Les deux vies de Pénélope

 
Pénélope est chirurgienne à Bruxelles mais elle est surtout chirurgienne de guerre à Alep, en Syrie, où elle est partie 32 fois en mission ces quatorze dernières années. Ce jour-là, elle rentre après une très longue période passée loin des siens. Avec, dans la tête, entre autres, le regret de n’avoir pas pu sauver une fillette…

Revenir à la maison n’est jamais simple après des missions comme Pénélope en vit. Son corps revient à la maison mais sa tête reste là-bas. Là-bas où, elle le sait, elle va retourner pour continuer de sauver des vies. Ce qui l’empêche de faire réellement le break…

Par sylvestre, le 20 février 2020

Notre avis sur Les deux vies de Pénélope

 
Pénélope vit entre deux univers. Il y a celui, occidental, douillet, et peuplé de gens qui l’aiment et qui l’attendent. Et il y a l’autre, lointain, dangereux, mais où elle se sait infiniment utile. Revenir en Europe est, mission après mission, de plus en plus difficile pour Pénélope. La communication entre elle et les siens en pâtit. Car ses étapes Bruxelloises sont devenues pour elle des entractes entre ce qui, finalement, est devenu sa "vraie vie".

Dans cette bande dessinée, on est très peu en Syrie. On est principalement en Belgique, sous le toit familial. Et on assiste aux retrouvailles, aux re-prises de repères pour Pénélope, la grande absente qui revient et à qui tout le monde pose toujours les mêmes questions ou fait de sempiternelles remarques. Sans jamais la voir atterrir vraiment. Sans jamais la sentir vraiment heureuse d’être en famille. Pénélope doit avoir l’impression de perdre du temps, quand elle est chez elle. Elle a l’impression d’être plus lucide que les autres, de détenir une vérité à laquelle les autres n’auront jamais accès. Voilà qui en fait quelqu’un de pas forcément sympathique ; et pourtant, on la comprend totalement. Et on ne la juge donc pas.

Pour écrire cette BD, Judith Vanistendael a choisi en quelque sorte le non-dit graphique. Elle parle en effet du conflit en Syrie sans le montrer mais elle en révèle toutefois une conséquence ; aussi marginale, personnelle ou anecdotique soit-elle. Le ton est juste, les dialogues aussi. Les malaises, les frictions, les querelles, les soupirs… Des moments à vivre intensément car ils ne sont que passagers… Peut-on dire de Pénélope qu’elle est égoïste, elle qui sacrifie beaucoup pour soigner les autres ? Que son mari et ses enfants sont possessifs, eux dont on comprend la frustration ? En réalité, chacun a raison, car chacun a sa vie et sa vision des choses. Juger ne changera rien.

Tout en vérités, tout en respect, tout en profondeur, Les deux vies de Pénélope est un roman graphique où le curseur de la vie de l’héroïne oscille entre fadeur et excitation de manière pas toujours logique à nos yeux mais de manière naturelle à ses tripes.
 

Par Sylvestre, le 20 février 2020

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