite été épuisée, victime de son succès. A noter qu’elle existe en anglais mais aussi en français. Nous ne étalerons pas plus sur les deux albums publiés il y a quelques temps par Delcourt qui sont juste outrageusement chers, ils ont voulu limiter l’accès de ce chef d’œuvre à un public de privilégiés…
Espérons juste que la sortie prochaine chez IDW d’une mini série écrite par Eric Shanower et dessinée par Gabriel Rodriguez permettra l’édition d’une nouvelle intégrale plus abordable !!!

En attendant, je vous conseille vivement de vous replonger dans ce sublime univers…

Par FredGri, le 26 mai 2014

Publicité