Lettres d'Agathe

 
Née en 1946, Agathe n’était pas attendue avec joie, au point que sa mère ne l’a pas prénommée, laissant le soin de le faire à une nourrice qui s’est occupée d’elle pendant les premiers mois de sa vie. Soeur de François et de Jacques, Agathe n’a jamais cessé de sentir la sévérité de sa mère, de ses regards, de ses remarques, alors que ses frères ont eux toujours été chouchoutés… Et rien n’y a fait. Les années passant, ce sentiment d’être de trop ne s’est jamais estompé, voire, la condition de fille d’Agathe a empiré.

Plusieurs dizaines d’années après, alors que sa mère est décédée depuis quelques temps, Agathe prend sa plume et lui écrit, lui racontant comme elle l’a vécu par quoi elle est passée… Une manière comme une autre de se débarrasser d’un poids trop lourd…
 

Par sylvestre, le 1 janvier 2001

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Notre avis sur Lettres d’Agathe

 
Le moins que l’on puisse dire, c’est que ces Lettres d’Agathe sont une lecture très pessimiste, très dure. On s’attend au détour de chacune des premières planches à voir le ton changer pour laisser la place à une narration plus gaie, mais non. Tout au long de l’ouvrage, le poids du passé d’Agathe et son ressenti d’enfant mal aimée transpirent. On continue alors pour voir comment les choses vont évoluer, pour voir où s’opérera le virage dans la vie de la petite fille, ce qui aura été le déclic vers une vie meilleure. Et force est de constater que jusqu’au bout, la joie n’aura pas vraiment germé dans ce champ de malheur… Les lettres d’Agathe sont tristes, sont sans espoir, comme Agathe elle-même, celle qu’on nous présentera avant qu’elle-même ne devienne mère.

Cette histoire qu’on doit à Nathalie Ferlut (ici aux commandes du scénario et du dessin) est inspirée de la biographie d’une de ses amies. Voilà qui explique peut-être cela dans sa motivation à revenir sur un si noir bilan : rendre hommage à une amie. Car Lettres d’Agathe est un puits sans fond en cela que toute sa vie, l’héroïne aura cherché la réponse au "Pourquoi ?" de l’attitude injuste de sa mère envers elle sans jamais trop trouver de réponse vraiment satisfaisante. Et si une bribe d’explication finit par apparaître, elle reste un élément qui ne servira plus à rien à Agathe pour changer les choses…

Ce difficile exercice de style est réalisé brillamment par l’artiste qui montre là l’éventail de ses talents, à savoir un dessin agréable, des couleurs directes bien belles et majoritairement claires, voire gaies, malgré le sujet, ainsi qu’une narration de très grande qualité : de longs et beaux textes qui ont ce rôle difficile consistant à bien véhiculer de mauvais souvenirs.

Ces Lettres d’Agathe ne sont décidément pas à conseiller à ceux qui auraient un coup de blues. Elles sont des larmes qu’Agathe n’a pas pu verser aux bons moments. Elles sont un cri poussé qui n’aura jamais été entendu par la personne à qui il était destiné. Elles sont désormais comme un fantôme qui erre et qui ramènera le lecteur intrigué dans les tristes années 50 d’Agathe…
 

Par Sylvestre, le 14 mai 2008

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